.𝟏𝟎.

1.3K 41 38
                                    


Je descends lentement les marches, chacun de mes pas résonne dans le silence pesant de la maison. Noah marche devant moi, droit, tendu, concentré. Je le suis jusqu'au salon sans dire un mot. Une fois dans la pièce, j'aperçois Antonio déjà installé sur le canapé. Je vais m'asseoir à ses côtés, laissant une distance à peine perceptible entre nous.

Noah prend la parole, son ton est sec, militaire. Il détaille les étapes de la mission à venir, les rôles de chacun, les points de contact, les risques. Mais je l'écoute à peine.

Une idée me traverse l'esprit, sourde, insistante. Un coup à jouer. Je tourne légèrement la tête vers Antonio et, sans qu'on ne puisse vraiment le remarquer, je me rapproche lentement de lui. Mon genou frôle le sien. Mon épaule l'effleure.

Un jeu subtil, silencieux, destiné à semer le doute. À perturber. Je sens les mots de Noah s'arrêter une seconde, comme s'il avait perçu ce déplacement furtif. Un silence, une tension. Puis il reprend.

Et moi, je continue de sourire intérieurement.

— Qu'est-ce que tu fais ? murmure-t-il, sans même me regarder.

Il a compris. Il sait ce que je suis en train de faire.

— Joue la comédie, soufflai-je à son oreille, mes yeux toujours rivés sur Noah.

— Si tu cherches à provoquer le chef, c'est moi qui vais crever à cause de tes conneries, rétorque-t-il en me lançant un regard inquiet.

— Avec moi, tu risques rien. C'est moi qui prends les coups, comme la dernière fois avec Matteo, lui rappelai-je dans un souffle.

Sans un mot, je pose doucement ma tête sur l'épaule d'Antonio. Il ne réagit pas, mais je sens son corps se raidir légèrement sous mon poids. Je glisse ensuite mes jambes sur les siennes, comme si la proximité était naturelle, innocente. Pourtant, rien ne l'est. Chaque geste est calculé.

Je lève les yeux. Noah nous observe. Son regard s'attarde une seconde de trop sur notre position, puis un sourire en coin se dessine lentement sur ses lèvres. Il ne dit rien. Il ne bronche même pas. Imperturbable, il continue d'expliquer la mission avec son calme glaçant habituel.

Mais je le connais. Ce sourire, c'est du poison. Un avertissement silencieux. Une promesse qu'il n'oubliera rien.

Les minutes s'étirent, lentes, pesantes. Mon cœur tambourine dans ma poitrine. Pas par peur. Par excitation. Parce que dans ce jeu-là, chaque geste est une arme.

Une éternité.

Et ce n'est que le début.

— Voilà. Vous avez chacun une tâche. Vous pouvez disposer, conclut-il en me lançant un regard appuyé.

Les hommes se lèvent, Antonio y compris.

— Désolé, j'ai pas envie de mourir, lâche-t-il avec un sourire avant de s'éloigner.

Je lui adresse un clin d'œil discret, presque rassurant, puis me redresse avec lenteur, reprenant une posture plus neutre, plus sage. Mais à l'intérieur, c'est un champ de bataille. Un orage silencieux.

Les uns après les autres, les hommes quittent la pièce. Des pas, des murmures, des portes qui se referment. Jusqu'au silence total.

Nous sommes seuls.

Et c'est un problème. Un problème immense.

Parce que quand il ne reste plus que lui et moi, tout devient dangereux. Les mots, les regards, même le silence. Surtout le silence.

Il me fixe. Intensément. Comme s'il cherchait à décortiquer chaque centimètre de ma peau, à y lire des secrets que je ne veux pas livrer. Ses iris noirs m'enveloppent, me brûlent presque. Je frissonne.

𝐈 𝐜𝐚𝐫𝐭𝐞𝐥𝐥𝐢 𝐧𝐞𝐦𝐢𝐜i Où les histoires vivent. Découvrez maintenant