Anna :
Je t'écoute, Ian. Vas-y, dis tout, laisse tout sortir, on est là pour ça. J'aimerais lui crier tous les encouragements qui fusent dans ma tête. J'espère que mon seul sourire, que juste mon aura fera l'affaire.
Finn :
Il va y arriver, j'en suis sûr. Même si ta voix tremble, même si tes larmes s'échappent de tes yeux, même si tu finis en sanglots, ce n'est pas grave, parce que tu l'auras fait. Ma confiance en lui est aussi grande que mon appréhension, je suis déchiré entre le faire taire, le rassurer, l'arrêter pour que plus jamais je n'entende ce récit, et l'entendre tout déballer malgré les atrocités qu'il va énoncer. Je crains plus sa réaction que celle des filles.
Laurie :
Je sais qu'il n'est pas au mieux, mais ça ne va pas l'empêcher d'assurer. Le plus dur est fait, il vient d'enclencher la chose tout seul, il ne lui reste plus qu'à lâcher prise. Tout va bien, on ne fera rien d'autre que d'écouter, de comprendre, et d'accepter. Ça va le faire.
Ian :
Est-ce que c'était vraiment une bonne idée finalement ? Mais oui, Ian, ne te dégonfle pas, tu as commencé, tu ne vas pas t'arrêter là. Sauf que je suis sûr que ça va faire s'écrouler notre amitié... Et puis Laurie, si elle l'apprend, si je la dégoute, si elle en parle aux parents de Finn, s'il finit par me quitter à cause de la pression de sa famille ? Non, jamais ça n'arrivera, Laurie est adorable, et de ce que je sais, leurs parents aussi, alors arrête de croire que tout va s'effondrer. Pourquoi je devrais leur dire, après tout ? T'en as déjà parlé avec Finn, il a raison, t'as besoin d'aide, ça va te faire plus de bien qu'autre chose. Oui mais... Et si... Pourquoi... Comment... Est-ce que...
Un ballet cruel à lieu dans ma tête. Mes pensées divergent, elles tournent, et tournent, à contresens, en spirale, se cognant dans tous les coins. Je me concentre de toutes mes forces sur la pression des doigts de Finn sur les miens, ma respiration que je régule au mieux, la brise, les arbres, mes amis, mes objectifs. Mes yeux se ferment, avant de doucement se rouvrir, sans que je n'ai à leur demander quoi que ce soit. Puis ma bouche, ma voix, et mon cœur suivent, et je les laisse faire.
Anna :
Les mots sortent sans s'interrompre. Ils dévalent nos âmes sans s'arrêter, et je ne saurais dire s'ils m'enlèvent ou s'ils me rendent un petit bout de mon cœur à chaque cavalcade. Les sons me traversent, glacés, la vérité est plus transperçante que des lames. Où est-ce que je regardais ? Suis-je vraiment assez idiote pour être passé à côté de quelque chose d'aussi gros ? Je ne suis pas très innocente, et pourtant, des frissons d'horreur courent le long de mon dos quand j'enregistre certain détails. Le plus sidérant, c'est la neutralité du ton d'Ian. Il nous raconte son enfance, les moments les plus marquants, insistant sur les pires atrocités, sans pour autant s'apitoyer sur son sort. Plus que de la compassion, c'est une véritable admiration qui évolue au fil de son histoire. Je trouvais déjà qu'Ian avait un certain mérite, mais là, ça dépasse un niveau que je n'aurais jamais soupçonné.
Des mots reviennent souvent, tranchants, impitoyables, qui m'oblige à rétracter des larmes.
Violence. Souffrance. Rejet. Abandon. Déni. Solitude. Isolement. Culpabilité. Pleurs.
L'inavouable a pourtant finit par être dévoilé, et le mur est tombé. Le récit de l'aveux au poste de police m'a laissé toute tremblante. Je me sentais à la fois heureuse, touchée, admirative, chamboulée et terrifiée, comme si c'était moi qui m'étais retrouvée devant cette gendarme. Ensuite, celui du procès m'a décontenancé, et quand Ian dit son dernier mot, je ne tiens plus très longtemps avant de le prendre dans mes bras.
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Un Océan Dans Les Yeux
RomanceFinn est un jeune homme à qui la chance sourit. Il a tout pour être heureux, des parents qui le chérissent, une grande sœur attentive et un petit frère adorable, une maison immense et de l'argent à n'en plus finir. Et puis, il est populaire, tout so...