Acte 4, scène 2 : Passions au Harem

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Scène 2

ALCIBIADE, DIOTIME, POLÉMARQUE, EUDOXIE, LES DISCIPLES ET LES FEMMES

Les disciples de Socrate entrent dans le gynécée.

ALCIBIADE : Soldats, maintenant que vous êtes des hommes et conformément à la volonté de Socrate, profitez de votre nouvelle situation. (Il sort).

DIOTIME : (Entre sur scène). Jeunes hommes, vous êtes les fines fleurs de la république. Bienvenue dans mon gynécée. (1)

UN DISCIPLE : Et toi, es-tu une fleur comme les autres ? Peut-on te cueillir ?

DIOTIME : Le seul qui peut me cueillir, c'est Socrate.

(À son nom, tous les disciples baissent la tête. Polémarque est ébahi. Tous s'affairent à trouver une partenaire. Les filles minaudent et choisissent leurs hommes. Le côté de scène de Diotime s'éteint. L'autre côté s'allume. Une jeune femme seule dans son alcôve ouvre une lettre.)

EUDOXIE : Ce soir, je fête mes vingt ans. Je vais enfin ouvrir mon cadeau, celui-là même que Diotime a gardé pour moi toutes ces années. (Elle ouvre un papyrus en décachetant le cachet de cire entouré de tissu carmin. En procédant, elle se coupe avec les bords du papier. Quelques gouttes de sang impriment la lettre.) Voyons, qui est l'auteur ? (Elle s'arrête net.) Non, je ne peux le croire. C'est donc elle ! (Elle lit. Le côté d'Eudoxie s'éteint. Le côté de Diotime s'éclaire.)

DIOTIME : Bien, messieurs. Notre soirée s'annonce sous les meilleurs auspices : j'ai prié Athéna pour qu'elle bénisse cette nuit, car c'est sous son égide que vous procréerez.

UN DISCIPLE : Tu aurais mieux fait d'en appeler aux grâces d'Aphrodite !

DIOTIME : (Ironique.) Pourquoi ? Aurais-tu quelques problèmes de virilité ? (Le disciple se ravise.)

DIOTIME : Bien. Reprenons. (Elle se racle la gorge.) Vous tous ici rassemblés, vous n'avez pas conscience de ce qu'est Éros (2).

UN DISCIPLE : (En aparté.) Moi, je sais très bien.

DIOTIME : (Elle continue sans s'arrêter.) De ce qu'Éros a fait, fait et fera, bien plus que tous les autres dieux de notre mythologie.

POLÉMARQUE : Mais n'est-ce pas Athéna qui œuvre pour notre cité ?

DIOTIME : Certes, mais Athéna s'occupe de l'équilibre de nos lois, alors qu'Éros éduque les jeunes hommes à traiter convenablement les jeunes femmes.

POLÉMARQUE : Et inversement.

DIOTIME : Soit. (Elle lui sourit. Polémarque lui sourit en retour.) Ainsi donc, je vous montrerai le chemin qui mène à la connaissance de l'Amour. Pour vous faire prendre la mesure des bienfaits d'Éros, je vais vous raconter une histoire, mais pas n'importe quelle histoire : c'est l'histoire de l'Homme !

LES FEMMES : Oui, oui. Racontez-nous, maîtresse. Nous voulons connaître l'homme !

DIOTIME : Commençons simplement : les hommes tels qu'ils furent crées par les dieux, étaient en vérité ronds comme des boules à qui l'on avait greffé quatre jambes, quatre bras et deux sexes.

UN DISCIPLE : Mais comment faisaient-ils pour, enfin, vous savez ...

DIOTIME : Justement, sois patient. J'y viens ... ils vivaient heureux, ils étaient complets, mais ils étaient aussi trop orgueilleux et ils décidèrent d'entrer en rébellion contre les dieux. Zeus furieux les foudroya en deux ! Il demanda ensuite à Apollon de les rendre à nouveau présentables. L'excès de peau fut aplani et ramené vers une zone au milieu du ventre que l'on appelle aujourd'hui le nombril.

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