Chapitre 8 - Jenny

74 4 6
                                    

— Alors jeune fille? Je te laisse une heure, et quand tu rentres c'est dans la voiture de ce dégénéré d'Elias Perez?

Je ferme les yeux de toutes mes forces, de manière à occulter l'image de mon père furieux, campé devant la porte, poings sur les hanches. Je sens la colère qui gonfle en moi, faisant écho à celle de mon père.
Une tempête s'annonce, et elle sera violente.

— Et alors? En quoi ça te regarde?

Je croise les bras et relève le menton, dans ma meilleure posture de défi. Il veut la guerre, il l'aura.
Mon père me renvoie la balle:

— Ta sécurité me regarde, jeune fille. Elias est dangereux, je me tue à te le dire. Et si tu veux plus de preuves, un cadavre a été retrouvé juste devant sa porte!

— Je sais qu'il n'est pas normal, merci. C'est mon prof principal, je te rappelle, je levois tous les jours ou presque. Mais c'est aussi le père de ma meilleure amie, et je t'interdis de l'insulter!

Toi, tu m'interdis? À moi de te rappeler quelque chose que tu sembles oublier trop souvent : c'est moi l'adulte ici, c'est moi qui ai le pouvoir de t'interdire des choses, et je refuse que tu montes dans la même voiture que Perez, surtout lorsqu'il est suspecté de meurtre!

Ma mâchoire se serre jusqu'à ce que mes dents crissent. En réponse, les traits de son visage se durcissent. Il ne plaisante pas, il est réellement furieux contre moi, pour le simple motif que je suis rentrée avec son pire ennemi au volant. 

La guerre entre Elias Perez et Charles Mikkaelson date de bien avant notre naissance, à Val et moi. Ma mère me mettait fréquemment en garde contre cet homme, soit disant dangereux, et me recommandait de rester loin de sa démone de fille aux cheveux roux.  Mais la nature étant ce qu'elle est, le jour de la rentrée, il y a quelques années, j'ai été comme aspirée vers Valencía Perez, qui, loin d'être une démone, devint ma meilleure amie. 

Depuis, nos parents ont plus ou moins réussis à s'entendre. Mais la mort de Julia, la compagne de Perez, a rebattu les cartes. Mikkaelson et Perez se haïssent comme avant, à présent.
Je ne connais pas les raisons de cette inimitié, mais je refuse que ma relation avec Val en pâtisse. Il n'a pas le droit de me dire ce que je peux faire ou pas. Je ne suis plus une enfant, je sais me protéger moi même.

— Je fais ce que je veux! Et de toute façon, comment je fais pour rentrer sinon? T'es jamais dispo!

— Je suis jamais dispo parce que tu refuses que je le sois! 

— Ah ça va être de ma faute maintenant!

— Parce que c'est de la mienne, peut être?

Le ton monte, jusqu'à devenir comme une bombe sur le point d'exploser. J'ouvre la bouche, prête à la dégoupiller, mais la voix de ma mère nous interromps dans notre dispute. 

— S'il vous plaît! Le repas va bientôt être prêt, la table ne va pas se mettre toute seule!

Je bouscule mon père en rentrant. Il ne bouge pas, mais je vois distinctement ses mâchoires serrées se tendrent encore plus. Si ma mère ne nous avait pas empêchés de nous étriper, il y aurait sûrement eu blessure. Il se trompe sur mon compte. Ce n'est pas Elias Perez qui me fait peur, et lui non plus. 

Ma mère ne mentionne pas la dispute amorçée, me faisant simplement le signe de prendre les couverts et de les installer sur la table. J'obtempère en silence, ruminant contre Charles Mikkaelson, cet idiot qui n'essaie même pas de me laisser respirer. Même le père de Val n'est pas comme ça. D'accord, il est étrange et malsain, mais au moins il la laisse tranquille. 

Éducation mortelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant