Halfmaninn T.1 - La Porte des Mondes

Chapitre 1 : Azura

Un immense brasier s'élevait dans le ciel rougeoyant de Sahis. Les hurlements et les pleurs perçaient les cieux, d'où tombaient la cendre, comme les gouttes d'une pluie battante. L'air étouffant transportait une affreuse odeur de sueur et de sang, de chair brûlée et de larmes. Les plaines autrefois verdoyantes étaient mortes, les arbres retournaient à l'état de poussière. Tout n'était que chaos.

Sahis court un grave danger. Destruction et désolation seront semées, anéantie sera la paix.

Et dans cet immense carnage, se déployait les ailes d'un oiseau de feu, aussi haut qu'une montagne. Ses flammes, d'un rouge éclatant, semblaient combattre l'entité démoniaque qui lui faisait face, gigantesque. A la base de sa somptueuse incarnation, se trouvait une silhouette, indéfinissable, encapuchonnée dans une cape noire aux extrémités rongées par le feu.

Le Porteur il vous faudra retrouver, le dernier espoir face à cette calamité.

Derrière ce spectacle désolant, s'étendait le territoire de Nheakulen, autrefois seul porteur de la mort et du désespoir. La terre s'était craquelée à cause d'une sécheresse inédite, et plus aucune vie ne parvenait à se frayer un chemin entre les roches aiguisées qui perçaient le sol. Désormais, c'était tout Sahis qui lui ressemblait. L'incroyable Porte qui s'y dressait jadis, n'était plus qu'un tas de ruines. Et sous les décombres de pierres, jaillissait une lueur inquiétante, d'où sortaient des mains cadavériques, cherchant à percer le sol de leurs ongles sales.

Car les créatures se sont éveillées, et Halfmaninn sera écrasée.

Tout devint noir et, l'espace de quelques secondes, une jeune femme apparut. Une demoiselle au teint de porcelaine, aux cheveux d'un brun semblable à celui de l'écorce d'un arbre, et aux yeux aussi bleus qu'un océan de glace. Sa main gauche tenait une dague d'argent, tandis que son bras droit, entièrement noir, était couvert de runes orangées, semblant jaillir de sa main.

***

Le Gardien se réveilla en sursaut, le corps trempé de sueur, balayant d'un air paniqué la pièce dans laquelle il se trouvait. Tout était intact. Les murs, le sol, et même le plafond étaient faits d'or. Il passa une main tremblante dans sa chevelure ensoleillée avant de tourner la tête vers le grand miroir qui décorait la chambre, l'unique meuble de la pièce, avec le lit. Son regard étincelant redevint doré. Il sentait son cœur battre à tout rompre, et avait l'impression que la veine de son front allait exploser. Une affreuse migraine le tiraillait.

– Azura, murmura-t-il.

Il s'empressa de sortir de son lit, et de revêtir une imposante armure jaune, rehaussé d'une cape de velours rouge, sur laquelle était brodée en fil d'or un impressionnant lion rugissant. Il resta planté là quelques instants avant de réaliser la gravité de la situation. S'il avait eu cette vision, cela signifiait que le Joyau s'était éveillé. Il fallait faire vite, très vite. Il enfila une paire de gants de cuir et se dirigea vers la porte de sa chambre. Soudain, cette dernière s'ouvrit en trombe, et un visage qu'il ne connaissait que trop bien, lui apparut. Elle était essoufflée, et de ses yeux azurs, coulaient des larmes.

– Ghrian, s'exclama Mel'Ailah, je crains qu'Azura ait besoin de nous.

Ils échangèrent un regard inquiet. Les deux sorciers se ruèrent vers la pièce où reposait Azura et, lorsqu'ils ouvrirent les lourdes portes d'or, ils furent surpris d'y découvrir un homme à la chevelure grise, et dont la tête était rehaussée de bois de cerf : Mel'Celtore. Ce dernier se tenait devant un immense cristal bleu, entouré d'un halo lumineux, éclatant. Des battements de cœur résonnaient dans le grand silence qui s'était installé. Ailah posa sa main délicate sur la surface anormalement brûlante de l'incroyable bijou. Une vague de magie repoussa sa chevelure immaculée en arrière, faisant voleter les plumes blanches et brunes qui se trouvaient au niveau de ses tempes.