Slam

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À toutes ces filles que personne n'aime vraiment.

À toi qui manges toute seule, avec des écouteurs dans les oreilles, même si parfois y a rien dedans, mais ça donne l'impression d'une présence.

À toi qui sirotes ton café dans un coin de la fac, les yeux rivés sur ton tel à faire défiler la vie de gens.

À toi qui relances toujours tes « potes », qui as l'impression que tu es la pièce rapportée, la cinquième roue du carrosse.

Celle qu'on ne pense pas à inviter, celle qu'on ne rappelle pas, celle qu'on ne relance jamais pour être sûr qu'elle sera bien là.

Celle qui est sympa, oui, bien sûr, et le plus souvent prévenante, disponible, gentille, peut-être trop, tiens, c'est peut-être ça.

À toi qui es gentille, toujours un mot pour les autres, toujours un service rendu, toujours dix minutes à offrir, mais qui as l'impression de passer ta vie en sens unique.

À toi qui as l'impression que personne n'en a rien à foutre de toi. Que tu pourrais être là ou pas là, ça ne changerait rien.

À toi qui as des rêves simples, des espoirs loin d'être haut : quelques amis sur lesquels compter, une relation d'amour.

Et qui a l'impression que non, pas de ça pour toi, tu ne mérites même pas ça. Que t'en es privé voilà.

J'ai des choses à te dire
J'ai envie de te parler. Déjà parce que je te lis, je t'entends, je te vois. Tu as l'impression d'être plus grise que les murs tristes qui t'entourent, mais c'est loin d'être le cas.

Je te vois, je sais que tu es là, je sais ce que tu vis.
Peut-être que tu te dis que j'y connais rien, que je peux pas te comprendre, que je suis une cool kid des Internets avec mon mec cool, mon job cool, ma vie cool.

Mais quand t'enlèves tout ça, quand t'enlèves ces dernières années que j'ai la chance d'avoir, y a toi.

Y a la Mymy de 20 ans qui grignote son panini sur un banc encore un peu humide de rosée froide, dans sa fac moche qui ne la mène nulle part, entourée de gens qui ont tous l'air d'avoir un endroit pour soi.

Y a la Mymy de 20 ans qui se cache dans des coins chelou pour fumer ses clopes, parce que quitte à être toute seule autant que personne ne la voie.

Y a la Mymy de 20 ans qui se demande toujours ce que les gens pourraient bien lui vouloir, quand on vient la voir.

Me parler ? À moi ? Ok, c'est quoi le piège ? Tu veux mes cours, tu veux une clope, tu veux mon cul peut-être?

Parce que ne nous mentons pas, on sait tous les deux que ce n'est pas ma personne qui t'intéresse. Cette personne qui n'intéresse personne.

C'est ça la meuf que je suis, que j'ai toujours été, même si j'ai appris à m'épanouir et à faire taire cette putain de voix.

Il y a des gens qui t'aiment, qui n'attendent que de te rencontrer
Tu sais, hier j'ai enregistré un son que j'ai hâte de te faire écouter.

L'invité a dit un truc qui m'a marquée.

Il me racontait qu'enfant, puis ado, il n'était bien nulle part. Jamais le mec cool, jamais le mec populaire, jamais le mec rebelle, jamais le mec qui plaît.

Le mec terne. Le mec qu'on oublie. Le mec qui est dans la bande, ouais, mais jamais son moteur, son coeur, pas le centre névralgique.

Le mec qui chope pas, qui aime des trucs chelou que personne ne connaît, qui ne se reconnaît dans aucun des parcours.

Cet invité est maintenant super épanoui, 100% lui-même. Il a fait de ses passions chelou son métier, il mène une vie dont le « lui » de 14 ans ne pouvait même pas rêver.

