Le Seigneur et le Dragon

Chapitre 3 : Un magnifique début.

Une fois le combat terminé, Andy ordonna aux troupes de nettoyer le champ de bataille et dresser la liste des dégâts. Cependant, presque tout le monde avait les yeux rivés sur le Dragon qui tournoyait au-dessus de leur tête, avant d'atterrir sur la place de la ville, à quelque distance de moi.

Fruys inclina légèrement la tête et indiqua d'une aile les troupes congelées du Seigneur Morgan.

- Était-ce le puissant ennemi que tu as mentionné tantôt, ceux qui vous attaquaient et martyrisaient fréquemment ?

Je clignais un instant des paupières, avant de répondre d'un rapide "Oui". Alors comme ça, Fruys écoutait tout ce que je disais ?

Le Dragon renifla, en deux bouffées d'air froid.

- On ne peut pas parler de guerre, méprisa-t-il.

Je le regardais sans comprendre.

- Ce n'était qu'une bagarre, précisa-t-il.

A ses yeux, ce ne devait certainement être qu'une simple échauffourée, une vulgaire escarmouche entre gangs de rue rivales.

J'exprimais toute ma gratitude envers Fruys, puis demandais comment lui rendre la pareille. Au début, je pensais qu'il ne voudrait rien, après tout mon petit territoire n'avait probablement rien de précieux. Cependant, je fus vite pris de court lorsqu'il m'indiqua carrément son souhait.

- Je veux un trésor. Des tas de trésors.

J'avais surement du mal entendre... non ?

Néanmoins, je le conduisis dans la réserve Seigneuriale. En principe, cet endroit était la propriété exclusive de ma mère. Juste après leur mariage, mon père était parfois parti batailler, et chaque fois qu'il revenait, il ramenait avec lui les trois plus précieux trésors qu'il avait personnellement tirés du butin de guerre afin de l'offrir à ma mère. Et c'était dans cette réserve qu'elle avait tous entreposés.

Les yeux bleus glacés du Dragon se rétrécirent légèrement alors qu'il accrochait du regard la collection d'objets précieux à l'intérieur.

- C'est beaucoup mieux que ce à quoi je m'attendais, nota-t-il.

Puis il m'ordonna de partir. Je vis Fruys réduire sa silhouette et se faufiler dans la réserve, avant que la porte ne soit refermée. Soupirant légèrement, je restais néanmoins dehors à l'attendre.

Le barde itinérant m'avait un jour raconté que les Dragons aimaient kidnapper les belles princesses et accumuler des montagnes d'or, d'argent et de pierres précieuses, des trésors que les gens ordinaires ne pouvaient même pas rêver voir. Les Dragons écrasaient soi-disant impitoyablement tous ceux qui osaient les défier ou voler leurs possessions, jusqu'à ce qu'ils croisent la route de leur héro prédestiné.

Je me demandai silencieusement : "Se pourrait-il que les Dragons aient besoin de se nicher sur un tas d'or pour pouvoir passer une bonne nuit de sommeil ? Fruys a-t-il l'intention de transformer le débarras de ma mère en son nid de personnel ?"

Il s'avéra vite que je me gourais sur toute la ligne

Après trois heures sans aucun signe de Fruys, je ne pus retenir ma curiosité et ouvris la porte afin de jeter un coup d'œil. Le Dragon, qui avait drastiquement rétréci, dormait profondément sur le sol carrelé, entouré par des monceaux épars de métaux précieux de diverses couleurs. Hormis sa présence... la réserve était presque complètement vide ! Quelques vestiges des artefacts disparus apparaissaient encore sur les éraflures du corps de Fruys, en une fine couche de lustre couvrant ses écailles.

Je ne savais pas s'il s'agissait simplement de mon imagination, mais la couleur des écailles semblait légèrement plus claire.

A mon entrée, Fruys ouvrit les yeux.