Lui et l'Autre.

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Il s'approche de lui, il ne se retourne point. Ses pas silencieux valsent sur le sol et sa main est si douce qui ne la sent pas se glisser dans la sienne, si frêle. Il l'emmène marcher vers ce qui semble être un vide infini, un passage vers se qu'on considère « rien », un monde dans l'incontinuité et le désagrément de l'inconscience. Il le fait marcher, lui, si frêle et sensible, vers ce vide qu'il connaissait déjà, un endroit qu'il avait visité quelques fois à certain moment de sa vie, guidée par l'autre, si doux mais insouciant, qu'il semble pourtant point reconnaître malgré ce nombre incalculable de fois où il l'avait amené, lui, dans ce passage droit à l'insensibilité et au vide absolu. Les deux s'arrêtent, et se regardent face-à-face comme toute les autres fois où il l'avait poussé à venir le suivre, l'autre. Il se fixe droit dans les yeux, bien que l'autre n'en possède point, lui arrive bien à les ressentir absorbé son propre regard, soit tremblant et horrifié, bien que son corps le montre comme calme et en contrôle de ce qui peut bien se passer. Il lui prend les mains, les gelant complètement par son froid corporel, et lui fait signe qu'ils sont bel et bien arrivé au bout du sentier. Lui le regarde, ses pupilles arrêtées du mouvement autrefois provoqué par l'inquiétude, devenant aussi vitreux que du verre. L'autre qui lui rend son regard inexistant, se laisse tombé au bout de ce sentier, ce passage, ce monde, dans le vide, l'entraînant lui avec cet autre. Le froid ce fait ressentir, l'obscurité imprègne de plus en plus leur chute et la solitude ne fait plus qu'un avec eux. L'autre, lui serrant de ses mains frigorifiées les poignets, s'efforce de se blottir jusqu'à lui transpercer le corps entier, se recroquevillant à l'intérieur de son cadavre devenu raide comme un piquet, l'invitant à s'isoler rien que les deux, seuls, à vivre cette solitude ensemble seuls deux, et cette fois-ci, pour toujours. Lui, ses yeux de vitre ayant explosé en mille et un morceaux chacun aussi coupant que des lames de couteau, ne lui manquant pas d'ailleurs de ne faire qu'un avec son organisme devenant ainsi ensanglanté, ne se bat point à refuser l'invitation, laissant ainsi l'autre et son corps se loger dans le sien. Lui se ramollit, se laissant toujours tomber dans cette obscurité où l'on voit tout puisque la conscience a la connaissance de la pauvreté de l'existence, et puis, rien. Il fait plus qu'un avec l'autre, plus qu'un avec la solitude, plus qu'un avec le vide autour de lui, plus qu'un avec ce nouvel univers qui se représente à lui. Cet univers qu'il avait déjà visité quelques fois avec l'autre, il le revu, le revit et le ressent. Un sentiment qui n'existe plus, car il ne ressent plus, il ne voit plus, il ne vit plus. Mais encore, est-ce l'illusion du vide qui lui donne à lui cette perspective à chaque fois qui repénètre ce cercle vicieux, ni même l'autre n'a la réponse. Tout ce dont il a conscience, c'est que peu importe le chemin qu'il empruntera, le cercle vicieux le ramènera toujours à l'autre, qui l'amènera lui dans un nouveau voyages vers ce vide, ce « rien », cette incontinuité, jusqu'à le pousser à bout, jusqu'à ce que la déprime l'enveloppe complètement, jusqu'à le transpercer de nouveau, jusqu'à en mourir.

Lui et l'Autre.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant