Chapitre 36

658 46 27
                                    

La semaine avait passé vite. Trop vite. Comme ils ne voulaient pas accepter que la fin de ce qu'ils étaient l'un pour l'autre était là, au seuil de leur porte. Et quand il leur arrivaient d'y penser, que bientôt tout serait terminé, le désir les submergeaient. Comme si unir leurs corps était la solution. Comme si à avoir été aussi proche, ils ne seraient plus jamais éloignés. Ils savaient pertinemment qu'ils se fourvoyaient mais... Ils refusèrent de voir,tout en ayant l'esprit encombré par ça jusqu'au dernier instant. Jusqu'au matin où, comme tous les matin depuis un mois, Merlin descendait faire son tour, donner les directives d'Arthur à Léon et Guenièvre qui assurait la régence et puis en allant voir Gaius, s'informer de l'avancée de la décoction du remède. Mais voilà, aujourd'hui le remède était terminé. Et Arthur devait la prendre avant la nuit.. Avant la pleine lune qui l'avait vu être ensorcelé. Demain, tout serait fini. Et le cœur de Merlin s'effondrait. Il resta un moment dans les jardins ce jour-là. Plus de temps qu'il ne le fallait pour faire un nouveau bouquet et faire en sorte que le roi voit le printemps sans même sortir. Il resta là, les yeux dans le vague, sa marjolaine à la main. Le visage mort. Il tentait de trouver le courage qui lui faudrait pour affronter cette terrible journée. Une souffrance de plus, indélébile. Peut-être celle qui briserait le plus ce qui restait de son cœur malmené. La vie n'avait jamais été tendre avec lui. Le destin. Son destin. C'était lourd à porter. Mais pour Arthur. Pour la prospérité du royaume. Pour Camelot et ses habitants. Pour un idéal de paix et de justice. C'est pour ça qu'il affrontait tous les drames. Tous. Et la seule raison pour laquelle il ne s'était pas déjà enfui avec Arthur pour partir vivre ailleurs. Loin de toutes obligations. Loin de cette foutue destinée. Il expira longuement et pencha sa tête en arrière. Le ciel gris se reflétait dans ses yeux. Il regarda les nuages être ballotté par les vents violents d'altitude alors qu'ici la brise était douce. Il aurait voulu être un dragon au final. Aller si haut où les vents se déchaînent, se laisser broyer les ailes par les courants et chuter jusqu'à retourner à la terre. Définitivement. Il essuya furtivement une larme traîtresse et se releva. Pour Camelot. Et pour son roi.

Cela devait être aujourd'hui. Aujourd'hui il serait débarrassé du maléfice qui le rongeait depuis des semaines. Il pourrait retourner à une vie normale et ne plus rester cloîtrer ici. Pourquoi était-il si triste de ça. Pourquoi avait-il voulu que ce jour n'arrive pas. Il avait l'impression qu'on déchirait son âme en deux. Il porta sa main à sa poitrine, crispant ses doigts sur sa chemise là où son cœur semblait se consumer et il se replia sur lui-même, dans un cri silencieux déchirant. Il avait l'impression de mourir, la douleur était trop vive. Il voulait que ça cesse, par n'importe quel moyen. Il ne voulait pas vivre cette journée, ni aucune de celles qui allaient venir avant très longtemps. Il ne voulait plus, il n'en pouvait plus.

Merlin entra, sans s'annoncer comme d'habitude. Arthur se redressa à la hâte et fit mine de rien. Il fit semblant de ne pas avoir eu envie de mourir à l'instant et il détailla Merlin. Il portait un plateau de douceur, du pain d'épice, du pain perdu, de la confiture qui semblait bien être à la groseille et d'autres choses qui semblaient être tout à fait ce qu'il lui avait avoué vouloir manger le plus. Cette attention le fit sourire et le terrifia. Parce que bientôt il pourrait manger tout ça. Parce que bientôt il n'aurait plus besoin de Merlin pour survivre. Il le vit s'approcher, poser le plateau sur la table de chevet et s'assoir lassement juste à côté de lui. Il regardait tristement une petite fiole qu'il faisait jouer entre ses doigts. Comme Arthur voyait bien que Merlin était dans une sorte de mutisme pensif, il essaya de lui en faire sortir, mais il n'était pas vraiment bon pour tout ce qui était de communiquer. Certes ses envolées lyriques avant les combats étaient pleines d'entrain et de poésie mais la plupart du temps, c'est Merlin qui avait écrit ses discours et pour ceux qui avaient été spontanés, c'était tout de même Merlin dont ils étaient inspirés.

Une saison dans le Stupre[Merthur]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant