Chapitre 1

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Zoro aimait la nuit. Le silence qui régnait sur le pont du Thousand Sunny était presque assourdissant. Même si deux longues années avaient passées, rien n'avait changé.

Leur Capitaine était toujours aussi bruyant et tapageur, et le navire ressemblait la plupart du temps à un champ de bataille. Mais la nuit, quand tout le monde dormait, tout redevenait calme.

Seuls les grincements et les craquements du bois se faisaient entendre, accompagnés par le bruit des vagues s'écrasant contre la coque.

Ces bruits familiers lui avaient manqués pendant tout ce temps.

Lui qui n'avait pas le pied marin avant de rencontrer Luffy s'était surpris à se retrouver presque chaque nuit de ces deux dernières années sur le rivage de cette île rude et hostile. Il passait des heures à regarder la mer, tentant de se souvenir de la sensation de mouvement, laissant l'odeur marine entrer dans ses narines.

Son esprit errait, se remémorant ces quelques mois passés au sein de cet équipage éclectique et disparate, mais qui était devenu sa famille.

Chaque soir il repensait à ses nakamas, se demandant où ils étaient, s'ils allaient bien...

il s'inquiétait pour chacun d'entre eux, mais l'un d'eux avait occupé une place plus importante que les autres dans ses pensées.

Il avait vécu un dur moment avec Mihawk, toujours sur ses gardes et prêt à se défendre ou à subir un entrainement toujours plus intensif dispensé par son mentor. Il n'arrivait toujours pas à croire sa chance, être entraîné par son but, celui qu'il rêvait de détrôner.

Il avait encore une fois pu voir l'écart entre eux à son arrivée, se rendre compte du chemin qu'il lui restait à accomplir avant d'atteindre son objectif.

Mais il était heureux aussi de voir que ces deux ans d'entrainement avait un peu réduit cette distance.

Du bout des doigts, il effleura la cicatrice qui ornait maintenant son œil gauche.

Un moment d'inattention et cela avait été trop tard.

Même s'il s'estimait heureux que Mihawk se soit retenu, lui évitant de se retrouver avec le crâne ouvert en deux, il avait mis du temps à compenser ce handicap.

Et il n'avait pu s'empêcher de penser que si Chopper avait été là, il aurait encore la possibilité d'utiliser son œil.

En soupirant, il abaissa sa main et la posa sur le bastingage.

Le passé était derrière lui à présent, il était inutile de ressasser tout ça. Une odeur de tabac s'infiltra soudain dans ses narines, se mêlant au sel de la petite brise qui soufflait ce soir-là. Ce parfum aussi lui avait manqué.

Deux ans sans lui avait peut-être été le pire calvaire, même s'il refuserait toujours de l'admettre devant lui.

Quand il l'avait revu ce jour-là, que ses yeux s'étaient posés sur son corps, identique à lui-même et pourtant tellement changé, il avait retrouvé cette flamme qu'il avait cru éteinte, mais qui avait été seulement étouffée, prête à se rallumer à tout instant.

Ils avaient mis du temps à se retrouver mais aujourd'hui, tout était derrière eux.

Deux bras encerclèrent sa taille, et des cheveux fins et doux chatouillèrent son oreille avant qu'un menton ne se pose sur son épaule. Il aimait aussi la nuit pour ça.

Ces moments passés avec lui où ils n'avaient pas à faire semblant de s'insupporter.

Ils n'avaient jamais vraiment décidé de cacher leur relation aux autres, mais ils avaient toujours fait attention de ne rien laisser paraître.

Cela ne le dérangeait pas vraiment, il pouvait ainsi apprécier encore plus ces instants.

Parce qu'ils n'appartenaient qu'à eux et personne d'autre. Le silence continua.

Depuis qu'ils s'étaient retrouvés, il y en avait de plus en plus, des instants comme celui-là.

Aucun des deux ne parlait, se contentant d'être ensemble, serrés l'un contre l'autre.

