Randonnée absurde

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DRAGO

Quelques semaines plus tard, il était temps de nous rendre à cette foutue randonnée.

Non, je n'en avais pas envie.

Cassiopée, elle, en avait vraiment envie.

Cela ressemble vraiment à notre relation finalement : nous ne sommes jamais sur la même longueur d'onde.

- Tu es prêt ? Je ne veux pas qu'on soit en retard.

Elle passe la porte de mon bureau à 8:26 précisément ce matin là. Ses longs cheveux bruns étaient remontés en une queue de cheval haute, et quelques mèches ondulées entouraient son visage. Ses vêtements étaient tous noirs, un legging et une verte large. J'avais tout de même réussi à la convaincre de ne pas prendre de sac à dos, et que j'allais très bien y arriver. Seules ses baskets étaient colorées.

- Le rouge te va bien, je me moque et elle sourit.

Par Salazar, si j'avais pu photographier son sourire.

- Arrête de travailler, elle lance en faisant un pas vers moi.

- Tu sais, la raison pour laquelle je peux passer une journée avec toi en France est que je travaille beaucoup le reste du temps.

Cassiopée lève les yeux au ciel, se moquant clairement de tout cela.

Cela me fait sourire, et je finalise mon dossier. Il me faut moins d'une minute pour réarranger mon bureau avant de me lever et de la rejoindre dans la pièce à vivre. Elle juge ma tenue pendant de longues secondes et ne s'en cache même pas.

- Dis, est-ce que tu mets cette tenue plus d'une fois par an ?

- Eh ! je lance en ne riant qu'à moitié. On a dit que tu ne te moquais pas de moi. Je suis un homme d'affaire, crapahuter dans la foret pour en ressentir les bienfaits ne fait pas partie de mes tâches habituelles. Ce n'est pas mon genre.

Parce que c'était ton genre à toi, j'ai envie d'ajouter mais je ne le fais pas. A chaque fois que je passe un moment heureux avec Cassiopée, je pense aux six années de moments heureux que nous aurions dû avoir et que nous n'avons pas eu. Quel gâchis. J'ai passé un an à imaginer ma vie avec elle. J'ai passé un an à aimer l'idée de faire toutes ces choses dont elle rêvait, le chien, la maison à la lisière d'une forêt, les pique-niques dans l'herbe et la musique dans toutes les pièces. Et tout à coup, j'ai dû remodeler une nouvelle vie sans elle. Alors ça me pince le cœur à chaque fois.

- Pardon, elle rit, me sortant de mon tourbillon de pensées chaotiques. Tu es très beau comme ça. Allons y maintenant.

Et elle se dirige déjà vers l'ascenseur.

Je vérifie le contenu de mon sac à dos avant de la suivre. Nous rejoignons Stephen en bas, dans le parking, et il nous conduit jusqu'au centre de rééducation. Il n'est même pas neuf heures, et le soleil peine à montrer le bout de son nez.

- Tu n'as pas froid ? je demande.

Elle secoue la tête et se dirige vers l'entrée sans attendre, en s'aidant discrètement de sa cane. Un groupe de 4 personnes attendait déjà et ils se présentent à nous. Un homme d'une quarantaine d'années, Walter, à l'allure fatiguée, accompagné de son époux, Connor, un peu plus jeune et à l'air amical. Une autre femme est présente, Malvina, accompagnée d'une femme plus âgée, sa mère, Caroline.

Nous nous présentons en retour, et entretenons une discussion bateau à propos du temps et de la randonnée. Aucun des patients ne parlent de leur condition, de ce qui les amène à faire cette randonnée.

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