Chapitre 4 :

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- j-j -

Sofiane :

La mélodie de la musique de PNL résonne dans mes écouteurs, je marche dans les rues de Nice pour revenir au lycée, comme un débile j'ai oublié mon manuel d'espagnol dans la salle de classe. Et bien sûr, il a fallu que la prof nous colle une évaluation pour le lendemain sur les verbes étudiés la journée même. En marchant, je passe devant un parc et  mes pensées me ramènent à Yasmina. Notre dispute était il y a deux jours - elle m'a aussi giflé - personne ne m'avait jamais giflé comme ça mis à part mes parents. C'est la première fois que je l'ai vu énervée contre moi, j'assume, je ne facilite pas les choses, mais quand même. Elle qui garde toujours son sang-froid, qui est calme et ne montre pas ses émotions. Cette soirée-là j'ai vu une autre facette de sa personnalité : je l'ai vu faible, vulnérable. Elle avait l'air mal et bouleversé quand je l'ai trouvé, et pour la première fois je l'ai vu pleurer. Et si c'était à cause de Luis ? Ça ne m'étonnerait pas et au moins ça lui permet d'ouvrir les yeux sur la situation. Elle est aveuglée par lui, je sais très bien ce qu'il fait aux filles, j'en ai été témoin lors de notre amitié. J'essaie tant bien que mal de l'avertir sur le comportement de son mec, mais elle ne veut rien entendre. Elle ne mérite pas Luis, elle est beaucoup trop bien pour lui. Combien de fois je me suis pris la tête avec elle, elle m'insultait et moi aussi, elle répondait à mes provocations sans même s'énerver et réussissait toujours à avoir le dernier mot sans s'énerver, ce qui avait le don de m'énerver encore plus. Au début, j'avais de la peine pour elle, je ne voulais pas qu'elle comète les mêmes erreurs qu' elle, mais ça ne servait à rien. Yasmina est têtue, bornée et veut toujours avoir le dernier mot. Avec le temps, ce combat que je menais pour tenter de la faire changer d'avis sur son copain est devenu une sorte de guerre froide entre nous. Je lui lance des piques pour lui balancer la vérité en pleine face, et elle me répond en me lançant des javelots qui touchent directement mon égo. Puis je lui réponds, elle fait de même et cette guerre continue à chaque qu'on se voit. Dès qu'on se croise dans les couloirs ou dans ce parc à côté de chez elle, on se balance les nouvelles inspirations que chacun à trouver dans son coin. On dirait deux gamins, immatures, qui ont trop de fiertés pour s'expliquer comme des grands et mettre fin à cette guerre froide qui dure depuis la seconde. Mais j'ai bien trop d'égo pour faire le premier pas et tout arrêter, et j'imagine qu'elle est comme moi. Mais nos conversations m'amusent plus qu'autre chose, elle a une répartie qui me fait sourire, elle ne manque jamais de réponse. Elle répond à mes piques par des javelots, avec un calme et une assurance incroyable, ce qui me fait sourire. Me disputer avec elle me divertit, c'est bien la seule raison qui me pousse à ne pas arrêter cette guerre.
Quelqu'un me bouscule ce qui me fait revenir à la réalité, je tourne la tête pour voir qui est la personne que j'ai bousculée. Les cheveux bruns, coupés en un carré avec une frange répondent très vite à la question, c'est la secrétaire de mon lycée. Elle se promène avec plusieurs dossiers en main, comme à son habitude, elle plisse les yeux sous ses lunettes rondes rouges, avant de me reconnaître.

- Oh excusez-moi... Bah tiens, que fais-tu ici Sofiane ? dit-elle en regardant sa montre. Les cours sont terminés depuis une bonne trentaine de minutes.

À force d'être tous les jours dans son bureau pour patienter le temps que la principale soit disponible, elle finit par me reconnaître parmi tous les élèves de ce lycée. Elle m'apprécie beaucoup, à chaque fois que je viens dans son bureau pour patienter, elle me raconte sa journée et sa vie. Même si je ne suis pas quelqu'un de très bavard, j'aime bien l'écouter et lui poser des questions. Elle est très gentille mais surtout seule, c'est une cinquantenaire qui a perdu son mari il y a peu. J'ai beaucoup d'empathie pour elle, elle est seule et sans enfant, je ne peux m'empêcher de lui parler pour qu'elle se sente moins seule. Et ça marche, puisqu'elle me sourit à chaque fois qu'elle me voit et continue de me parler d'elle.

Éphémère EN PAUSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant