L'apparition

Je me promenais doucement au rythme de mes songes dans la nuit déjà bien installée. Ce jour-là, les nuages gris et menaçants avaient masqué le soleil et cette grisaille monotone était la cause d'inquiétudes qui m'occupaient l'esprit.
En effet, le froid et l'humidité plus ardents cette année avaient provoqué un épidémie de grippe qui assaillait ma fille et les drogues pour la soigner étaient coûteuses et rares.
Étrangement, les nuages s'effaçaient pour révéler la lune laiteuse et pleine dont la clarté diffuse  éclairait mon chemin. Une myriade d'étoiles entourait cette perle délicate.
Plongée dans mes pensées je ne prêtait guère attention à ce qui m'entourait.
En étant plus attentif j'aurais par exemple pu remarquer les serpentins de brume qui s'enroulaient autour de mes jambes comme les bandelettes autour de la momie. J'aurai aussi pu entendre le craquement des branches et le frémissement des feuilles alors que le vent s'était tu. Il m'aurait simplement suffit de lever les yeux pour voir qu'une lumière mystérieuse était apparue sur la lune tel les reflets d'obsidienne dans les yeux de Belzébuth.
Mais rien de tout cela. Je rêvais simplement en marchant au grès de mes envies dans la forêt clairsemée.
Irrésistiblement je fus attiré par la côte. Lorsque j'arrivais sur la mer je restais immobile observant comme un enfant qui découvre le monde. La mer s'était retirée sur une grande distance mais l'endroit où d'habitude la mer se trouvait n'était pas même humide.
Je retirai mes chaussures et m'avençait sur la plage. La sensation du sable étrangement chaud me rappela qu'il faisait pourtant très froid. J'essayais alors de fuir mais tombais dans le sable, face contre terre comme si un force inconnue voulait m'obliger à rester.
Alors que de me retournais, un nuage masqua la lune. Lorsqu'il se fut dissipé, j'aperçus une silhouette illuminée comme une apparition divine. Je crus d'ailleurs un instant a une mirage devant cette beauté parfaite.
C'était une femme drappée simplement d'un fin châle blanc. Elle semblait perdue mais elle restait étrangement sereine. Sa peau était diaphane, ses yeux gris s'étaient posés sur moi et eux aussi me scrutaient avec réticence, ses cheveux fins vaporeux pareils à des fils d'araignée se confondaient presque avec la brume. Ils formaient une auréole argentée autour de sa tête. Il émanait d'elle une lumière éblouissante. Je crus voir une nymphe tombée du ciel.