Chapitre 1

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 Le store de la chambre laisse passer les lumières de la rue, Ellie se tourne sur le côté une nouvelle fois et aperçoit son réveil indiquant 4:37. Il lui reste un peu moins de deux heures avant d’entendre la sonnerie stridente retentir. Ça fait maintenant trois ans qu’Ellie s’est installée dans ce petit loft donnant sur la Tulane Avenue, une des artères principales de la Nouvelle Orléans. Sa chambre aux tons crème, sa salle de bain peuplée de plantes et sa cuisine envahie de bric à brac représentent tout ce que la jeune pouvait rêver, l’indépendance et la liberté. 

Une fois le lycée terminé, Ellie a quitté sa ville natale Morgan City pour mettre les voiles vers la Nouvelle Orléans. Elle a débuté des études de photographie et ne regrette en aucun cas sa décision. 

Tournant une nouvelle fois la tête vers son réveil indiquant maintenant 5:16 elle décide qu’elle n’arrivera plus à trouver le sommeil et se lève. Première étape, la cuisine, hors de question de commencer la journée aussi tôt avec le ventre vide. Elle prépare sa fameuse recette magique, fromage blanc et cornflakes chocolat. Elle soupire en avalant la première bouchée et s’aperçoit en regardant par la fenêtre que le soleil commence déjà à montrer le bout de son nez, ce qui n’a finalement rien d’étonnant en ce début de mois de septembre, les journées sont encore longues à cette période. Ellie a repris les cours il y a deux semaines à peu près et même si elle adore étudier, les vacances lui paraissent déjà bien loin. Finissant son bol, elle se dirige vers l’évier pour l’empiler sur la vaisselle déjà présente avant de prendre son ordinateur et de s’affaler sur son canapé pour passer en revue les photos qu’elle a réussi à saisir au cours de l'été mais qu’elle n’a pas encore pris le temps de trier. Elle décide de commencer par le fichier principal et tombe sur des clichés capturés pendant ses vacances chez sa mère. 

Evelyn, la mère d’Ellie, habite depuis maintenant plus de 30 ans à Morgan City et Ellie vient lui rendre visite chaque été. Malgré le fait que la jeune femme n’ai jamais voulu rester dans sa ville natale, elle comprend pourquoi sa mère apprécie tant la ville. On aurait pu qualifier ce lieu de "paradis sur terre", plongé au milieu des marais avec des couchers de soleil à couper le souffle et une nature sauvage, resplendissante. Étant une artiste accomplie, Evelyn s’est tout de suite plue dans ce coin de bayou mixant shotguns traditionnelles (maison typique louisianaise) et cyprès chauves (arbres des marais) et a pu peindre des toiles magnifique lui créant ainsi une renommée dans la région. C’est grâce au talent de sa mère, qu’elles ont réussi à survivre et à se prendre en main lorsque le père d’Ellie à décidé que: “ La compagnie se déplace à Londres et je vais devoir partir avec eux, mais ne t’en fais pas Ellie chérie on s’appellera toutes les semaines, en plus ta maman aura plus de temps à consacrer à ses pinceaux sans que je lui traîne dans les pattes”. C’est sans surprise que les appels toutes les semaines se sont rapidement transformés en appels tous les mois pour aboutir aujourd’hui à une carte postale à Noël. Si Ellie, âgée de 11 ans à l’époque, à énormément souffert de cet abandon, sa mère en revanche s’est laissée dominer par la colère. Ellie l’entendait le soir hurler des messages sur la messagerie vocale de son père. Aussi ses tableaux se sont transformés, les paysages de mangroves parsemés de rayons de soleil ont viré aux marécages sombres et dénués de vie. Il leur a fallu un bon moment pour se remettre de ce drame familial. Aujourd’hui Evelyn mène une vie d’artiste épanouie et très confortable en ayant coupé tout échange possible avec son ex mari tandis qu’Ellie s’épanouie dans ses études. La jeune étudiante n’a cependant pas réussi à couper complètement les ponts, une part d’elle-même espère toujours que son père l'appelle à l’improviste ou même lui envoie un simple message et même s’il ne lui répond jamais, Ellie s’obstine à lui envoyer des textos et à l’appeler de temps en temps.

“Salut papa, j’espères que tu vas bien, j’ai validé ma première année ! Ça me ferait vraiment plaisir si on s'appelait… Bisous.” 28/04/2020 - 18H12

Les ombres d'une reine Où les histoires vivent. Découvrez maintenant