Chapitre 13 : Deux cons bourrés (1)

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Alexander

Ce soir, je suis bien décidé à dire à Cailee ce que j'ai sur le cœur – et aussi sur la bite. L'alcool dans mes veines propulse mes idées sordides vers un mariage de conte de fée aux côtés de Blanche Neige, l'achat d'une petite maison dans la campagne, l'adoption de deux chiens et d'un chat et enfin une série de baise interminable. Je secoue la tête pour chasser ces images de mon cerveau défoncé afin de me reconcentrer sur la route. Les doigts qui serrent le volant, je me bats pour ne pas fermer les yeux à cause de la fatigue qui me gagne petit à petit, mais c'est grâce à l'image de Cailee en petit short et en débardeur que je parviens à rester éveillé. Mon GPS m'indique encore une heure trente de route.

_ Ca vaaaa, je peux le faire. Je peux le faire pour toi, ma belle. Tiens-toi prête, ton prince charmant arrive !

Ma détermination est au maximum mais mon sommeil semble ne pas abandonner la bataille.

_ Non ! Je ne fermerai pas les yeux. Je ne fermerai pas mes putains d'yeux !

Je crie comme un fou dans l'habitacle de ma voiture. Mais le temps d'un instant, j'ai cédé en fermant les yeux pour ce que je pensais être quelques secondes. C'est le bruit d'un klaxonne et des pneus qui crissent qui me réveille d'un plomb.

_ Merde !

Une voiture m'évite de justesse en se garant immédiatement au bord de la route. Je freine et passe mes mains moites sur mes yeux afin de réaliser ce qui vient de se passer. Est-ce que j'ai eu un accident ? Je tâte mon corps pour vérifier que tout est en place et regarde dans le rétroviseur. Je vois le conducteur sortir de la voiture en titubant. Je crois qu'il est carrément plus bourré que moi. Je sors moi aussi de ma jeep en essayant d'adopter une démarche normale. De nous deux, je voulais avoir l'air plus sobre que lui.

Malgré le faible éclaircissement de la lune, je parviens à distinguer les traits du gars qui a failli me tuer, ou que j'ai failli tuer. C'est avec reconnaissance que je vois que ce n'est qu'un gamin. Putain, j'ai failli tuer un gamin.

_ Mec, t'as failli me tuer, je dis en jouant la victime sachant pertinemment que c'est moi qui ai fermé les yeux un instant.

_ Putain mec je suis vraiment désolé. J'ai bu et j'ai laissé le sommeil me séduire pour quelques secondes.

Il avait l'air vraiment embarrassé et désolé. Ce qui est complètement insensé car moi aussi j'ai ma part de responsabilité. Mais bon, pas besoin qu'on se sente mal tous les deux. Ça ne mènerait à rien.

_ Bon, fais attention la prochaine fois, je dis en tournant les talons pour regagner ma voiture.

L'autre morveux aux cheveux bouclés fait pareil mais il est plus rapide que moi. Je crois qu'il a vraiment hâte de partir. En entrant dans ma voiture, je cherche mon téléphone qui vibre depuis toute à l'heure. C'est sûrement Cailee. Elle doit s'inquiéter. Je souris comme un con en ramenant le téléphone à mon oreille.

_ Blanche neige, tu devineras jamais...

_ Alexander Karlsson ! Dis moi que tu es dans ton lit en ce moment.

Avec un sourire aguicheur sur les lèvres, je lui dis ce qui me passe par la tête.

_ Non mais je serai dans le tien dans pas longtemps.

_ Tu es vraiment qu'un...

Bip.

_ Allo ?

Je regarde mon portable et constate que l'écran est tout noir. Merde pas ça ! Je rallume mon téléphone avec désespoir mais en vain. D'abord l'accident et maintenant la batterie de mon téléphone ? Pardon l'univers, j'ai pas bien compris ce que tu essaie me dire. 

Je sors de ma jeep en trombe et rattrape l'autre morveux qui était sur le point de démarrer. Je tapote sur sa portière en faisant signe de descendre la vitre. Il hésite mais je lui souris de toutes mes dents.

_ Mec, j'ai déjà dit que j'étais désolée...

_ Et je te pardonnerai complètement si tu me rends un service.

Merde, j'avais pas deviné que j'avais la voix toujours aussi pâteuse à cause de mon ivresse. Mais la sienne est pire. Il fait mine d'être dégoûté en déformant son visage.

_ Hors de question que je te suce, OK ?

Qu'il est con !

_ Au moins on est d'accord sur un point car il est hors de question qu'un petit morveux comme toi me touche la bite.

_ Qu'est-ce que tu veux ?

_ Prête-moi ton téléphone.

Il cligne plusieurs fois des yeux comme pour assimiler mes mots. Oh ça va, je ne demande pas la lune !

Après quelques secondes à hésiter, il me tend son portable que je m'empresse de prendre. Mais en déverrouillant ce dernier, je remarque qu'il y a un code. Je lui retend en faisant mimant "dépêche-toi". Le morveux prend le téléphone en fronçant les sourcils. Il tape plusieurs fois dessus l'air contrarié.

_ Bon, tu comptes le faire ou je dois faire revenir plus tard ?

_ Je comprends pas... Je tape mon code mais ça ne marche pas.

_ Ah ç'est pas vrai ! Donne le moi et dicte moi ton code.

En fait, j'ai peur que le morveux soit trop ivre pour être habile de ses doigts et du coup, il tape mal son code.

_ Hors de question que tu connaisses mon code !

Je roule des yeux, totalement exaspéré.

_ Mec, de toute façon on ne se reverra plus donc file moi ton putain de code.

_ CT4EVER, il dit dans un souffle.

_ Bah voilà, c'était pas trop dur.

Je tape parfaitement son mot de passe niais à la con mais c'est toujours erroné. Je retape une seconde fois, une troisième fois, une quatrième fois, bref j'ai bloqué son téléphone.

_ Tu te trompes c'est pas ça.

_ SI C'EST MON MOT DE PASSE ! Il crie presque les larmes aux yeux.

Je recule face au malade que j'ai devant moi. Est-ce qu'il est en train de pleurer ? Il sort de sa voiture une clope à la main. Le vent frais de la nuit décoiffe ses cheveux bruns et la clope aux lèvres, il essuie furieusement la larme qui a coulé sur sa joue rougi par le froid.

Je m'approche doucement de lui.

_ Ça va, mec ? 

Il ne me répond pas et essaie d'allumer son briquet mais le vent l'en empêche. Il tente plusieurs fois avant de céder en balançant son briquet quelque part dans l'obscurité. Il marche vers sa petite voiture en s'adossant à la portière avant de se laisser tomber par terre. La posture un peu gênante, je regarde de toute ma hauteur le morveux aux cheveux bouclés complètement bourré par terre.

_ Mec, tu devrais rentrer chez toi. C'est pas sûr de rester dehors la nuit, surtout au milieu de nulle part.

_ Pas question que je rentre sans la voir.

Qu'est-ce qu'il me raconte encore, celui-là ?


Gasparini : Cailee & Alexander (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant