CHAPITRE QUARANTE-TROIS

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 La neige vient de se remettre à tomber derrière ma fenêtre et mes paupières sont encore à demi-closes quand ma mère frappe à la porte de ma chambre. Elle entre sans bruit alors que je m'enroule chaudement dans ma couette comme j'aime le faire quand il fait froid dehors. Je n'ai pas envie de me réveiller, je n'ai pas envie de me lever. Je voudrais dormir pendant tout l'hiver et me réveiller au printemps.

-Emery, ma chérie, chuchote ma mère d'une voix douce en approchant du lit.

Je lui réponds en grognant comme une adolescente qu'on serait venu réveiller trop tôt un jour de grasse matinée. J'ai encore mal dormi et je me sens presque aussi fatiguée que quand je me suis allongée dans mon lit hier soir.

-Il faut se réveiller, ma puce.

-Pourquoi ? ronchonne-je, le visage caché contre mon oreiller. Il n'y a pas de séance de chimio aujourd'hui.

-Je sais mais il faut quand même que tu te lèves.

Je soupire pendant qu'elle s'assoit près de moi et pose sa main sur la bosse que forme mon corps sous la couette.

-Maintenant ?

-Oui, maintenant.

Je jette un œil par dessus la couette qui camoufle la moitié de mon visage et je m'aperçois qu'elle sourit. Ce n'est pourtant pas encore le matin de Noël. On a encore deux jours devant nous pour préparer la dinde et sortir nos cadeaux.

-Je peux savoir pourquoi c'est si urgent ? lui demande-je, suspicieuse.

-Il y a une surprise pour toi dans le salon.

Oh, oh.

Je me renfonce aussitôt dans mon matelas.

-Je déteste les surprises.

-Mais celle-là tu vas l'adorer, crois-moi. C'est une énorme surprise.

-Je déteste encore plus les énormes surprises.

-Oh, ça suffit, petite trouillarde. Arrête de faire l'enfant et lève-toi.

Ma mère a beau être malade, elle n'a pas perdu de cette force dont elle se sert pour tirer la couette jusqu'à mes genoux et m'attraper par le bras pour me faire sortir du lit. Je la laisse faire en me conduisant comme une ado, râlant et traînant des pieds. Je n'ai visiblement pas le temps d'enfiler autre chose que mon pyjama puisqu'elle me tire déjà hors de la chambre.

-Je n'ai même pas mis mes chaussons, grogne-je tandis qu'elle me traîne derrière elle.

-Tu as tes chaussettes au pied, c'est suffisant. Ne t'inquiète pas, tu ne vas pas attraper froid.

-Cette surprise a intérêt à être encore meilleure qu'une grasse matinée sinon je retourne me coucher.

-Fais-moi confiance. Tu vas adorer.

Elle trépigne tellement d'impatience qu'elle marche bien plus vite que moi. Nous traversons le couloir menant au coeur de la maison. Maman est devant moi mais je sais qu'elle sourit de toutes ses dents. Cette soudaine poussée de joie m'inquiète plus qu'elle ne m'intrigue. Avec elle, je ne sais jamais à quoi m'attendre. Elle est si imprévisible.

-Je crois qu'il va nous falloir une dinde plus grosse, me dit-elle alors que nous arrivons dans le salon.

Le premier élément qui me frappe est assis dans le grand sofa, portant un sweat-shirt à l'effigie du MIT. Je dois me frotter les yeux pour être sûre que c'est bien lui qui est assis là. Je le croyais à Boston en train d'étudier ou de préparer les fêtes avec sa petite amie et pourtant c'est bien mon petit frère qui se tient là à seulement quelques mètres de moi.

THE WAY - LE DILEMMEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant