Défilé

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L'affaire avec les marches sur la plage, c'est que si tu veux avoir les pieds dans l'eau, tu dois marcher devant les gens qui sont sur ladite plage. Alors quand il y a ben du monde, c'est comme si tu faisais un défilé sans le vouloir.

Et laisse-moi te dire que je suis pas amanchée pour faire un défilé: bikini dépareillé, paréo qui fait même pas semblant d'être assorti à l'une ou l'autre des parties du bikini, cheveux tout croches, casquette laide orange-chasse. Je sens que je détone avec la crowd en shape-athlétique-linge-sport-maillot-neuf-bronzage-parfait-pas-de-varices. Pis, on peut tu se le dire, marcher dans le sable là, c'est pas facile. Il me semble que dans les films, tout le monde est sexy quand ils marchent sur la plage. Moi, je me sens comme si j'avais l'air d'un genre de pingouin en ce moment: pas à l'aise d'utiliser ses propres pieds. À part de ça, qui se promène seule sur la plage un dimanche après-midi? En tous cas ici, personne. Tout le monde est en gang. C'est vraiment une belle journée chaude, parfaite pour s'amuser sur la plage avec ses amis. Ouais, et moi je suis là toute seule parce que à mon âge, les gens ont des vies, ils ont pas toujours le temps de chiller sur la plage. J'ai repéré un petit bout de plage désert, entre deux buissons. Je vais y revenir.

Je prends le sentier pour aller aux toilettes. Je fais mes p'tites affaires et j'abandonne ma cannette de bière vide dans la cabine. Je me regarde dans le miroir en me lavant les mains. Pas pire. Je suis bronzée et j'ai presque l'air d'une personne sportive (c'est la casquette). Je me trouve pas mal du tout en fait. C'est à se demander pourquoi j'ai si peur du regard des autres. J'aime bien mon petit muffin top, je trouve ça sexy un peu d'extra autour du nombril. Et ma bouche, elle est bien ma bouche. Il y en a qui paient cher pour avoir des lèvres aussi somptueuses, et c'est moins réussi que ce que j'ai la chance d'avoir dans la face naturellement. J'aurais presque envie que quelqu'un d'autre apprécie mes atouts - que quelqu'un me déguste le muffin, quoi - sinon, quel gaspillage.

En revenant, je croise le sourire d'un monsieur en wet suit qui a l'air content de faire, whatever c'est quoi son sport nautique. Ça me remet un peu de bonne humeur et je me dis qu'il faudrait peut-être sourire aux gens effectivement, ça a l'air d'être ça la vibe. Un peu plus loin, je croise un gars à l'air timide. Il me fait un petit sourire et je le lui rend. Cute. On se regarde dans les yeux juste une petite seconde de plus que... que j'ai regardé le monsieur d'avant, disons. Il a l'air d'un bon gars, ça se voit. Parce qu'il n'a pas l'habit officiel du douchebag, mais surtout par son regard bienveillant. Moi, les bad boys, ça m'énerve, et les six packs, ça m'impressionne pas. Un regard honnête et un petit sourire timide, c'est ça qui m'allume. Ou un regard timide et un sourire honnête.

Je me fais croire qu'il me trouve de son goût et que c'est pour ça qu'il m'a sourit. Ça ne m'en prend pas plus pour lui inventer une personnalité et une vie. C'est assurément le genre de gars super réservé qui s'avère être une rockstar au lit. Genre, médaillé d'or du cunni, parce qu'il prend le temps de te feeler. Ouais, il prend son temps, il t'embrasse un peu partout, les seins, le ventre, il descends lentement, il promène sa langue sur l'intérieur de tes cuisses. Il revient te frencher, il se colle sur toi. Tu sens sa chaleur et tu peux toucher ses pecs. Il est sur toi mais il t'écrase pas, parce qu'il est super en forme. Il retourne entre tes cuisses. Il va pas direct sur le clito comme tous tes one night. Il sait qu'il faut te réchauffer, il lèche tes lèvres. Et tu vois qu'il aime ça parce qu'il fait des « hmm ». Pis quand il te sent assez chaude, il finit par aller là mais, il est pas toujours en train de changer de vitesse et de mouvement, comme tous tes ex. Il sait garder le beat. Ouais, j'ai décidé que c'était ce genre de gars-là.

Je retourne sur la plage, cette fois avec un petit bonus de confiance en moi. Je refais le défilé obligatoire pour avoir les pieds dans l'eau, mais sans me trouver inadéquate, cette fois-ci. Juste en appréciant l'eau sur mes pieds et le sable en dessous. Le vent fait glisser le paréo d'une de mes épaules et je me souviens à quel point j'adore la chaleur du soleil sur ma peau. Je me détends. Je ne parviens pas à oublier le regard des gens, pas encore, alors je me donne en spectacle, tant qu'à faire. Je marche lentement, je prend un posture un peu plus... rehaussée. Mais je ne remonte pas le voile translucide de mon paréo sur mon épaule. Je peux pas, « j'ai ma chaise dans la main et mes sandales dans l'autre », oups, mon épaule est à découvert. Je ne descends pas non plus mon maillot pour cacher mes fesses. Je vais les laisser rebondir à chaque pas. Regardez-les. Fantasmez dessus. Admirez-moi. Je vais même oser vous jeter un petit coup d'œil pendant que je passe devant vous. Je vais vous admirer. Parce qu'après tout, on est des humains et que c'est naturel de se mater entre nous.

Littérature érotique: DéfiléOù les histoires vivent. Découvrez maintenant