DarkSide

2. Le 100

Musique à écouter en même temps : "Parkside" de Grandson

POV Kaël

Adossé au mur de crépi, je fume ma clope en attendant Roy patiemment.

La rue est silencieuse en ce début de matinée mais quelques passants sont déjà de sortie. J'observe cette grand-mère habitant peu loin du club, une afro-américaine de quarante ans au moins, mon aînée, qui m'adresse un clin d'œil et je lui souris amusé.

- Arrête de me reluquer petit con, je pourrais être ta mère.

J'avale une nouvelle dose de nicotine avant de dodeliner de la tête sans perdre mon rictus. Un véhicule se gare à mes côtés, une Dodge noire et je sais déjà à qui elle appartient avant même que le conducteur claque la porte en sortant. 

Roy relève la tête et s'avance vers moi un sourire énigmatique sur les traits. J'écrase le reste de mon mégot sur le mur du 100, le club de boxe qui m'a vu évoluer, et reporte mon attention sur l'homme, que je n'ai pas vu depuis presque un an maintenant et dont les cheveux noirs ont poussé de dix centimètres au moins. Il se place face à moi et avant de prononcer un mot, m'encercle de ses bras pour une accolade brute mais amicale néanmoins. Nous n'avons jamais fait dans le démonstratif lui et moi mais putain, un an c'est long quand on est loin des gens qui comptent.

- Putain tu as eu le temps de pousser de la fonte en cavale ? Il me questionne en me relâchant.

Un an c'est bien aussi pour prendre du muscle et travailler son corps.

Je lui offre un rictus malin avant de le suivre jusqu'à l'entrée du 100.

- Faut bien s'occuper...

- Te connaissant, il y a eu plein d'autres choses pour t'occuper... je dirai même meufs qui t'ont occupé en un an non ?

Je passe ma langue sur mes lèvres essayant de repositionner un an de souvenirs basé uniquement sur la baise. Ouais... y'en avait des vraiment pas mal au Mexique. Il m'ouvre la porte et j'entre à l'intérieur redécouvrant l'espace comme un vieux souvenir d'enfance.

- Les latinas sont putains de chaudes à ce qu'il parait... Renchérit mon ami tandis que je m'arrête et inspecte le club via une œillade circulaire.

- Elles parlent beaucoup trop comparée aux américaines...

- Ah... Y'a rien de mieux que d'être dans le pays de l'oncle Sam non ? Me questionne-t-il rhétorique avant de poser un bras autour de mes épaules et l'autre qui me tape le torse avant de me relâcher.

- Vous avez changé la couleur des murs ? Je demande en observant le crépis auparavant gris repeint d'une couleur noire anthracite.

- Ouep... plus simple à nettoyer après... Tu sais quoi.

J'opine du chef. Pas con.

J'observe le ring, ses cordes usées mais encore intactes. Je considère les sacs accrochés au plafond via des crochets métalliques qui semblent incassables. J'épie les miroirs entourant presque la totalité de la pièce et découvre mon reflet. Ouais, j'ai pris en masse et je suis prêt à affronter n'importe quel connard souhaitant ma mort à mon retour ici.

- Zéro ! S'exclame presque Roy, à présent en haut de l'escalier menant à mon ancien bureau.

Les quelques adhérents présents se tournent vers lui et suivent la direction de son regard et l'appellation de mon surnom bien connu des lieux. Et je sais pertinemment que Roy l'a fait exprès sur le coup. Ils finissent par me dévisager, pour être sûr que c'est bien moi, pour être certain de mon retour et répandre la nouvelle comme une traînée de poudre.