Et quand je lui ai demandé ce qui avait changé, il m'a dit :
« En fait je crois que chaque personne peut trouver des gens avec lesquels s'assembler.
Moi aussi je peux m'assembler avec des gens, sauf qu'ils n'étaient pas là où j'étais.
Puis j'ai fini par bouger, changer de pays, de ville, de potes, de métier.
Et j'ai trouvé mes gens.
Alors maintenant je m'assemble. »

J'ai pensé à toi, et à moi, à cette meuf que j'étais, au fond à gauche de l'amphi, le plus près possible de la porte parce que parfois, tout me semblait si vain que je me barrais.
À cette meuf qui n'osait ni parler, ni draguer, ni postuler, parce que à quoi bon.
Autant rentrer chez moi et trouver n'importe quel moyen pour éteindre mon cerveau mon chagrin.
Faire passer le temps avec des séries télé, des bouquins, de l'alcool, des errances, pour surtout ne pas penser au fait que personne ne m'aime vraiment.

Je t'aime, et je ne suis pas la seule
Tu mérites d'être aimée.
Tu mérites de trouver tes gens.
Ils existent. Ils sont là, quelque part.
Je sais que t'as l'impression que c'est trop tard. Que t'as assez donné.
Que si c'était vrai, ça aurait dû marcher.

Crois-moi : il n'est jamais trop tard.
Dans ta poitrine, là, brûle le même feu sacré que tu admires chez les autres.
Et au fond, tu le sais, je crois.
Tu le sais parce que tu le sens crépiter, mais si, quand passe cette chanson qui te fout en vrac, quand tu sens son odeur dans le tram, quand tu n'arrives pas à dormir et que tu n'as personne à qui le dire.

Il brûle, ton feu, c'est juste que les gens ne l'ont pas encore vu. Mais ils le verront.
Tes gens le verront, ceux que tu finiras par trouver.
Je te dis pas forcément de tout plaquer, de t'expatrier, de te tirer, je serais mal placée pour ça, moi qui n'ai jamais osé.
Si tu le sens, si ça te titille, si ça te taraude, fais-le !
Mais si ça ne fait pas crépiter ton feu, ne te force pas.

Écoute. Écoute-toi. Qu'est-ce qui te fait vibrer ? Qu'est-ce qui te fait chanter, danser, pleurer, sauter, crier, courir, ressentir, vivre ?
Suis ce fil d'Ariane. Pas à pas. Accorde-toi le droit d'écouter le feu qui brûle. Il te mènera, forcément, à ce qui te rend heureuse.

T'es pas nulle. T'es pas morne. T'es pas terne.
Peut-être que tes potes t'oublient, peut-être que tu t'es fait larguer, peut-être que t'en es à ton huitième refus de stage, à ton énième période de chômage.

Peut-être que t'as plus la force.
Que tu te dis, eh bien si le monde s'en fout de moi, qu'il m'oublie, j'arrête. Je baisse les bras.
Je t'en supplie, ne fais pas ça.
Ne laisse pas ton feu s'éteindre.

De toute façon c'est impossible, il continuera à t'enfumer de l'intérieur, et tu sauras toujours, confusément, que t'as abandonné ces braises qui auraient pu tant te réchauffer.

Je sais que c'est dur.
Je suis désolée si ta vie ne ressemble pas à ce que tu imaginais, ce que tu espérais, à ce que l'enfant que tu étais dessinait avant de s'endormir et de rêver.

Mais elle peut y ressembler.
Il n'est jamais trop tard.
Le futur est toujours devant.
Un pas en avant, puis un autre, et un jour t'y es. Tu regardes autour de toi.
Tu lis des meufs qui pensent que personne ne les aimera.

Tu te rends compte que t'as fini par apprendre à être aimée. Et que ça s'est fait si doucement que tu t'en es même pas rendue compte.

Baisse pas les bras.
Y a qu'une seule toi, c'est la plus précieuse des choses. Y a que toi qui peut être toi.
Et le monde serait bien triste sans toi.

Courage. Moi, je t'aime fort — il ne te reste plus qu'à découvrir toutes les autres personnes qui pourront elles aussi te le dire.

Fin.

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À toutes ces filles que personne n'aime vraimentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant