Chapitre 4

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Grivia était l'arme parfaite à pointer sur Marièder. Sa réputation n'était pas à faire, ses crimes étaient connus et sa sécurité n'était pas remise en question. Il pouvait s'approcher du capitaine, faire valoir ses arguments et repartir en vie.

Malia grimaça quand, plaçant dans son dos l'épée que lui avaient fournie les Hivernaux, son geste trop brusque fit bouger la pique qui s'enfonçait dans son poignet. Elle souleva le métal de quelques millimètres et aperçut l'Arhinium, la poudre bleue qui pénétrait dans son sang et permettait au dispositif de communiquer son emplacement à Grivia.

—   Comment s'appelle ta femme, déjà ?

Il soupira et lui fit signe de le suivre en répétant :

—   Adrielle.

Adrielle. Adrielle.

Ce n'était pas si compliqué. Ils entrèrent dans l'auberge après un vague geste du gardien qui les conduisit dans une pièce sombre. Il les laissa s'installer autour de la table tandis qu'il allumait quelques lampes à huile, puis ferma la porte en emportant avec lui les bruits du restaurant qui éclataient dans la salle d'à côté.

—   Il y a une issue derrière nous, murmura Grivia en désignant un morceau de mur plus clair que les autres.

Malia se leva et profita de leur solitude pour crocheter la serrure. Elle entrouvrit à peine le battant, passa une main dans l'entrebâillement puis le referma pour donner l'illusion qu'elle n'y avait pas touché.

—   On ne sait jamais, confirma-t-il quand elle se fut rassise.

—   Ça a l'air de mener à l'étage.

L'équipe d'Hivernaux était restée dehors pour rassurer l'homme qu'ils venaient rencontrer. Il leur avait fallu toute la journée pour obtenir cet entretien et c'était la seule chance qu'ils auraient ; mieux valait se trouver légèrement exposés que de risquer l'annulation pure et simple de leur rendez-vous.

La porte s'ouvrit enfin sur un homme de cinquante ans, cheveux parsemés de poussière et des rides creusées le long de ses yeux.

Il ne se présenta pas. Il eut la politesse de les saluer avant de s'asseoir mais il ne dit rien. Il attendait que Grivia se prononce : qu'avait-il à annoncer de si important ? Que faisait devant lui un chasseur hivernal, en plein royaume de Valene, à quelques jours de son départ pour les mers de l'Ouest ?

La réponse était simple, mais Marièder ne la connaîtrait pas : Malia l'avait placé là. Elle avait convaincu Grivia d'utiliser sa réputation pour retourner la peur de Melqart contre lui et pousser l'Errant à partir le plus vite possible.

—   Comment ça, vous voulez mille Rocs ? s'exclama le capitaine en comprenant que Grivia ne comptait pas tout révéler si facilement.

C'était une illusion, il fallait que Grivia parle. Mais la gratuité n'avait jamais fait la fiabilité d'une information, encore moins pour un homme comme l'Hivernal.

—   Mes informations concernent le roi Alédek et sa flotte. Je sais que vous travaillez avec le roi Melqart sur votre expédition, et je pense que ça va vous intéresser. Mais je veux une compensation.

Marièder pencha la tête et jeta un regard à Malia comme s'il cherchait confirmation, infirmation... quelque chose qui puisse lui indiquer si l'offre de Grivia était sérieuse.

—   Nous ne voulons pas vous déranger, capitaine Marièder, dit doucement Malia. Au contraire. Tout ce que nous souhaitons, c'est tirer un bénéfice d'une information de grande valeur.

—   Et vous pensez qu'elle vaut mille Rocs ?

—   Elle en vaut trois milles, répliqua Grivia. Mais elle perd de la valeur à chaque minute qui passe, alors je n'ai pas l'intention de gaspiller notre temps. Un tribut de mille Rocs, rapidement payé, et l'information est à vous. Si j'attends que vous vous décidiez ou que vous trouviez plus d'argent, mon information ne vaudra plus rien.

Les Clés de ValebraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant