Partie 1: Le divorce

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Ainsi Bintou et Alfred je vous déclare mari et femme…

- Euh… pardon Monsieur l’abbé… Mon père… donc-là nous sommes en couple ? … Ma future femme est devenue ma femme, exact ? demandais-je au prêtre....

- Euh… oui.
C'est fou non, une telle interrogation sachant qu'elle est rhétorique et ironique en même temps.

- Et bien je vous annonce-donc que nous partons en noce de divorce, vous êtes évidement invité pour le vin d’honneur - mais nous-deux on se tire - on noce et on divorce ! TCHAO TOUT LE MONDE !

Là, j’ai pris la main de Bintou, je l’ai serré très fort et nous avons couru tout droit vers la grande arche de l’église, laissant nos invités et surtout nos parents estomaqués - la gueule grande ouverte. On avait l’impression que chaque cerveau qui se trouvait dans l’enceinte de ce lieu de prières et de cultes se repassait le film deux ou trois fois dans tous les sens possibles pour savoir si vraiment nous allions aller jusqu’au bout de notre déclaration, ou que nous reprendrions le cours normal des évènements.

Mais non, nous avions bien disparu et laissé tout ce joli monde se remettre de leurs émotions et nous des nôtres.

Car oui, nous avions décidé d’aller jusqu’au bout du mariage mais pas plus loin - dès que nous avions su que nos carrières professionnelles allaient devoir nous séparer à pas moins de quatre cent kilomètres l’un de l’autre. Comment faire ? ni moi - ni elle ne voulait laisser le second faire le choix du sacrifice. Très vite nous nous sommes rendue compte de notre erreur.
Alors pour faire bonne figure et comme notre amour était sincère, il fallait avant tout garder un bon souvenir, ce fut notre mariage et ensuite fêter comme il se doit notre séparation dans une forme de noce au goût de divorce déjà bien entamée. Nous faisions déjà l’amour comme des dingues depuis près d’un mois.
Plus le grand jour arrivait et plus notre état d’excitation était absolument prodigieux - là nous allions le faire pour la dernière fois, mettre un point final à notre union, garder un souvenir en apothéose, abondemment surexcités pour le savourer jusqu’à sa dernière lampée.

En voiture nous rigolions comme des baleines. Nous étions presque fiers d’avoir fait subir à nos parents respectifs un tel affront. Nous voulions tellement nous payer une bonne tranche de rire, faire ce qui allait nous plaire et rien d’autre.

Oublier tous les soucis, oublier tout le monde à part nous, pour une noce, une seule noce et pas un jour de plus ensemble, nous oublier et puis c’est tout ;
car la souffrance de penser à l’autre au passé n’aurait aucun intérêt dans nos avenirs respectifs. Nous consentions à nous aimer encore ; encore, mais juste quelques heures. Ne garder aucun souvenir, juste cette sensation de désir d’un corps à corps éperdu en total lâcher prise : une folie, un grain de délire intense, un soupçon de démence, un truc de dingue égoïste, inespéré et unique.
Se laisser aller à toutes formes de choses sans vraiment savoir quoi et où cela allait nous mener, mais nous aimer pour la dernière fois, nous aimer, juste nous aimer et puis c’est tout, un point c’est tout … après ce sera fini, un au revoir et nous tracerons tout les deux notre route bien à l’opposé de ce que nous aurions pensé faire - car voilà nos chemins ne sont pas les mêmes et après tout nous sommes heureux de nous en être rendu compte aussi vite et ne pas faire souffrir ni l’un – ni l’autre.

- On est pas bien là ?!

- Si on est bien.

- On est bien qui ?

- Mon amour… Tu veux encore me l’entendre dire ?

- Oui ma chérie.

- Arrête, en ce qui me concerne je n’ai jamais eu le goût pour les diminutifs et les petits noms…

- Comment-ça ? Tu veux dire que…

- Bah oui, je t’en aurai parlé… t’emballes pas et je sais que tu aimes commencer tes mots doux ainsi, je ne t’en aurai pas privé… pas tout de suite…

- Pas du tout et je peux être doux sans diminutifs et petits noms rassures-toi !

- De toute façon on s’en fiche maintenant !

- Oui… oui…car nous allons divorcé après cette nuit de noce.

Mais dans le fond, c’est aussi à ce moment-là précis que j’ai fait le film avec elle d’une façon à laquelle je n’avais jamais du tout pensé auparavant.

C’est à dire avec l’impression d’une vie se dégradant de jour en jour, avec les habitudes et tout ces petites choses que l’on observe tant chez les autres et pour lesquelles on imagine ne jamais tomber nous même lorsque l’amour frappera à notre porte.

Lorsque je l’ai rencontré, c’était pour moi la femme plus qu’idéale, c’était la femme, plus qu’une femme, une tout autre femme que tout autre-autre femme.

Et voilà qu’en un instant dans cette voiture en partance pour Dakar, prêt à refaire les vacances du vieux film de Monsieur tel le célibataire que je redeviendrai au retour, je me rends compte que cette union n’avait rien de si extraordinaire à part l’unique amour que j’y portais moi-même.

Elle-elle ne s’est peut-être rendu compte de rien… pas encore, car la noce fut un désastre et plus encore, nous n’avons fait que nous déchirer tel un couple qui pourrait peut-être réussir.  Après notre mariage,  nous avons divorcé,  tel le début d'une longue histoire........

DILEMME 🖤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant