Chapitre 3 : Jimin

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« Tu veux parler de moi ? »

C'est de toi avant de n'importe quel autre que je veux parler mon ami. Tu as beau paraître surpris et ta voix partir dans les aigus, tu ne peux empêcher ton visage de dessiner à tes lèvres un sourire. Tu es un drogué Jimin, le plus d'yeux se posent sur toi, le plus tu te sens vivre. Tu n'es pas acrobate pour rien. Tu l'es pour survivre et ne pas t'écraser. Pour vivre et ne pas rester mort. Les projecteurs, c'est cette manière, et la notre à tous, que tu as choisi, pour vivre.

Mais chez toi, funambule qui sur son fil ne s'est jamais senti vivre – le précipice n'était assez profond, assez dangereux –, c'est au-delà du show. Tu as besoin de ces regards pour te porter pendant ton vol, s'ils te lâchent une seconde, tu es mort, qu'importe si les filets que tu bannissais réapparaissaient miraculeusement pour t'entourer de leurs mailles rêches, pour te réceptionner de leurs nœuds durs se plantant dans tes muscles tendus par la chute. Tu es mort d'ailleurs, en cet instant ; dans ta roulotte branlante à laquelle tu préfères les chambres miteuses d'auberges où l'on t'invite goulûment à monter, quelques fois. Mais ça c'était avant lui. Le seul à qui tu n'as pu refuser le titre d'Enfant des nuages qui t'avais jusque là toujours été réservé.

« Je veux raconter ton histoire Jimin. Je veux parler de l'Enfant des nuages comme je veux parler de ta figure morne et morte.

Mon ami grimace.

- C'est pas cool Jin ! Pourquoi ne pas juste raconter le cirque comme Taehyung ?

- Parce que je ne suis pas le Grand Paon, Jimin. Et parce que ce cirque là, tout le monde peut le voir en soulevant un rideau un soir de spectacle. Ce dont je veux parler c'est le déracinement, la mouvance, la perte. Je veux parler de qui nous sommes lorsqu'il n'y a, sous ce chapiteau, que nous, où lorsque les projecteurs sont éteints, de ce qui se passe après, ce qui se passe avant, d'où nous venons...

- Nous ne sommes rien Jin, sans ce chapiteau, sans Namjoon et sans le cirque. Tu l'as dit toi-même, je suis mort quand je ne vole pas. Et c'est le cas pour chacun d'entre nous, nous n'avons d'autre essence que celle que nous donnent les paires d'yeux qui nous regardent. Nous sommes ce qu'ils font de nous et nous sommes des oubliés lorsqu'ils rentrent chez eux et que nous restons là, tels des automates dont on n'aurait remonté la clé.

Mon ami est en colère, son visage rougit. Peut-être ai-je assez insisté avec mes lubies de récits de vie ce soir ? Que vais-je pouvoir dire sur eux s'il n'accepte pas que je parle de lui en d'autres termes que ceux d'une étoile si brillante qu'elle efface toutes les autres ?

- Jungkook, il n'est donc rien d'autre qu'un porteur pour toi ? ».

Je le laisse sur cette question et déplie mon corps qui s'était enroulé autour de la chaise avant de sortir de la roulotte d'un pas que je n'ai jamais maîtrisé.


***

Encore un nouveau personnage :"3 J'ai hâte que vous les rencontriez tous !


Children Of the Clouds [Jikook]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant