Allez, je vous la refais une dernière fois, je m'appelle Fergus Slott, j'ai pas été mordu par une araignée radioactive mais y'a cinq ans, on m'a tué. Enfin, il paraît. Je suis le seul et unique...bon, vous suivez ? Pas Spiderman mais un putain de revenant, ça c'est sûr. J'ai pas sauvé un max' de gens, mais j'ai cassé un max' de gueules, souvent pour la bonne cause et puis, des fois parce que c'était marrant. J'ai pas connu le grand amour, enfin, j'sais pas. L'amour c'est pas un truc qui me connait, mais ce que je peux vous promettre, c'est que je pecho un max de gens. J'suis trop stylé pour qu'ils résistent. Ah, par contre, j'ai sauvé la ville. Et resauvé la ville. Encore et encore et encore... Mais pas la mienne. La mienne, elle est loin derrière moi et avec elle, même mon nom. Plutôt caméléon qu'araignée, je dois bien vous la donner celle-là mais ça a son lot de trucs badass. Je crache pas de toiles mais je change d'identité plus vite qu'un exilé fiscal qui ouvre un compte en Suisse. Bref, j'ai trop de flow. C'est tout ce que vous devez savoir.
C'est aussi tout ce que mes employeurs ont besoin de savoir, souvent : ça fait des mois qu'on me paie pour que je pointe ma jolie gueule sur un plateau histoire qu'on l'étale après sur des billboard immenses, dans des rues où j'pourrais pas me payer un truc. Méga cool, mais méga capitaliste : quand ils sont à Londres, je manque jamais d'aller les taguer, histoire de les niquer jusqu'au bout ces bâtards. Un zéro pour le prolo'.
Grosse basse à fond dans les oreilles, j'pousse la porte du lieu comme si c'était chez ma mère : y'a nulle part où je suis pas chez moi et ça, j'ai mis des plombes à piger que c'était qu'une question d'attitude. Je me jette un œil dans le miroir de l'ascenseur et, ouais, je suis content de ce que je vois. C'est pas aujourd'hui que je vais porter une voiture à bout de bras pour la jeter à la gueule d'un connard de facho mais je vais rentrer avec un paquet de biftons à mettre dans notre boîte à thunes. Faut bien qu'on bouffe, on va pas tout faire péter le ventre vide. Les portes de l'ascenseur s'ouvrent, je me jette un dernier clin d'œil dans le miroir et ça y est : que le spectacle commence.
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Le set n'a rien d'inhabituel : une multitudes d'appareils prêts à saisir au vol les moindre faits et gestes, une fourmilière nerveuse qui s'agite tout autour des statues de cire, les odeurs de poudres, de laque, de café et de sueur qui se serrent les coudes et puis, dans l'air, ce petit truc électrique des endroits où tout est toujours sur le point de s'écrouler.
Le directeur artistique, indécis, observe le clou de son spectacle qui est affalé sur un trône avec sa caractéristique indolence. Celui-ci laisse mollement pendre son bras armuré dans le vide, une jambe en travers de l'accoudoir, l'air profondément ennuyé. C'est si convaincant que c'est à se demander s'il est particulièrement bon comédien ou s'il meurt d'envie d'être partout ailleurs qu'ici.
À quelques mètres, un géant dont le sourire rayonne l'encourage en tendant les pouces dans sa direction. Pas une réaction chez l'intéressé, enfin, pas à première vue : peut-être un frémissement de lèvres, à y regarder de plus près, mais de là à dire si c'est un sourire ou une moue dégoûtée...
Mais voilà, il est seul sur son trône et un révolutionnaire a besoin d'une cour pour lui plaider allégeance. C'est qu'on a rameuté tout un tas de visage pour composer celle-ci mais rien ne convient pour incarner celui supposé tendre la couronne – ou un flacon de parfum en ayant la forme –. Et cette chaise désespérément vide, aux postes de maquillage : il était évident qu'il allait faire sa diva.
Probablement affamé, le directeur artistique se met à dévorer ses ongles en jetant moult coups d'œil vers l'ascenseur. Il va falloir trouver une solution, s'il n'arrive pas d'ici cinq minutes.
