- Quelle poisse... pensais-je.
Je me tenais droite, seule dans un silence de mort devant cette grille immense. Elle grinçait au vent, uniquement retenue par une chaîne aussi large que mon bras et un cadenas si gros qu'il me fallait la force de mes deux mains pour le soulever. Il était lourd, froid.
Aussi froid que ce moment, aussi lourd que l'atmosphère...
Un vrombissement sonore dans mon dos me tira de ma rêverie, mon père déchargeait mes derniers bagages pendant que ma mère redémarrait la voiture.
Mon père soufflait comme un bœuf.
- Bordel, Mona qu'est ce que tu as bien pu mettre là dedans ? Comment tu vas pouvoir transporter tout ça jusqu'à ta chambre ?
Mon cœur se serra.
- Eh bien, je pensais que toi et maman vous pourriez peut-être m'accompagner jusqu'à l'intérieur ? Voir ma chambre, m'aider à m'installer, rester un peu avec moi ?...
Mon père se mit à bégayer, il tripotait sa casquette nerveusement en regardant tout autour de lui, ma mère, elle, détourna franchement le regard.
- S'il vous plaît ...
Mon père secoua la tête, sa grosse moustache s'agitait. Son front perlait de sueur.
- Écoute ma chérie... essaie de comprendre, ta mère et moi avons beaucoup de choses à faire, on aimerait beaucoup rester plus longtemps mais, enfin, tu comprends...
J'ai senti les larmes me monter aux yeux. Je me suis éloignée de la grille et je me suis approché de la voiture. Le moteur feulait comme un chat en colère, ma mère s'impatientait.
En me voyant approcher, mon père eu un mouvement de recul.
- Euh...oui...bon...sois sage ma chérie, ta mère et moi, on t'écrira...euh...souvent.
Et il déguerpit. Il contourna la voiture aussi vite que le lui permettait ses petites jambes et s'assit au côtés de ma mère.
- Démarre, Annie.
Ces mots à peine prononcés, la voiture qui piaffait d'impatience démarra en faisant crisser les graviers, soulevant une haute vague de poussière. Je suis sure que c'est ça qui a fait pleurer mes yeux.
Ce qui est arrivé n'était pas ma faute .
La voiture à fait un demi tour rapide et à repris la direction par laquelle elle était venue. Je n'ai pas vu le visage de ma mère, juste la flamme de sa chevelure qui battait furieusement par la fenêtre ouverte. Je n'ai pas besoin de voir son visage, je connais l'expression qu'il affiche, du dégoût mêlé à de la colère, de la crainte.
Je regarde la voiture familiale s'éloigner à pleine vitesse, cahotant dans les creux de la route.
Toujours plus loin, elle disparaît, je suis seule.
Le silence est pesant. Je me retourne vers la grille. Elle est encore plus angoissante de loin, et si haute. Le soleil couchant semblait mourir de l'autre coté, l'allée d'arbres lugubres étouffe le chemin. La lumière semble avoir du mal à traverser. Glauque.
Je plisse les yeux, le chemin est si long que je n'aperçois même pas le pensionnat.
J'examine le cadenas. Comment suis-je sensée entrer ?
Je plonge la main dans ma poche et en sort une brochure froissée. Mes doigts tremblent sur le papier glacé en essayant de suivre le plan. Aucune autre entrée n'est indiquée.
Personne n'est venu m'accueillir.
Je glousse malgré moi à cette pensée, mes propres parents m'ont laissée seule ici au milieu de nulle part sans même me dire au revoir, comment pouvais-je penser que de parfaits inconnus m'attendaient ?
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Hemlock's Park
RomanceJ'ai été envoyé à Hemlock's Park par mes parents, ils ont peur de moi, ils me haïssent... C'est une école étrange qui accueille les enfants difficiles des différents Peuples de la Nuit, ils vivent tous ensemble et suivent un programme spécial. Entre...