L'ombre du corbeau

Chapitre 36

J'entre dans la cuisine du bar et enfile un tablier. Je commence la préparation de la marinade pour les poulets. Je passe ensuite à la découpe des agrumes pour les cocktails. Sans vraiment le vouloir, mon esprit dérive vers la trappe où j'avais caché Théo et Davis. Le jour où tout a dérapé. Je revois le colombien qui voulait faire grand Mr... ce même type qui projetait avec ses sbires de me violer... Mes doigts ripent et je me coupe.

Moi : Bordel de merde !

Je peste et cours passer ma coupure sous l'eau. Ça va, c'est superficiel, du moins, je pense puisque mon doigt est toujours rattaché à ma main. J'attrape un torchon et le presse sur ma plaie. Je passe les porte battante et attrape la trousse de soin sous le bar. Je désinfecte ma blessure et grimace, ça pique à mort.

Moi : Putain, la prochaine fois, je verse du whisky dessus, ça ne brulerait pas plus !

??? : À qui tu parles ?

Je sursaute et me retourne pour voir mon oncle.

Moi : Tonton, tu m'as fait peur.

Brody : Pardon ma grande, t'es blessée ?

Moi : Je me suis coupé en coupant des citrons.

Brody : Et ben, une semaine et demie sans bosser et t'es plus bonne à rien.

Moi : Ah ah très drôle ! Maintenant qu'il y a une cuisine, ce serait pas mal de mettre une pharmacie là-bas aussi.

Brody : J'en prends note et tu sais très bien que je plaisante. Allez montre-moi.

Délicatement, il prend ma main et inspecte mon doigt.

Brody : Tu saignes pas mal, j'espère que ce n'est pas trop profond. Je vais faire un pansement compressif, mais si le saignement s'arrête pas, il faudra que t'aille voir un médecin.

Il place une compresse sur ma blessure et enroule de la bande autour en serrant super fort. Il fait tellement de tour que mon doigt double de volume. J'attrape ensuite une paire de gant mappa derrière le bar. Tessa, une des serveuses ne supporte pas de laver les verres sans ça. Elle bosse pas ce soir, j'aurai le temps de lui remplacer. Je découpe un des doigts et l'enfile sur le bandage de mon oncle.

Moi : Là, je suis parée, je peux retourner à mes citrons.

Brody : Un coup de main ? Tu m'as vraiment manqué durant ces dix jours.

Moi : Avec plaisir. D'ailleurs t'as pas créé d'autre cocktail en mon absence ?

Brody : J'ai testé un remake du Blue Magellan en mettant un zeste de citron et de la badiane à la place du zeste d'orange et des clous de girofle, mais c'était pas une franche réussite. C'était beaucoup...

Moi : Amer ?

Brody : Oui...

Moi : Je sais pas, tu devrais peut-être essayé de mettre une pincée de sucre vanillé, je suis sûre que là, ce serait à tomber.

Brody : On va voir ça.

Il attrape un verre et le shaker. Il commence sa mixture et goutte avant de me tendre le verre. J'en avale une gorgée et analyse les saveurs.

Moi : Les serveurs anisés de la badiane se marient bien avec le gin, le citron reste en bouche, mais l'acidité et l'amertume sont cassés par le sucre.

Brody : Ouais, tu as raison. J'aurais dû y penser. Promets-moi un truc Mary.

Moi : Quoi ?