Le regard braqué à l'horizon, Zoro leva sa main droite et la posa sur celles jointes sur son ventre.

Il sentait les muscles de son torse contre son dos, les battements de son cœur résonnant en lui.

Son corps avait changé. Il était plus musclé, plus puissant.

Pourtant Zoro le trouvait toujours aussi fin. Il avait pris plaisir à le découvrir la première fois où ils s'étaient donné rendez-vous en pleine nuit dans la cuisine du Sunny.

A cet instant-là, Zoro avait cru pleurer, heureux de pouvoir toucher à nouveau ce corps qu'il croyait avoir perdu. Leurs gestes avaient été plus tendres et plus lents qu'avant leur séparation, chacun appréciant ces retrouvailles à leurs justes valeurs. De douces lèvres posées dans son cou le sortirent de sa torpeur.

- Sanji..., ne put-il s'empêcher de murmurer dans un souffle, appréciant les baisers un à un déposés contre sa peau chaude.

- On devrait aller se coucher, Franky ne va pas tarder à débarquer pour prendre son quart.

Cette voix rauque et suave contre son oreille lui déclencha un frisson.

Il se laissa aller contre le corps derrière lui... mais faillit perdre l'équilibre et se retrouver sur les fesses quand celui-ci disparut soudainement, emportant avec lui la chaleur qui l'enveloppait encore quelques secondes auparavant.

- Oï cook ! S'énerva-t-il.

- Un problème marimo ? répondit Sanji d'une voix espiègle, déjà parvenu au milieu du pont. Zoro lui répondit avec un regard noir mais se tut. Il n'était pas d'humeur à se battre ce soir. Et puis ils réveilleraient encore tout l'équipage et il se retrouverait avec une dette allongée à cause de cette sorcière.

- Tu devrais te dépêcher si tu ne veux pas dormir dans ton hamac cette nuit.

La menace atteignit rapidement son cerveau et il s'empressa d'emboiter le pas de son amant, tout en essayant de garder une certaine dignité.

Quand il entra enfin dans la cuisine, Sanji était déjà en train d'installer le futon qu'ils utilisaient chaque fois qu'ils le pouvaient contre le mur du fond. Ils étaient ainsi à moitié cachés par le mat et même si l'espace était assez réduit, cela formait comme un petit cocon autour d'eux.

Et Zoro soupçonnait aussi que Sanji avait choisi cet endroit afin de garder un œil sur son précieux garde-manger et son contenu.

Au début de leur relation, ils avaient dormis sur la banquette, mais son étroitesse les avaient souvent envoyés, l'un d'entre eux ou les deux en même temps, s'écraser au sol, alors lors d'une escale, Sanji avait suggéré qu'ils achètent un futon.

Zoro n'y aurait jamais pensé, mais il fallait bien avouer que cela avait été une très bonne idée de son blond.

- Tu comptes bailler aux corneilles encore longtemps ?

Zoro sursauta et reporta son attention sur Sanji, qui était déjà installé sous la couette. Sans un mot, il enleva alors les vêtements superflus qui le gêneraient dans son sommeil et le rejoignit. Sitôt allongé, il entoura la taille de Sanji de ses bras et le colla contre lui.

Un grognement mécontent répondit à son geste un peu brusque, mais cela n'empêcha pas son amant de s'installer un peu plus confortablement, posant sa tête contre son torse. Alors que Sanji se détendait contre lui et que sa respiration se faisait déjà plus lente, il remonta sa main et caressa distraitement la peau douce de son bras. Un léger soupir répondit à son geste et à son tour les limbes du sommeil commencèrent à l'envahir.

 Avant de perdre conscience pour de bon, il déposa ses lèvres sur le front de Sanji et respira cette odeur mélangée de vanille et d'épices qui se dégageait de ses cheveux. Apaisé et serein, il ne tarda pas à ronfler de manière insouciante.


Apres 2 ansOù les histoires vivent. Découvrez maintenant