Chapitre 16 - Cauchemar

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--------------Violet--------------


La nuit, je maudissais ma mère d'être rousse.

Cela faisait depuis que j'avais été kidnappée qu'il n'était pas réapparu. Le cauchemar. Mais il était de retour, maintenant. Venant me chercher quand je me croyais à l'abri de ses griffes obscures.

Il commençait toujours de la même manière – du moins, dans mon souvenir. Le noir complet. Sournois, il me faisait croire qu'aucun cauchemar ne venait menacer mon sommeil. Mais d'un seul coup, je me retrouvais devant une silhouette familière.

Celle de ma mère.

Je ne l'avais jamais connue. Je ne l'avais jamais vue, en chair et en os. Pourtant, la nuit, elle venait me hanter. Comme le fantôme d'un rêve irréalisable. Qui se transformait en cauchemar. Car alors que je m'apprêtai à l'effleurer, son sourire disparaissait. Son visage se figeait. Et ses yeux d'un vert étincelant s'éteignaient devant moi.

Comme si ma présence était dangereuse. Fatale.

Elle se desséchait toujours.

Et ce n'était pas le pire. Car après, ses cheveux d'un rouge flamboyant s'enroulaient autour de sa gorge, et se transformaient en vagues de sang. D'un sombre vermillon, le liquide poisseux la recouvrait toute entière, telle une démoniaque martyre, et comme en fusion, il la brûlait. Chair, organes, os... son être tout entier.

Pourtant, rien n'était comparable à la suite. Car quand enfin, la mère que je n'avais jamais eue, était réduite à un tas de cendres sanglantes et rougeoyantes, une bourrasque frigorifique secouait mes propres cheveux. Et dans le frisson qui me prenait, j'entendais une voix.

Qui murmurait, glaciale :

« Tout est à cause de toi »

Et je me réveillais.

Cette fois-ci n'avait pas fait exception. Mais cette fois-ci, le froid était véritable. Car quand je sortis du trouble terrifiant du cauchemar, je me rappelai où j'étais.

- Merde, soupirais-je.

Avec ma main gauche, j'essuyai d'un geste rageur les larmes qui s'échappaient de mes yeux. Rabattant d'un geste maladroit mes draps rêches, je posai mes pieds sur le sol froid tout en frissonnant. Je veillais à ménager mes côtes, qui pulsaient toujours d'une douleur sourde dès que je bougeai. Ainsi, lorsque je me levai, ce fut avec douceur, sans gestes brusques. Mon bras droit, toujours immobilisé par le plâtre, rebondit contre ma poitrine, et je grimaçai en ressentant le léger inconfort de ma blessure. Puis prenant une grande inspiration, je me dirigeai, frissonnante, vers la porte de la chambre austère que j'utilisais. Après en être sortie, je marchai vers la salle de bains pour me rafraîchir le visage. En foulant d'un pas rapide le couloir de pierre, j'observais les alentours d'un nouvel œil sous l'éclairage de la lune. Nous étions arrivés il y a deux jours de cela dans le temple. D'après les informations du tibétain qui nous avait accueilli, il avait été abandonné cinq décennies plus tôt par des moines bouddhistes. Sans doute magnifique avant, les cinquante ans qui avaient passés avaient décoloré les murs. Les dessins n'étaient plus visibles, malgré le dépoussiérage qui avait précédé notre arrivée. Enfin, j'arrivai devant la salle de bains, construite pour nous.

C'était à ces moment-là que Caleb m'impressionnait. Il était capable de faire retaper un temple bouddhiste abandonné, avec cuisine, chambres, toilettes et salle de bains comprises.

Sérieux respect de ma part.

J'ouvris la porte, allumai la lumière qui tremblota, et faillis hurler de peur en voyant quelqu'un à l'intérieur. La personne sursauta violemment, et je mis une main sur mon cœur en voyant Jane. Elle était adossée contre le lavabo, et ses mains serraient son téléphone, contractées.

Leurs NomsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant