Monde Cruel // Pierre Gasly - Tome 2

LI - l'enfer

POV Pierre

Samedi 19 juillet

« POLE POSITION, PIERRE. POLE POSITION »

Je soufflai longuement. Celle là avait été particulièrement dure. Toute la pression du weekend à domicile retombait pour la journée. Et mon esprit partit autre part, sur le visage de Chiara. Cela faisait presqu'un mois que je n'avais pas eu de nouvelles. Toto m'avait demandé de rester concentré sur les courses. Spielberg avait été particulièrement difficile et les résultats n'avaient pas été là. L'ambiance dans l'équipe était différente. Personne n'avait osé demander où était passé Chiara. Le vendredi du Grand Prix d'Autriche, Toto avait organisé une réunion spéciale pour dire à l'équipe que Chiara avait pris des vacances. Et puis il était parti. James Wolves avait pris les reines de l'écurie. Il me contactait de temps en temps pour me donner des nouvelles, mais n'en disait jamais beaucoup.

« Bravo Pierre!
- C'est bien pour demain ça.
- Viens aux interviews.

J'avais l'esprit ailleurs mais j'avais des obligations, comme toujours. Je répondis aux quelques questions, sans grande conviction et retournai dans ma salle de préparation. Je partis prendre une douche et récupérai mon téléphone juste après. J'avais l'espoir depuis presqu'un mois de recevoir un message de Chiara alors que son téléphone était rangé dans mon sac.

« Pierre, je peux entrer ?
- Oui, vas y Pyry.
- Comment ça va ?
- J'ai fait la pole, c'est super!
- Comment ça va dans ta tête ?
- Je suis pas là.
- T'as pas de nouvelles ?
- Non... Tu sais des fois je me dis qu'ils me l'ont juste prise et que je la reverrai plus jamais...
- Ne dis pas ça! Toto va la retrouver.

Je pris mon visage dans les mains et soufflai un bon coup. On toqua à la porte et Pyry ouvrit.

- Toto!
- Pierre...
- Elle est où ?

Je bondis immédiatement du canapé sur lequel j'étais assis et suivis Toto à la sortie du paddock. Une ambulance était garée et la porte arrière ouverte. Je m'y précipitais et vis, allongée dans un brancard, toute frêle, Chiara. Je me plaçai à côté d'elle et lui pris la main.

- Qu'est ce qu'il t'ont fait...
- Pierre..., fit-elle en sursaut.
- Je suis désolé, vraiment, tout ça c'est ma faute. Je suis désolé de t'avoir mis dans cette merde. On va vite aller à l'hôpital. Je te lâche plus ok?
- Restes avec moi...
- Promis Chiara, promis.
- Pierre, je te la confie. Je passe à l'hôpital ce soir, on discutera. Bravo pour la pole.
- Merci Toto, merci vraiment pour tout.

Il claqua la porte et l'ambulance démarra. Je tenais fort la main de Chiara quitte à lui faire mal mais j'avais eu tellement peur de la perdre que je voulais la sentir, pour de vrai. Je ne rêvais pas, elle était là, avec moi. Elle avait l'air fatiguée, apeurée. Ses yeux étaient embués et j'avais du mal à savoir si elle était épuisée ou s'il y avait autre chose. Elle ne parlait pas et ne me regardait presque pas. Le trajet ne fut pas long et on arriva rapidement à l'hôpital le plus proche. Une équipe médicale la prit en charge et je me retrouvai de nouveau seul, à attendre. Les secondes duraient des minutes, les minutes des heures et la fin de journée était interminable.

« La famille de Chiara Rivoli ? Demanda une infirmière.
- C'est moi.
- Vous êtes ?
- Son petit ami.
- Je vois. Suivez moi.

On entra dans une pièce froide, blanche, angoissante. Et je la vis, allongée, avec un nombre incalculable de bandages. Les yeux fermés, elle semblait apaisée. Tout l'inverse de moi.

- Comment elle va ? Demanda une voix derrière moi.
- Elle se repose. Elle en a besoin. Ces dernières heures n'ont pas été de tout repos pour elle. Elle était bien amochée, déshydratée et en manque de nourriture. Mais elle va s'en sortir. Physiquement ça ira. Psychologiquement, je ne sais pas trop ce qu'elle a vécu, mais ça a du être traumatisant au vu des cris qu'elle faisait en salle de contrôle.
- Merci beaucoup, finis-je.