Inspirer, expirer

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La journée du mardi se déroule tranquillement. Hier soir j'ai reçu un mail de Patrick. Il m'informe qu'il faudrait que je sois en arrêt maladie et qu'il ne veut plus me voir tant que mon visage n'aura pas retrouvé une couleur normal. Ce message est un soulagement, ça faisait longtemps que je n'avais pas pris un peu de temps pour moi. Ce matin j'en profite donc pour faire une de mes premières grâces matinées de l'année alors que nous sommes déjà fin novembre. Seul dans mon lit, le regard rivé sur le plafond de ma chambre, je ris jaune en pensant qu'il faut se faire tabasser pour gagner des jours de congés. Dans son mail, Patrick ne me souhaite pas un bon rétablissement. Tant mieux. Je préfère encore son indifférence à sa pitié.

A midi, je me lève enfin de mon lit et je me transforme en mollusque. Avec un bol de pâtes et une série Netflix, je reste toute la journée sur mon canapé. Si j'avais été la meilleure version de moi même j'aurai été courir ou j'aurai tenté de faire quelque chose d'utile de mes dix doigts, mais je ne suis que moi. Vers 23 h, fatigué de n'avoir rien fait, je m'endors paisiblement.

Le lendemains matin il est 10h30 quand je me réveille. Deux grasses mat en deux jours, c'est déjà Noël ou quoi ? Je tourne et retourne dans mon lit. J'allume mon téléphone pour la neuvième fois et je suis affligé de constater que depuis la dernière fois il ne s'est écoulé qu'une seule petite minute. En ce mercredi matin je me déclare officiellement en déprime. La raison de ce coup de mou ? C'est simple, il n'y en a pas. J'ai le cafard, point. En règle générale rester chez moi ne me dérange pas, au contraire, mais aujourd'hui, dans l'état émotionnel où je me trouve, voir une ou deux personnes ne m'aurait pas fait de mal.

J'allume une nouvelle fois mon téléphone, il est 11h04. Je me lève pour me laisser tomber quelques mètres plus loin sur mon canapé. Les minutes s'écoulent avec une lenteur épouvantable. J'aimerai avoir envie de faire quelque chose pour passer le temps, mais je n'ai envie de rien. Je pourrais allumer la télé, je ne le fais pas. Je pourrais me perdre sur Instagram, mais je ne le fais pas non plus. Je reste là, prostré en espérant que je ne sais quoi tombe du ciel et me redonne instantanément le moral.

A midi je commence à avoir faim. Je n'ai pas pris de petit déjeuner en me levant. Mais me lever pour prendre quelque chose à manger me demanderai un effort trop important. Je n'ai qu'une envie, que les heurs s'écoulent comme des secondes et qu'il soit déjà l'heure d'aller chercher Clément. Et pourtant, à chaque minute qui passe je me dis que c'est une minute de ma vie foutu en l'air.

Au bout d'un moment, je crois que je finis par me rendormir. C'est un sommeil sans rêve, sans fatigue, comme si cet état semi-comateux était le seul moyen que mon cerveau avait trouvé pour passer le temps.

C'est une notification sur mon téléphone qui me réveille. Porté par je ne sais qu'elles espérances, je reprends momentanément du poil de la bête en m'imaginant que ce message signe la fin de ma torpeur. La chute n'en est que plus grande quand je lis un message me prévenant qu'il me reste 15% de batterie. Mécaniquement, presque comme un zombie je branche mon portable et décide de m'habiller. Dans ces moment que j'appellerai des moments de vide, tout me semble insipide. Le problème c'est que je n'ai pas encore trouvé le moyen sortir de ces phases par moi même. Il n'y a qu'une personne extérieure qui peut m'aider et aujourd'hui j'espère que ce sera Clément.

Au hasard je choisi un jean et un pull puis j'enfile ma veste. Je passe au moins dix minutes à essayer de lacer mes vielles Dr. Martens. C'est un échec, j'ai la tête dans les chaussettes. Je finis par rentrer maladroitement les lacets dans la chaussure en espérant ne pas me péter la gueule en marchant. Je débranche mon téléphone, j'attrape mon casque et mes clefs, et je grimpe sur mon scooter. Rouler me fait du bien. L'aire froid chasse quelques unes de mes idées noires. Je ne roule pas très vite. Je ne suis pas encore assez réveillé pour ça. Mais je profite à fond de cette sortie. Comme me disait mon psy, « la vie est faite de petits plaisirs qu'il ne faut pas hésiter à savourer ». Je crois que c'est la seule chose que j'ai retenue de nos entrevues et avec laquelle j'étais d'accord.

Thomas & Camille - Seuls contre nous-mêmes Où les histoires vivent. Découvrez maintenant