L'ombre du corbeau

Chapitre 18

J'ouvre la porte de la salle de bain et Suzy est toujours en train de crier sur Davis à propos de Théo. J'avoue, j'aurais aimé qu'il soit avec moi à mon réveil. Une part de moi me crie que tout ça, c'est sa faute et que si je n'étais pas avec lui, rien de tout ça ne me serait arrivé. Mais une au part de moi me hurle que j'ai choisi de rester avec lui en parfaite connaissance de cause. Et ce pour une raison toute simple : je l'aime. Après tout, c'est Blaise Pascal qui a dit : le cœur à ses raisons que la raison ignore.

Davis : C'était trop d'émotion pour lui, il avait besoin d'air, qu'est-ce que tu veux que je fasse ?

Suzy : Que t'aille le chercher et que tu le ramènes par la peau du cul !

Davis : Comme si c'était facile, je sais pas où il est ! Tu voudrais que je fasse quoi ? Que ratisse toute la ville avec l'espoir de tomber sur lui ?

Suzy : Et pourquoi pas ! Il n'a pas dû aller bien loin !

Davis : Il a pu aller n'importe où, j'ai vu son regard. Celui de quelqu'un qui n'a plus rien à perdre. Je m'inquiète pour lui et toi, tu me hurles dessus. Il est blessé lui aussi, je te rappelle !

J'arrive enfin dans le salon après m'être tenue au mur du couloir qui m'a semblé faire des kilomètres. Je me sens vraiment faiblarde en plus d'avoir mal partout.

Moi : Je pense savoir où il est...

Suzy : Poulette, t'aurais dû m'appeler, je serais venue te chercher...

Moi : Je peux traverser un couloir Suzy.

Bon, je serais plus crédible si j'étais pas obligé de me tenir au dossier du canapé. Suzy s'approche de moi et m'aide à m'asseoir, j'ai l'impression d'être handicapé, mais je ne me rebiffe pas parce que je sais qu'elle s'inquiète vraiment pour moi.

Suzy : On gère le cas Théo après. Bébé, tu peux lui faire une omelette, elle a besoin de reprendre des forces. Juste œufs et fromage s'il y a. Je vais te faire un bon café ma poulette.

Davis ne rechigne pas et me prépare à manger. Je dois avouer que ça me fait un bien fou. Je reprends un peu d'énergie. Tout le temps où je mange, je sens le regard de Davis sur moi.

Davis : Ça va mieux ? Est-ce que... Est-ce que tu rappelles ?

Moi : Oui, de tout...

Je sens les larmes me monter à nouveau aux yeux, mais je les réfrène. Je vois bien que Davis voudrait que j'approfondisse, mais il ne le demande pas non plus. J'apprécie parce que je ne me sens pas encore prête à tout leur raconter.

Moi : Davis, tu veux bien me conduire aux Minnehaha Falls. Je suis certaine que Théo est là-bas. C'est son endroit préféré et c'est le lieu où il va pour réfléchir et se détendre.

Suzy : Poulette, je sais pas si c'est bien prudent. Tu tiens à peine debout. Davis va y aller et il va le ramener.

Moi : Non, je dois lui parler. Moi, il m'écoutera... Te vexe pas Davis.

Davis : Pas de souci, je savais même pas pour les Minnehaha Falls. Il s'est plus confié à toi qu'à personne d'autre. Il a besoin de toi...

Nous quittons tous les trois l'appart de Théo et avant d'aller aux chutes, on fait un passage éclair par chez moi. Les vêtements de mon petit ami sont vraiment trop grands pour moi.

Davis nous attend dans la voiture alors que Suzy monte avec moi, en cas de soucis... Je commence à m'habiller en mettant un jean. Alors que j'attrape un t-shirt dans mon armoire, mon regard tombe sur le trait noir tatoué sous ma clavicule gauche. J'ignore quel motif ils prévoyaient d'encrer sur ma peau avant de me... violer et de me tuer, mais ils m'ont tout de même laissé une trace indélébile. Sur mon corps, mais aussi sur mon esprit, cette nuit sera tatouée à vie dans mes souvenirs traumatisants.