Cull & Olivi : Désespoir

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SPOIL : CdE T1

Quelques années avant le premier tome des Chevaliers d'Emeraude

Lorsque le Roi Draka d'Argent tente de conquérir le Royaume d'Emeraude, il est arrêté et condamné à l'exil. Il quitte son pays dans la haine et la honte.

Son fils Cull prend alors les rênes de la contrée, et fait bâtir une immense muraille pour protéger son peuple d'éventuelles représailles. Regrettant les actes de son père, le jeune souverain essaie de fonder sa propre famille avec sa femme, la Reine Olivi.

« Votre Majesté ! Votre Majesté ! La reine vous demande ! »

Cull posa sa plume et se releva d'un bond. Il parcourut tout le château au pas de course, suivi par ses conseillers. Tous avaient hâte de rencontrer l'héritier d'Argent. Bientôt, le roi prit place au chevet de son épouse. Serrant ses doigts, il épongea son front. Olivi lui sourit, épuisée par ses efforts. Sa peau pâle était trempée de sueur, mais elle rayonnait. Cet enfant serait son premier, elle l'aimait déjà.

Le médecin royal s'affairait autour du couple, criant des ordres aux serviteurs. Il était confiant, la reine était forte. Elle mettrait au monde un bébé en bonne santé. Il se trompait : quand il prit dans ses bras la nouvelle princesse, il se figea. Elle était maigre et ne criait pas. Pourtant, ils hurlaient tous à leur arrivée sur Enkidiev. Il posa la petite sur une commode et vérifia son pouls. Il battait avec difficulté.

« Que se passe-t-il ? s'enquit le roi, inquiet.

̶  Son cœur est faible, seigneur.

̶  Oh... la reine étouffa ses pleurs.

̶  Pouvez-vous le soigner ? »

Le regard du physicien acheva Olivi. Elle fondit en larmes pendant que son mari s'assurait qu'ils ne seraient pas dérangés durant les prochaines heures. Il lui tendit leur enfant, qu'elle découvrit être une fille.

« Elle a tes cheveux, souffla Cull en caressant le duvet blond.

̶  Et tes yeux. »

La petite les regardait, ses yeux gris déjà fatigués d'exister. Elle se blottit contre les bras de sa mère, prête à dormir pour une éternité. Olivi embrassa son front, le cœur brisé. Cull tremblait, désespéré. Leur fille unique les quitta dans un souffle.

***

« CULL ! Les contractions ont commencé ! »

Olivi était secouée par de violents spasmes. Son corps ne lui obéissait plus, répondant à des réflexes plus vieux que les dieux eux-mêmes. Dans sa douleur, elle envoya une prière à Ialonus. Tout en lui implorant d'accorder une vie longue et heureuse à son cadet, elle espéra aussi qu'il veillait sur son aînée, seule sur les grandes plaines de lumière. La mère endeuillée perdit connaissance à la pensée de sa fille perdue.

Cull criait dans le couloir, ordonnant à ses serviteurs de ramener un médecin, des serviettes, de l'aide. Il était dépassé par les évènements, désirant plus que tout la survie de sa famille. Il suppliait Parandar d'être clément, ils avaient déjà bien assez souffert. En attendant l'arrivée du physicien, il s'assit à côté de son épouse. Elle était pâle comme un linge, et respirait faiblement.

Olivi mit au monde un petit garçon, qui survécut quelques semaines. Aucun guérisseur ne parvint à identifier son mal, ou à l'en soigner, mais tous avaient été catégoriques : l'enfant mourrait avant la saison des pluies. Ils avaient raison, même si ses parents avaient espéré un miracle jusqu'à la fin. Ils avaient entouré leur fils d'amour, lui chantant les légendes du Roi Hadrian et les comptines d'Argent. Le jour où il rejoignit sa sœur, Cull et Olivi sombrèrent.

***

« Olivi ! Tiens bon ! Je vais chercher le médecin ! »

Cull se précipita dehors. Il détala dans les allées et dévala les escaliers. Essoufflé, il trouva enfin le physicien. Celui-ci comprit d'un regard, et ils s'élancèrent ensemble. Arrivé auprès de la reine, le souverain prit ses distances. Debout à la fenêtre, il n'était pas prêt à entendre l'inévitable sentence. Pourtant, elle vint tout de même.

« Votre fils est atteint d'un mal semblable à celui de vos autres enfants, Vos Majestés. Je suis désolé. »

Olivi hurla. Elle détestait les hommes et les dieux, son mari et son corps. Elle ne voulait plus vivre sans ses petits. Elle désirait les rejoindre, les protéger comme elle ne l'avait pu. Rien ne la retenait ici, sur cette terre infertile. Quand son fils rendrait l'âme, elle le suivrait sur les grandes plaines de lumière.

Amour mauditOù les histoires vivent. Découvrez maintenant