34- Premier baiser

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Je connaissais déjà la réponse. Mais je veux l'entendre de sa bouche. Son regard laisse paraître sa gêne face à ma question. Il se redresse un peu plus en évitant mon regard.

- Euh... oui mais je fais tout le temps des cauchemars ces temps ci.

Il passe une main dans ses cheveux, toujours en évitant mon regard. Il regarde un peu partout autour de lui avant de se lever.

- J'arrive dans cinq minutes, bouges pas !

Et il disparaît dans la salle de bain. J'ignore son changement de sujet. Tout ce que je retiens c'est qu'il fait des cauchemars. J'espère que ce n'est pas à cause de moi. Je prends le temps d'observer sa chambre. C'est assez simple mais classe. Il n'y a que le nécessaire, le lit, un bureau, une télé accroché au mur et une étagère.  Elle ne dégage aucune énergie particulière. C'est... fade.

La porte de la salle de bain s'ouvre sur Angel. Il a arrangé ses cheveux mais il est toujours torse nu. Non pas que j'aime pas la vue, c'est d'ailleurs très plaisante mais ça me déstabilise.

- Tu as faim ?

Je hoche la tête. Il affiche un petit sourire avant de venir prendre ma main et de m'entraîner dehors. On arrive dans la cuisine où on croise quelques domestiques. Angel les libèrent en annonçant qu'il va s'occuper lui même du petit déjeuner. Le fait qu'il soit torse nu n'a l'air de déranger personne. Pas que je n'ai jamais vu de torse mais le sien me fait un drôle d'effet.

- Alors, tu veux manger quoi ? Me demande t-il.

Je regarde autour de moi. D'habitude je mange des céréales au petit déjeuner, je ne me suis jamais attardée sur ça. Je finis par hausser les épaules, ce qui lui arrache un sourire.

- Je vais t'aider. Choisis entre omelette et crêpes, propose t-il.

- Omelette.

- Tout de suite mademoiselle.

Mes lèvres s'étirent en un sourire. Il commence sa préparation, dos à moi. Je détaille les muscles de son dos se contracter à chacun de ses mouvements et me mord la lèvre inférieure. J'ai envie d'y toucher. Peut-être que je devrais lui dire de porter un t-shirt ? Non, ça serait mal venu. Il est chez lui après tout.

- T'as bien dormi ?

Je m'empourpre rapidement. Je me suis endormie sur lui la nuit dernière. Il a dû me porter jusqu'à la chambre d'ami... ou me traîner sur le sol ? J'espère que je n'ai pas dit de conneries pendant mon sommeil. Il se tourne vers moi, un petit sourire taquin sur les lèvres.

- T'inquiète pas, t'étais pas trop lourde.

Il rigole alors que je lève les yeux au ciel.

- C'est pas drôle, je réplique.

- Si.

Ce n'est pas mon poids qui m'inquiète. Mais s'il ne fait pas de remarque sur autre chose c'est qu'il ne s'est rien passé d'autre. Heureusement.
Je me lève pour l'aider au lieu d'être là à ne rien faire. Je me place à côté de lui et m'occupe des tomates que je découpe et place dans deux assiettes. Il met l'omelette juste à côté des tomates.

- On va dans le salon ? Me propose t-il.

Je hoche la tête et on part s'installer sur un canapé. Il allume la tête et met un dessin animé. Ça me rappelle les souvenirs de mon enfance, avant le départ de Mika et Ivan. On prenait toujours nos petits déjeuners devant un dessin animé juste avant d'aller à l'école. J'adorais ces moments, on ne se souciait de rien...

Angel mange tranquillement son repas en regardant l'écran en face de lui. J'ai l'impression que ses yeux pétillent de joies, on dirait un enfant.

- Tu ne manges pas ? Dit-il, toujours le regard rivé sur l'écran.

Un petit sourire prend place sur mon visage avant de prendre une bouchée. On mange en silence, avec quelques rires à certains passages du dessin animé. Je lui jette quelques coups d'œils discrets parfois. Il a l'air tellement bien là, tellement pur. Pourtant je sais qu'il est mal à l'intérieur. Mais il ne laisse rien paraître. J'aimerais pouvoir faire autant. Profiter pleinement de ces instants de bonheur en oubliant tout le reste. Ça a l'air si facile pour Angel. Pourquoi je n'y arrive pas ?

