Souvenirs refoulés

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Lorsque je me levai le lendemain matin, Bellamy semblait m'attendre de pied ferme dans la salle de séjour. Je décidai de faire comme si je ne l'avais pas vu. Il s'avança :

- Tina.

Il allait encore vouloir me parler, s'expliquer. Je l'esquivai. Dans la salle de bain, l'eau se mit à couler, Torielle avait voulu prendre une douche.

Bellamy bondit sur moi pour me prendre dans ses bras. Prise de court, je ne réagis pas.

- Pardonne moi Athéna. Je ne t'ai rien dit, car Alyzée me permettait d'exprimer tout ce que j'avais honte de t'avouer.

J'avais très envie de pleurer. Surtout lorsque mes mots restaient bloqués dans ma gorge car je ne voulais pas les prononcer. Par honte peut être moi aussi ? Mais il le fallait.

- Est ce que...c'est pour ça que tu as insisté pour m'aider ? C'est parce que tu voulais aller la rejoindre ? Tu voulais aller sur le continent ?

Mes bras pendaient le long de mon corps. Il me serra plus fort contre lui, son menton était appuyé sur mon épaule.

- Jamais je n'ai pensé ça. Je t'aime Athéna.

Je reniflai. Les larmes ne coulaient pas. J'aurais voulu lui dire que moi aussi. Enfin le dire. Mais je n'y arrivai pas.

Depuis les révélations de Torielle hier soir, je n'étais plus qu'un corps constamment bouleversé.

Je fermai les yeux un instant. Mes bras voulurent enserrer à leur tour le corps de Bell. Mais il avait disparu. Il n'y avait plus que le vide autour de moi.

- Lara ?

Elle était à côté de moi. Le regard fixé sur un point mouvant au loin. Elle plissa les yeux, je suivis la direction de ses globes scintillants. Dans l'obscurité se détacha un homme.

Elvis Domoto.

Derrière, lui, des points luminescents qui transperçaient le néant.

Trois hôtes. Un aux yeux rouges, l'autre aux yeux gris, le dernier aux yeux noirs. Comme un halo protecteur tricolore, ils avançaient au rythme des pas du président.

Je restai immobile. Paralysée.

- On se rencontre enfin, L'anti-hôte.

Il était proche à présent. A quelques mètres de nous deux, dans cet espace sans matière et sans lumière. Son regard était porté sur Lara.

- 76 206 je présume.

Il était grand, bien plus que mon petit mètre soixante cinq. Ses cheveux grisonnants rabattus sur le côté gauche de son crâne, tandis que certaines mèches rebelles tombaient sur son front. Il était ridé certes, approchant bientôt de la soixantaine. Mais il avait des pommettes saillantes, une mâchoire bien dessinée, des joues creusées et des petits yeux étirés. Rasé de près, il donnait l'impression d'avoir fêté ses quarante ans récemment. Il était réputé bel homme, grâce à son âge avancé. Les photos de lui lorsqu'il était adolescent laissaient difficilement deviner qu'il deviendrait aussi beau.

Son regard brun me foudroya. Son expression était indéchiffrable. Surprise, tourment ? Il s'avança, comme pour étudier mes traits. Incapable de reculer, je me penchai légèrement en arrière.

- Tu me caches son visage.

Il s'adressait à Lara.

- Malin, reprit-il d'une voix claire, mais rauque.

Il ne pouvait pas me voir grâce à Lara ? Je réussi à me tourner vers elle. Le visage fermé, elle me fit un signe pour m'inciter à me taire.

- Plusieurs indices m'ont menés jusqu'à toi, commença-t-il.

L'ANTI-HÔTE [Partie 1] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant