La Voie des Anges - Partie Finale (A Supernatural Story)

Chapitre 22

Quand la nuit se termine, que l'aube pointe le bout de son nez, que la rosée du matin est fraîche et les premiers rayons du soleil apparus entre les arbres, toutes les larmes sont sèches et les esprits apaisés. Maeve, dans une belle robe blanche aux fines bretelles, se regarde une dernière fois dans le miroir de sa chambre, de leur nid d'amour, à elle et à Sam. Celui-ci se tient à côté d'elle et il ne pleure plus, lui non plus. Maeve veut s'en aller dans la joie, et c'est ce à quoi elle aura droit. Dans un soupir d'appréhension elle replace son pendentif en or contre sa poitrine ; puis elle se sourit dans la glace : elle est prête. Elle se tourne vers Sam, qui la prend par la main et la mène hors de la chambre.

Maeve descend les marches, une à une, en regardant une dernière fois ce mur de photos, de beaux souvenirs qu'elle gardera près d'elle partout où elle ira. Elle y voit Sam, Dean, Bunny et elle avec en mains les clés de leur maison, de cette maison où elle sent avoir grandi, sourires aux lèvres à l'idée d'avoir un chez-soi ; elle y voit le souvenir de leur premier noël ensemble, avec Bobby au pied du sapin, bouteille de bière à la main et heureux d'avoir des enfants, des fils et une fille, à qui offrir des cadeaux ; elle y voit Dean se baignant dans le lac avec Bunny, et Sam, à côté d'eux, rouspétant à la vue de son vieux livre abîmé par l'eau que Dean lui a lancé dessus pour la faire rire, elle qui prenait la photo ; elle s'y voit, elle, avec son père, bras-dessus bras-dessous au jour du premier anniversaire de leur rencontre. Tous ces souvenirs, qui réchauffent son cœur, lui donnent l'envie et le courage de poursuivre sa route jusque dans l'entrée de la maison. Dans sa main droite, le dernier souvenir dont elle avait besoin : un petit calepin usé par les années, bordé de petites fleurs dessinées au stylo à bille et, dans un coin de page, une douzaine de chiffres au-dessus duquel on peut lire « Numéro de Sam Winchester ». Elle se tourne vers lui, resserre son étreinte, et descend la dernière marche des escaliers de bois.

En bas des escaliers, devant la porte, Dean et Bunny l'attendent. Le golden retriever porte sur son oreille un petit nœud bleu, cadeau de Maeve à leur déménagement dans cette maison. Dean, quant à lui, sourit pour ne pas pleurer même si ses yeux brillants trahissent ses émotions. Maeve sourit, s'accroupit devant Bunny et lui offre ses dernières caresses pleines d'amour. Elle relève la tête vers Dean, qu'elle fait promettre de bien s'occuper de ce chien : désormais, il est son maître. Dean ne la décevra pas, il le lui jure. Et il ne ment pas ; Dean passera les prochaines années à aimer Bunny de toutes les fibres de son âme, à le chérir et à lui offrir la meilleure des vies, jusqu'à la fin. Il partira résoudre chaque affaire avec Bunny allongé sur la banquette arrière et, il ne faudrait pas le cacher, se servira de cette magnifique boule de poile pour draguer plus d'une femme sur la route.

Ensuite, Maeve ouvre la porte. Le soleil, pas encore brûlant, réchauffe juste comme il faut sa peau et fait partir ses frissons. Devant la porte, près du ponton menant au lac, se tient Castiel, un sourire apaisé aux lèvres. Il a quitté son éternel imperméable beige pour une chemise blanche, simple, même pas boutonnée. Lorsque Maeve avance jusqu'à lui et lâche, un court instant, la main de Sam, Castiel ouvre ses bras accueillants pour l'y recueillir. Les yeux fermés, il caresse les cheveux de sa fille avec douceur.

- Je t'attends de l'autre côté, murmure-t-il à son oreille. Je serai là, tout de suite, je te le promets. Et... Maeve ?

Celle-ci se dégage de son étreinte et lève la tête vers son père, le regard curieux. Alors, celui-ci sourit de plus belle.

- Je tiens à ce que tu saches que jamais je n'ai été aussi fier que depuis que je suis ton père.

Maeve se retient, une fois de plus, de pleurer. Elle prend encore une fois Castiel dans ses bras, puis elle le remercie et lui dit qu'elle le reverra très bientôt. Alors, cette fois, elle sait qu'il est temps. Le soleil est presque entièrement levé, et ricoche contre l'eau claire et pure du lac. La jeune femme se tourne donc vers Sam, qui reste fort pour elle et garde, envers et contre tout, ce magnifique sourire sur ce magnifique visage. Et elle se fait, alors une promesse : une fois cette épreuve terminée, elle fera ce qu'elle a à faire sans jamais douter. Mais aussi et surtout, elle attendra, patiemment, l'arrivée de l'amour de sa vie au Paradis. Dans une dernière étreinte, elle fait glisser dans les mains de Sam ce vieux calepin, ce petit artéfact empli de magie car empli de souvenirs, de leurs tous premiers souvenirs à tous les deux. En lui donnant le carnet Maeve murmure, rien que pour lui, l'amour de sa vie, des mots qui résonneront jusqu'à la fin des temps dans la mémoire de Sam. Des mots intimes, forts et juste, qui permettront à l'homme qu'elle a aimé de lui survivre car il les gardera avec lui jusqu'à la fin des temps.

Et, enfin, après leur tout dernier baiser sur cette Terre, Maeve se recule et lui fait un clin d'œil.

- Pense à moi, Sam Winchester.

- Jusqu'à la fin des temps.

Cette fois, il est temps. Tout le monde en a conscience. Derrière Maeve, tous se tiennent prêts, prêts à rester à ses côtés jusqu'à la toute dernière seconde. Dans un dernier mouvement, elle les regarde tous une dernière fois : Bunny et son nœud bleu, Dean et sa veste en cuir, Castiel et son sourire. Sam. Elle hoche la tête et se permet une petite, une dernière, larme en signe d'adieu. Puis, elle termine son chemin et se tient debout au bout du ponton. Maeve enlève ses chaussures, ses chaussettes, et l'élastique qui retenait en chignon ses longues boucles rousses comme le feu ardent qui a rythmé sa vie. Elle se glisse ensuite dans l'eau, pas après pas. À l'intérieur de la maison toutes fenêtres ouvertes, un vinyle des Oh Hellos chante à Maeve à quel point la fin peut être belle. Maintenant, elle peut sentir l'eau sur son corps allongé, seul son visage encore à l'extérieur du lac. Elle regarde le soleil qui lui brûle les yeux, et alors, elle sait qu'il est temps de les fermer. A l'eau du lac se mêlent les dernières larmes qu'elle donne à ce monde. Et alors, à la pensée de tout ce qui a rythmé sa vie, de tous les gens qu'elle a aimés, de tous les gens qu'elle va sauver, elle sourit. Elle sourit, car elle sait.

Il n'existe pas de plus belle façon de mourir.