Mon regard s'était perdu au fond de mon assiette quand sa voix me ramène sur terre. Je lève les yeux vers lui, les siens avait perdu cet éclat. Ils s'étaient assombris.

- C'était l'un de mes moments préférés. Quand je prenais le petit déjeuner avec mon frère en regardant notre dessin animé préféré. Je m'en rend compte trop tard, maintenant qu'il n'est plus là.

Il m'évite du regard en disant ces mots. J'ai l'impression qu'il veut me dévoiler cette partie de lui mais à peur de se montrer faible. Je pose mon assiette à moitié vide sur la table et pose ma main sur sa cuisse. Il pose enfin ses yeux sur moi.

- On est pas si différent en fin de compte. On a tous les deux perdu des gens qui comptaient.

Il écarquille les yeux, surpris que je veille m'ouvrir à lui. Il pose ensuite sa main sur la mien et la serre.

- Ils sont... morts ? Demande t-il, retissant à se lancer sur le sujet.

- Non. Non ils sont juste partis. Ils voulaient plus moi, terminé-je en sentant ma voix se briser légèrement.

Il serre un peu plus ma main sur sa cuisse. Je sens les larmes monter. J'aurai pas dû évoquer ce sujet. Je baisse la tête, ne soutenant plus son regard. Mais il saisit aussitôt mes joues pour la relever.

- Alors tu n'as pas à les regretter. Ils ne méritent pas d'avoir une personne comme toi dans leur vie. Et sache que moi, je ferai tout pour rester dans la tienne.

J'encre mes yeux aux siens. Pour une fois j'ai envie d'y croire. J'ai envie de lui faire confiance.

À mes risques et périls.

On se fixe en silence. J'ai l'impression de lire en lui à travers ses yeux. Ils ne mentent pas, à moins d'être un très bon acteur. Un fin sourire apparaît sur ses lèvres alors que ses mains caressent mes joues. Je me rends compte qu'à ce moment que mon cœur bat anormalement vite.
Sans pouvoir m'en empêcher mon regard descend sur ses lèvres puis automatiquement sur son torse nu. Mais je me ressaisis rapidement, gênée, puis tente de me lever pour échapper à cette situation. Mais il saisi ma main, me forçant à reprendre ma place.

- Ne me fuit pas Star.

Je sens mon cœur tambouriner de plus en plus fort quand il glisse lentement sa main sur ma nuque. Il approche lentement son visage du mien et je commence à paniquer.

- Là tout de suite il y a une barrière qui nous sépare, susurre t-il près de mes lèvres. Je veux...

On est trop proche. Mon cœur menace d'exploser d'une minute à l'autre. Je suis suspendue à ses lèvres. Qu'est-ce qu'il attend putain ?

- Tu... qu'est-ce... qu'est-ce que tu veux ?

Il presse ma nuque et rompt l'espace qui sépare nos lèvres. Une charge électrique traverse mon corps à cet instant. Par réflexe je pose mes mains sur son torse. Son cœur bat aussi vite que le mieux. J'entrouvre légèrement mes lèvres et nos langues se rencontrent. Mes mains glissent jusqu'à son cou. Mais un bruit de fracas interrompt notre baiser. Je m'écarte brusquement de lui et regarde la provenance du bruit. Une des domestiques se tient à l'entrée du salon, des bouts de verres brisés au sol. Elle baisse immédiatement la tête en s'excusant.

- Qu'est-ce qui se passe ? Vous allez bien ? Demande Angel.

- Excusez moi monsieur. Mademoiselle Williams est dans le hall.

Je lance un regard confus à Angel. Qui est cette Williams ? Pourquoi elle vient voir Angel aussi tôt ? Ce dernier me regarde aussi avant de faire signe à la dame de la faire venir.

- C'est qui ?

- Euh... c'est A-

Avant qu'il n'ait le temps de finir une voix qui ne m'est pas inconnu l'interromps.

- Bonjour.

Amy, la chef pâtissière. Elle se tient à l'encadrement du salon, avec un paquet dans les mains. Son regard passe de Angel à moi et elle n'a pas l'air très contente. J'imagine pas ce qu'elle doit penser en me voyant avec son patron, qui de plus est torse nue.

- Je vous dérange ? Dit-elle d'un ton froid.

Première quête Où les histoires vivent. Découvrez maintenant