Je suis une femme

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Je suis une femme.
J'ai compris ce que ça voulait réellement dire au fil du temps.
J'ai alors décidé de vous en décrire une vague réalité en vous comptant le chemin d'une jeune femme née il y a 18 ans déjà.

Je rentre à l'école, j'ai 3 ans.
J'aimais grimper aux arbres et mes jeans avaient presque tous des trous à force de jouer sur les genoux. J'adorais les voiturettes et le foot. On me disait déjà à cette époque que je ne rentrais pas dans les codes ; que j'étais un vrai garçon manqué !

Moi, je pensais simplement être une fille mais selon eux je n'en avais pas le profil. Les autres, les vrais, aimaient le rose, jouaient à la poupée et portaient des jupes. J'ai d'ailleurs été surprise quand j'ai vu les garçons les soulever en toute impunité ou encore quand j'ai réalisé que leurs jeux étaient considérés comme des débilités auxquelles aucun garçon ne pouvait participer sans se moquer. J'ai alors compris que pour elles n'ont plus ça ne sera pas facile quand dès l'enfance on est rabaissée, écartée, déshabillée sans que personne ne sourcille.

Je rentre au collège j'ai 11 ans.
Hâte de voir à quoi ressemble la vie de grande ! Mais je serais très vite déçue lorsque pour mon premier trajet de bus, en sortant, un homme de 35 ans me sifflera dans la rue parce que ma tenue était trop courte, trop aguicheuse pour une jeune fille sortant de CM2.

En classe, 0n me reprochera d'être trop présente, de trop parler, de vouloir diriger, quand pour les mêmes raisons, mon voisin d'à côté sera félicité.

On me dira : soit discrète et sage ; ne soit pas trop prude ni trop pute ; les garçons aiment si, n'aiment pas ça ; mais se soucie-t-on de ce que j'aime moi ?

D'un regard lointain, j'observe ces filles se faire traiter de catin parce qu'elles se sentaient prêtes mais trop jeunes pour que la société l'accepte et d'autres pleurer sur les bancs, victimes de harcèlement, de fausses rumeurs écrites sur les murs des toilettes, pendant que les garçons dans la cour eux se vantent de leurs dernières conquêtes.

Je pense aussi à ces heures passées devant le miroir à observer notre corps changé avec la puberté, obsédée par ceux considérés comme parfaits qu'on voit à la télé. Des adolescentes sans poils, sans vergetures, sans acnés ni taches, sans rondeurs ni bourrelets... Ces diktats qui ont beaucoup fait complexer, vomir ou arrêter de manger pour atteindre cette extrême beauté que nous vend la société.

J'entre au lycée j'ai 15 ans.
On me parle d'orientation.
On me dit que la politique est un monde d'hommes. Quand tant que femme, je n'ai pas les épaules pour et qu'à la moindre erreur je serai détruite.
On dit à mes copines qu'elles devraient plutôt faire secrétaire que de s'engager dans l'armée ; que femmes au foyer n'est pas un métier ; que pour de longues études comme médecine, il valait mieux se trouver un mari capable de subvenir à nos besoins, afin d'éviter d'être un poids financier inutile pour ses parents.

Dans le monde dans lequel on vit, si je décidais d'avorter je serai qualifiée de monstre, de meurtrière. Mais si je choisissais d'être maman, à mon âge, je serai quand même jugée. Les gens considèreraient cela comme de l'immaturité. Un enfant ne peut pas s'occuper d'un autre, diront-ils.

J'ai bien compris qu'en tant que femme ma parole ne serait pas toujours entendue. Que mes choix seraient en permanence discutés et qu'il y aurait un million d'obstacles sur mon chemin. J'y suis préparée et malgré tout je ne cesserai jamais de me battre pour faire valoir mes droits.

Je suis une femme, féministe et j'en suis fière.

Être une Femme [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant