L'académie des kaijins

Chapitre 6

« Quand on s'est habitué à souffrir, le bonheur aussi réel soit-il nous paraît éphémère »

Lisa

-- Ça te dirai une partie de volet ?

Je regarde la gorgone sans répondre. Il se balance sur la chaise de bureau d'Emilie. Ses ongles un peu trop long à mon goût claquent frénétiquement contre la table et ce bruit est dégueulasse.

Aujourd'hui, c'est une journée assez spéciale. J'ai cru comprendre que tous les mardis après les cours les élèves pouvaient s'adonner à toute sorte d'activité. Pour certains c'est le sport, d'autres la lecture, pour d'autres encore ce sont les échecs... Ça doit bien faire une dizaine de minutes qu'Élie m'énumère le nombre d'activités auquel je pourrais prendre part sans parvenir à me convaincre. Je déteste les gens il devrait comprendre ça.

-- Bon, dit-il après un long moment de silence. Si rien ne t'intéresse tu pourrais venir me voir jouer tout à l'heure.

-- J'ai le choix ?

-- Bien sûr

-- Alors ne compte pas sur moi

Il soupire longuement puis se lève d'un bond.

-- Finalement je rigolais, tu n'as pas le choix. Soit tu viens, soit je reste tout l'après-midi ici avec toi pour te faire un cours détaillé sur les reptiles. Quand je commence Dieu sait que je suis inarrêtable.

Quelle enflure.

-- Ma réponse reste non !

-- Tu l'auras voulu.

Il rapproche sa chaise de mon matelas pour se planter en face de moi. Son éternel sourire agaçant aux lèvres il se racle la gorge avant de débiter :

-- Commençons par un spécimen que j'affectionne particulièrement. Bitis gabonica, plus connu sous le nom de Vipère du Gabon. C'est une espèce de serpents de la famille des Viperidae. Ce serpent venimeux est issu des forêts tropicales Sub-saharienne. Il peut mesurer jusqu'à...

-- C'est bon !le coupé-je ardemment. Je viens mais pitié ferme là

Il sourit victorieusement et se levant, marche nonchalamment vers la sortie.

-- Au lac dans quinze minutes. Ne sois pas en retard.

Je lui montre mon joli majeur et il explose d'un rire franc avant de disparaître dans les couloirs. Enfoiré de serpent.

Un quart d'heure plus tard la porte s'ouvre sur une Émilie au joue rosie par l'effort et au cheveux collant sur son visage transpirant. La course de relais ce n'est pas de tout repos à ce que je vois. Elle me lance un « salut » entre deux souffles saccadés avant d'attraper une bouteille de Lipton dans le mini frigo.

-- Élie m'a dit qu'on allait assister à son match, m'informe t'elle

-- Ah ouais j'avais oublié

*Mais bien sûr*

Parles quand on t'en donne la permission toi !

- Du coup on y va ? Ça ne va pas tarder à commencer

Je fixe un point vide sans répondre. Je fais tout le temps ça quand j'ai la flemme d'aller quelque part ou de faire quelque chose et je peux rester comme ça durant des heures.

-- Eh oh ? Lisa ?

-- Ah euh oui allons-y

Nous longeons les couloirs vides dans un silence assourdissant. Dehors le soleil est au zénith. Il dégage une odeur de sérénités, un calme presque perturbant pour moi. J'inspire un grand coup alors que les rayons de lumière caresse doucement ma peau pâles.