Mais, le voilà, le dernier héros qui émerge des portes coulissantes comme s'il n'avait pas une heure de retard sur l'emploi du temps. En une fraction de seconde, la tempête l'emporte et il disparaît en un rire dans une foule d'employés jetés à ses pieds pour faire de lui le Couronneur.
Depuis son trône, le nouveau roi lève sa tête dans un cliquetis métallique. Il regarde autour de lui, hanté. Et puis, sans que le géant souriant ne comprenne rien, il se rallonge dans la même posture ennuyée. Probablement une hallucination, encore. Y'a des types qui, même morts, lâcheront jamais rien.
Et c'est pas peu dire : le Couronneur punk rock recouvert de ses toutes nouvelles chaînes est fin prêt à retrouver la vie sous les caméras. Sans prêter attention à son entourage, il entre sur le plateau sous les insultes du directeur artistique à qui il adresse un majeur aussi manucuré que tendu. S'il n'était pas si beau, cet enfoiré aurait déjà été jeté aux oubliettes. Mais c'est qu'une question de temps, se répète le directeur pour tenir, un visage surpassera bientôt le sien et ils auront la paix.
Pour l'instant, du moins, aucun visage n'a cette prétention dans la pièce et monsieur Slott se saisit de son coussin de velours. Il pose les deux genoux à terre, comme indiqué. Quelle connerie que de le foutre à genoux, lui, le grand Fergus. Et pour quel abruti exactement fait-il cela ? Il ne l'a même pas regardé.
Le nouveau roi, absent aux caprices de stars des mannequins et aux colères du patronat, fixe le sol avec intensité. C'est le rire qui fait encore écho dans ses oreilles, un rire de gosse. Un rire d'énorme abruti. Un truc qu'il étranglerait bien, avec ou sans armure. Mais un sifflement l'interpelle : c'est le bon gros géant, pouces toujours tendus, qui lui donne le go.
Alors, Knightmar, nouveau régent, relève le menton d'un air bravache. Son regard indifférent rencontre deux yeux narquois. Deux yeux de gosse.
Pire, oh bien pire, il rencontre les yeux d'un type mort et enterré.
Clic, l'appareil détonne et lui lance son flash en plein visage. Knightmar disparaît, avalé par un baiser volé et une marée de sang. Plus de son, plus d'image mais...
– Quelle émotion ! Oh, quelle émotion ! Beau travail Knightmar, je suis impressionné ! Scène suivante, la première prise est parfaite !
Le monde tremble, la voix du directeur artistique tonne. Elle n'atteint pas les oreilles du roi dont le royaume s'écoule entre ses doigts avec son odeur de sang et ses cris internes. Le grand spectacle.
Quand il rouvre les yeux, il n'y a plus rien autour de lui. Tout le monde remballe et visiblement, on le félicite encore pour son travail. Où sont passées les quarante dernières minutes ? Pire. Où sont passés ces deux yeux là ?
Soudainement pris d'une envie furieuse de tout retourner, Knightmar bondit sur ses deux pieds et jette ses gants de chevalier sur le sol. Le heaume tombe, et avec lui, sa capacité à respirer correctement. Voilà que ses poumons se remplissent de liquide, de sang, c'est du sang, il en a l'odeur plein le nez. La Terre tourne encore, son armure claque bruyamment tandis qu'il se précipite parmi les sièges où sont assis les mannequins.
Il en saisit une paire par les épaules, ancrant ses yeux fous dans les leurs, mais rien. Il ne voit pas un visage mais encore moins une paire d'yeux. Une seule. La seule qui compte, la seule qu'il arracherait à mains nues si c'était bien elle.
Avant qu'il ne les trouve, le sol cède sous ses pieds, l'air lui manque pour de bon et il ne reste plus qu'un grand fracas ferraillé contre le linoléum.
De l'autre côté de la pièce, le ding annonçant la fermeture des portes de l'ascenseur se fait entendre : il descend, et avec lui, une paire d'yeux qui a failli ne plus revoir la lumière du jour.
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And every hero needs his theme song
FanfictionTamar Fedior, dernier petit protégé du rap américain vient de faire son coming-out...explosif. Décrié par certains, encensé par un tout nouveau public, les contrats coulent à flot : c'était sans savoir que l'un de ceux qu'il accepterait le mènerait...