~Fifty-six

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-"Je t'ai préparé ta chambre."

Abelforth s'avança vers la table autour de laquelle étaient restés les jeunes arrivants.

-"Et Tony ?" Demanda-t-elle. "Il dort dans ma chambre ?"

-"Je vais dormir sur le canapé." Sourit Anthony mais Abelforth fronça les sourcils.

-"J'ai préparé un matelas dans la chambre d'Ariana, tu ne vas pas dormir dans ce canapé moisis."

Anthony ne dit rien, accepta avec plaisir. Ariana aida à débarrasser, et Anthony alla dans la chambre, semblant leur laisser l'espace dont ils avaient besoin.

-"Qu'as-tu fais, durant cette année ?" Demanda Ariana en nettoyant la table.

Abelforth termina de nettoyer les assiettes qui volaient autour de l'évier.

-"Je me suis occupé d'affaires de Mangemorts." Répondit-il comme si c'était une évidence. "J'ai occupé mes journées."

Il ne dit rien de plus, et elle non plus.

Elle le bouscula sans faire exprès en allant dans la cuisine mais ne dit rien, gênée du silence.

-"Tu as l'air de ne pas avoir perdu ton éducation." Nota l'homme et elle se tourna vers lui qui rangeait les chaises. "Celle que l'on t'a donné."

-"Pourquoi voudrais-tu que je la perde ?"

-"Dans leur monde." Murmura-t-il mais elle l'entendit aussi clairement que s'il l'avait crié dans son oreille.

-"C'est aussi mon monde, désormais." Répondit-elle en s'avançant vers lui. "Cette royauté."

Il ne dit rien, se tourna finalement vers elle pour la fixer, longuement, lentement.

-"Pour moi tu ne seras rien de plus qu'Ariana. Tu ne seras rien d'autre."

Elle eut un sourire.

-"Je sais." Souffla-t-elle. "Je ne t'en demandais pas plus."

Il hocha la tête, satisfait que ce soit clair.

-"Tu devrais aller te mettre en pyjama, il se fait tard." Abelforth regarda son miroir brisé en soupirant. "Tu dois partir tôt, demain."

-"Pourquoi ?" Demanda-t-elle et il la fixa au travers du miroir.

-"Parce que tu appartiens à leur monde, désormais." Finit-il par dire plein d'amertume.

Elle eut un long soupir, posa sa main sur son épaule, fixa son grand dos sans jamais croiser son regard dans le miroir.

-"Ça ne veut pas dire que je n'appartiens plus à celui-là, tu sais. Je partirai en fin de matinée, alors ne sois pas impatient de ne plus me voir."

Il eut un léger sourire et elle partit vers sa chambre. Quelque chose, entre eux, s'était froissé.

Elle ouvrit la porte violemment sans faire attention et fronça les sourcils, fixa Anthony qui troquait ses vêtements contre un haut que lui avait prêté Abelforth.

Il ouvrit les yeux, surpris de la voir.

-"Qu'est-ce que c'est ?" Elle désigna les cicatrices sur son corps et il se racla la gorge avant d'enfiler le long haut.

-"Rien, c'est depuis longtemps."

-"Tu n'avais pas ça, avant." Objecta la jeune femme et il haussa les épaules.

-"Je ne sais pas Ariana, je fais du sport, j'ai du me blesser en courant."

Elle ne dit rien, le toisa un instant, suspicieuse. Mais, éventuellement, finit par refermer la porte pour prendre une robe dans son placard laissé tel qu'elle.

Oui, comment comprendre les signes avant coureur de quelqu'un qui refusait lui-même de leur faire face ?

Elle se changea, la porte du placard la cachant, puis immédiatement s'affala dans son lit, les yeux fixant le plafond.

Tout lui avait manqué. Ses draps jaunis, le lit grinçant, les murs craquelés, l'immensee fissure qui parcourait son plafond et la lumière qui pendait au-dessus d'elle.

L'odeur de renfermé, de bois trempé. L'odeur de liberté. L'odeur de sa maison. L'odeur de son chez-soi.

Anthony s'allongea sur son matelas, juste à côté du lit.

Il posa son regard sur la jeune femme, allongée en étoile, puis soupira éteignit les lumières.

Dans le noir, il entendit Ariana se remuer dans le lit.

Il se releva, fixa la jeune femme et replaça la couverture sur son corps avant qu'elle n'attrape froid. C'était énervant, mais elle arriver à s'endormir en un clin d'oeil alors que lui avait tant de mal.

Il s'allongea de nouveau, sous ses draps, enserra son oreiller contre son corps comme si ça pouvait le rassurer.

L'odeur de moisissure le rassurait, parce que c'était l'odeur avec laquelle elle avait grandi et par conséquent c'était une odeur qu'il appréciait. La maison d'Abelforth n'était pas neuve mais elle avait bien vécu : vécu avec eux, lui, elle, Albus.
Et, éventuellement, peut-être, avec Anthony, depuis leur première année ensemble.

Ca lui rappelait sa propre maison, où il dormait dans une chambre de la même taille avec ses six frères et soeurs.

Oui, ça lui rappelait sa maison. Dieu que sa maison lui manquait, parfois.

Mais Ariana arrivait à le faire supporter ça, parce que c'était aussi sa deuxième maison. Alors il savait qu'il retrouverait toujours son chemin jusque chez lui tant qu'elle restait à ses côtés.

Et, finalement, ses yeux se fermèrent tandis que sa petite voix se tut.

                            *****

Ariana se réveilla d'une longue nuit, plissa les yeux face à la lumière du soleil. Elle se rendit compte qu'elle était sur le côté, qu'elle pouvait voir Anthony dormir à poing fermé. Leurs mains s'étaient retrouvés durant la nuit, il avait levé le bras jusqu'au sien, elle avait baissé le sien jusqu'à sa main et leurs doigts s'étaient enlacés dans un espoir vain de se rassurer.

Il dormait comme un enfant, elle sentit ses yeux s'apaiser en le regardant si paisible. Il n'avait plus cette petite ride entre les deux sourcils qu'il arborait toujours lorsqu'il était réveillé. C'était reposant, de le voir si calme.

Elle joua avec ses doigts qui pendaient dans le vide, pendant à tout autre chose, à une toute autre personne qui dormait sûrement encore, à poing fermé, dans son dortoir, ses cheveux blonds retombant éparses sur son visage.

Elle eut un long et lourd soupir, dans son lit.

Elle ne savait pas si elle devait regretter ce qu'elle avait fait.

Parce que, si elle s'écoutait, égoïste qu'elle était : elle ne regrettait absolument rien.

|| 𝖒𝖊𝖒𝖔𝖗𝖎𝖊𝖘 || [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant