Gasparini : Cailee & Alexander (Tome 1)

Chapitre 5 : Appréhension

Cailee

Ce que je trouve amusant dans la vie, c'est quand on veut quelque chose, on ne l'obtient jamais. Par contre quand on fuit quelque chose, elle parvient par tous les moyens d'entrer dans notre vie. C'est ce que je ressens avec Tchad. Ces derniers jours ont été un vrai soulagement car j'ai fini par me passer de son visage mais maintenant qu'il est là, une partie de moi a ressenti une sorte de manque. Il était mon premier baiser, mon premier rencard, mes premiers papillons dans le ventre. Je mentirais si je disais que mettre un terme à notre relation était une grosse erreur. Malgré tous les bons moments qu'on a pus avoir ensemble, je fais le choix de rompre avec cet aspect de ma vie. Qu'est-ce que je veux dire par là ? La fille que j'étais était amoureuse de Tchad. Mais la femme que je veux devenir veut quelque chose de plus intense.

Je lis le texto de Tchad pour la énième fois aujourd'hui.

"Je ne suis pas sûr de savoir ce que tu attends de moi mais si tu me donnes l'occasion de le savoir, je te jure que je ne te décevrai pas."

Le pauvre. J'ai beau lui expliqué qu'il est temps de tourner la page, j'ai l'impression qu'il l'entend d'une oreille pour faire ressortir d'une autre. J'ai plusieurs fois cherché la meilleure phrase de lui faire comprendre une bonne fois pour toute, mais je me dis que le meilleur message est le silence. Sur ce, je bloque son numéro avant de jeter mon téléphone sur mon lit. Je fais les cents pas dans ma chambre. Je ne remets pas en cause ma décision mais je me demande pourquoi je me sens si mal en ce moment. Il ne me manque pas. Cependant il m'a ressentir ce besoin. Le besoin d'être aimée. J'ai désespérément envie de quelque chose de plus grand que moi. Quelque chose qui peut éventuellement échapper à mon contrôler. Parce que je ne veux plus rien contrôler. Quelque chose comme Alexander.

Mes pensées sont coupées courts par Broghan qui entre dans ma chambre.

_ Alors comme ça tu viens à la fête ce soir, il dit en s'asseyant sur mon lit.

Je le rejoins.

_ Rectification : j'accompagne Vicky.

Je n'arrive toujours pas à croire qu'elle ait réussi à me convaincre. Ou peut-être qu'une partie de moi a envie d'y aller aussi.

_ Comment elle t'a convaincu ?

Je pousse un soupir d'exaspération mais je ne peux pas réprimer le sourire sur mes lèvres.

_ Elle m'a sorti la  carte de la petite sœur qui prend sa grande sœur pour modèle et je ne sais plus trop mais en bref, elle m'a convaincu. Je suis étonnée qu'elle y soit arrivé mais elle a réussi.

_ Quelque chose me dit que t'en as besoin, aussi.

_ De venir à la soirée ?

Il hoche la tête.

_ Peut-être bien. Je crois que j'ai besoin de voir du monde pour oublier toutes ces histoires avec Tchad.

Je sens Broghan se tendre instantanément. Il ne l'a jamais aimé. Du moins, il trouvait qu'il n'était pas assez bien pour moi. Mais qui l'est ?

_ Tu veux me raconter ce qui s'est passé ?

_ Disons qu'il a voulu qu'on passe à une vitesse supérieure dans notre relation, je dis en regardant ailleurs pour ne pas subir le regard interrogateur de mon frère.

_ Il a essayé de te demander en mariage ?

J'éclate de rire. Mais n'importe quoi. Un vrai numéro celui-là.

_ Bien-sûr que non ! Il a voulu aller plus loin mais je n'étais pas prête. S'il-te-plait, ne m'oblige pas à te faire un dessin, c'est déjà assez bizarre de te parler de ça.

La part de mensonge dans cette phrase m'écorche la gorge. La vérité n'est pas que j'étais pas prête. Le truc c'est que je ne voulais pas  le faire avec lui. Et dieu sait que j'avais envie de ressentir les plaisirs de la chair depuis longtemps. Mais Tchad ne m'inspirait aucun désir, aucune alchimie.

_ Est-ce qu'il t'a forcé à faire quelque chose que tu ne voulais pas ? Il demande calmement mais je sens qu'il bouillonne au fond de lui.

_ Non ! Non, il n'a jamais dépassé les bornes. Bon est-ce qu'on peut arrêter d'en parler ? J'ai plus envie de penser à lui.

_ Si jamais il te harcèle encore, dis le moi ou à Nikolaus ou à Marcus. Ne subis pas ça toute seule dans ton coin. C'est à ça que servent les grands frères !

_ Promis.

Il se lève et marche en direction de la porte.

_ On part à vingt-et-une heure ce soir, il lance.

_ Je croyais que la fête commençait à vingt heure ?

_ Une fête qui commence à vingt heure ne commence pas vraiment à vingt heure, Cailee.

Eh bien, je crois que je vais en apprendre des choses durant cette fête. Je fais mine de comprendre ce qu'il vient de dire. Je suis surprise qu'il prenne aussi bien le fait que Vicky et moi viennent à la soirée. D'ailleurs, personne n'a posé objection depuis la journée shopping. Même papa m'a souhaité une bonne soirée. Bizarre cette situation.

Je suis assez stressée à l'idée de voir Alexander. Je l'ai évité toute la semaine depuis ce que j'ai osé faire au magasin de robe. A vrai dire, j'aurais aimé carrément prendre son visage entre mes petites mains pour l'embrasser à pleine bouche mais je ne suis pas aussi folle. Et même si je l'avais été, je n'aurai pas su comme faire. Avec Tchad, on a jamais utilisé la langue quand on s'embrassait. Et puis pourquoi je pense à ça d'abord ?! Je ne vais pas embrasser Alexander ce soir. Ni jamais.

_ Qu'est-ce que tu me fais, X' ?

J'observe par dessus ma fenêtre les allés et venues de mes frères et bien-sûr d'Alexander. Ils sont en train de charger la jeep bleue de fût de bière et de toutes sortes de chose qui serviront pour ce soir. Tous mes sens m'indiquent que cette soirée promet d'être terrifiant. Peut-être est-ce une bonne chose...ou plutôt le contraire. Je ressens une sorte de boule au ventre à l'idée de voir Alexander. Malgré qu'une partie de mes pensées va encore chez Tchad, la majeure partie est occupée par ce beau suédois. L'irrésistible assurance qui émane de son corps terrasse mes inhibitions les plus profondes et je me surprends à dériver mes pensées plus loin. Plus salace. 

Je crois entrer dans une nouvelle étape de ma vie. Celle où je ne m'intéresse plus seulement au cœur. Je m'intéresse aussi au corps.