Deux enfants semblent mener une existence plus au moins ordinaire. L'un vit en région parisienne, l'autre à l'île de la Réunion. Il s'appelle Émile, il a 8 ans, elle s'appelle Mélodie et elle a le même âge. L'un est issu d'une famille modeste et l'a...
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Douze coups venaient tout juste de retentir dans le petit village de Bois de Nèfles, il était pile midi, et déjà on pouvait sentir le soleil surchauffer l'atmosphère tropicale.
Nous étions en mai, et dans ce calme petit village réunionnais – village rural loin de la ville et de l'agitation qui culminait à quatre-cent-trente mètres d'altitude des côtes – il y avait parmi plusieurs maisons et cases créoles, une belle et grande maison en bois bordée d'un petit sentier. C'était une des plus belles maisons dans le quartier, une demeure au toit et aux volets bleus. La grande cour qui l'entourait était elle-même encerclée par un massif mur en moellons, qui lui-même supportait une longue clôture en fer forgé.
Le jardin, lui, était enrichi d'un verger dans lequel quelques orangers et citronniers y étaient plantés. Mais les arbres fruitiers n'étaient pas les seuls à occuper la cour de cette habitation : buissons, rosiers, bougainvilliers et d'innombrables fleurs exotiques embellissaient le lieu. À proximité de cette grande villa, deux bambins étaient en train de jouer gaiement au ballon sur la pelouse de ce même jardin. Il y avait un petit garçon et une petite fille. Le garçonnet était petit et bien en chair, sa peau était basanée avec des cheveux crépus et de beaux yeux noirs, tandis que la fillette, plus mince que lui, mais en revanche un peu plus grande que lui par la taille, avait un très joli visage encadré par des cheveux frisés et paré lui aussi de beaux yeux noirs. Ils s'appelaient Théodore et Hélène et ils étaient tous deux frère et sœur. Lui avait neuf ans, et elle en avait dix. Comme c'était un mercredi il n'y avait pas d'école ce jour-là.
Cependant, non loin d'eux, plus précisément dans une chambre qui donnait sur cette même cour, l'ambiance paraissait beaucoup plus calme, beaucoup plus silencieuse aussi : Embusquée derrière des petits rideaux à fleurs roses et allongée de tout son long sur un petit lit, une autre fillette était là, mais, contrairement à Théodore et Hélène, elle semblait bien studieuse : elle se trouvait comme contemplative et complètement absorbée par un livre qu'elle était en train de lire. Cette enfant paraissait plus jeune que les deux autres. C'était leur sœur cadette, elle s'appelait Mélodie et elle avait huit ans. Elle aussi était bien brune, mais, contrairement à ses aînés, elle avait de longs cheveux noirs bouclés, tandis que ses grands yeux qui étaient d'un vert émeraude, scintillaient derrière de grosses lunettes rondes aux bordures noires. Néanmoins, elle était la plus boulotte des trois bambins. Elle était vêtue d'une jolie robe à carreaux roses sans manche, tandis que ses cheveux portaient des couettes.
La gamine était en train de dévorer des yeux un livre avec une passion sans égal... mais de quel livre pouvait-il donc s'agir pour que la petite y attachait tant d'intérêt ? Il s'agissait d'une bande dessinée, et cette bande dessinée n'était pas n'importe laquelle : il s'agissait des aventures de Tintin et Milou.
Tandis que dans un mutisme profond elle parcourait les images, les dessins et les écritures de ses jolis yeux rêveurs, on pouvait voir de temps à autre ses sourcils se froncer de stupeur, d'épouvante, et même voire assez souvent des petites mimiques rigolotes plisser ses joues rondes et gracieuses. Mélodie souriait avec ses personnages, se stupéfiait avec eux, s'épouvantait avec eux, plus particulièrement avec le personnage principal, entre autres Tintin.
