Faux-semblants

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PDV Magnus

Je vérifiai l'heure sur ma montre tout en étouffant un baillant, il était déjà 3h30 du matin.

Allongé en salle de repos des urgences pédiatrique, j'essayais de profiter d'une période d'accalmie afin de me reposer un peu. Ma garde avait démarré en force avec deux urgences chirurgicales de nouveaux-nés...j'étais épuisé.

L'angoisse était toujours présente quand je participais à une opération. Certes, la plus grosse pression reposait sur les épaules du chirurgien en chef qui menait l'intervention, cependant, je me sentais tout autant responsable que lui de la vie de ces petits anges. Sans parler de la charge émotionnelle des parents à gérer qui avaient, à juste titre, d'énormes attentes vis-à-vis du corps médical. Ce n'était jamais des situations évidentes, il y avait la peur, l'angoisse, l'incertitude, parfois la colère et la culpabilité. Tout ce maelstrom d'émotion rendait notre métier très difficile en plus des difficultés techniques qui lui incombaient déjà.

Je soupirai longuement en rêvassant d'un bon bain chaud...un bain chaud accompagné de mon homme me massant les épaules en prime serait le paradis à cette heure avancée de la nuit.

Nous avions signé l'acte d'achat de notre maison il y a dix jours, c'était un accomplissement de plus dans notre vie de couple avec Alec. Après neuf ans de mariage, nous étions devenus propriétaires avant nos 30 ans, un objectif de plus avait été atteint et nous en étions très fiers.

Cet évènement aurait été parfait s'il n'avait pas été entaché par l'appel que j'avais dû passer à Rafaël pour l'informer de la décision d'Aria. Cette dernière ne souhaitant pas perdre une seconde de plus, m'avait littéralement harcelé pendant des jours afin que j'organise une rencontre avec sa mère au plus tôt. Camille et Rafaël vivant désormais dans leur ville natale en Italie, et nous, étant occupés avec le déménagement et l'arrivée de Côme, nous avions convenu de nous rencontrer dans deux semaines.

Il ne reste plus que 5 jours...réalisai-je.

Les choses se précipitaient irrémédiablement accentuant au passage mes inquiétudes vis-à-vis d'Alec. Il avait étrangement réagi à l'arrivée imminente de Rafaël et Camille en France. Je dis étrangement car il n'avait été ni en colère, ni triste ou même impatient. J'avais un mal fou à déchiffrer ses émotions. Il ne laissait rien transparaître contrairement à son habitude et cela m'angoissait horriblement. J'avais la sensation qu'il s'était comme résigné mais ne savais pas si c'était une bonne ou une mauvaise chose.

Soupirant d'épuisement, je m'apprêtais à fermer les yeux quand la porte de la salle de repos s'ouvrit. Maé pénétra à l'intérieur en baillant longuement. Interne en chirurgie pédiatrique comme moi, c'est elle qui avait accepté de me remplacer au pied levé lors de l'hospitalisation d'Aria. Sans surprise, elle semblait complètement exténuée.

Nous étions extrêmement chanceux de disposer d'une salle de repos pour le personnel soignant. Deux canapés 3 places en cuir très confortables longeaient le mur du fond, d'où je me situais actuellement. Au centre de la pièce se trouvait une table à manger pouvant accueillir 6 personnes, un espace cuisine avait été aménagé avec un réfrigérateur, un micro-onde et un coin café sur la gauche. Le plus de la salle de repos était la petite pièce attenante de 3 mètres carrés qui accueillait deux lits simples.

— Quelle nuit, soupira Maé, en s'allongeant sur le second canapé.
— À qui le dis-tu, compatis-je.

Elle et moi avions commencé notre internat ensemble. Issue d'un métissage Franco-vietnamien, son rêve était d'être titulariser là-bas. Je la trouvais très courageuse car elle avait toujours vécu en France avec ses parents. Dans sa famille, ils étaient tous dans le milieu médical et c'était donc naturellement qu'elle avait choisi cette voie. Je l'appréciais beaucoup pour sa dévotion et son altruisme.

De l'amitié à l'amour : 9 ans plus tard (Tome 3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant