L'atmosphère était ambivalente l'après-midi qui suivit, lorsque tout le monde s'était réuni près du lac pour fêter le dernier jour des festivités.
– J'ai entendu dire que Monsieur le Maire a fait appel à des professionnels pour installer des feux d'artifices ce soir !, expliquait Capucine , ne pouvant contenir son excitation.
Tout le monde connaissait l'amitié qui liait son père avec le Maire et curieuse comme elle l'était, chacune de leur conversation était susceptible de parvenir jusqu'à ses oreilles.
– Tout cela pour une fête foraine ?, se plaint Edgar qui s'était invité à leur petit rassemblement.
Personne ne releva son arrivée, comme toujours les mains dans les poches de son pantacourt vert, l'air désintéressé.
– Vous n'êtes donc pas au courant ? Tout le monde ne parle que de cela dans tout le pays, répondit Charlotte la fille du médecin.
– Faites un effort !, la supporta Capucine.
Face à cette ignorance déconcertante, les demoiselles se mirent à informer leurs camarades ; Le gouvernement avait - à ce qu'elles affirmaient - décrété que le 14 juillet serait, à partir de cette année, le jour de fête national. Pour célébrer l'occasion, la ville de Paris était, au moment où ils parlaient, en pleine préparation d'un feu d'artifices grandiose. A l'inverse, leur petit village ne pouvait se mesurer à de tels revenus et n'avait mis en place que quelques artifices.
Annabelle se réjouissait d'avance du spectacle, tout comme la plupart des villageois. Elle rêvait de voir de belles couleurs se mélanger et illuminer le ciel étoilé.
Néanmoins, elle ne se voyait pas profiter sans passer cette dernière soirée avec Eduardo, qu'elle avait attendu toute la journée. Le vagabond finit par se montrer, tout joyeux, et accourut vers son amie en secouant un sachet en papier haut dans les airs. Il avait ramené des sucreries, clandestinement, et les lui offrit, fier de son initiative. Tout le monde eut aussi le droit à une petite douceur. Annabelle sentit tout de même une once de tristesse parcourir son corps, presque aussi soudainement que la venue d'un simple frisson.
Isaac et Lily firent leur apparition après l'heure du repas. Leur retard attisa alors les regards et des questions présentes dans tous les esprits. Annabelle et lui n'avaient toujours pas réglé leurs différends et s'évitaient ouvertement.
– Tu ne m'avais pas dit qu'hier Isaac avait refusé de retourner avec toi à la foire ?, Daniela attendit que son amie confirme pour continuer. Parce qu'il y a retrouvé Lily plus tard dans la journée. Tout le monde ne parle que de ça depuis.
Annabelle avait l'impression de ne plus reconnaître son ami de toujours. Il s'éloignait d'elle à vue d'œil et elle ne pouvait rien faire contre cette finalité. Enfin, pas sans mettre sa fierté de côté et des excuses de sa part, cela allait de soi. D'autant plus qu'Annabelle n'oubliait pas les mots qu'Isaac lui avait écrits quelques mois auparavant dans sa lettre.
Lily voulait la remplacer, qu'il en soit ainsi. Elle craignait cependant qu'Isaac n'ait choisi la mauvaise personne. Lily était bien trop terre à terre pour lui. Après tout, Isaac ne lui avait jamais appartenu et ce n'était pas demain la veille.
Eduardo ne manqua pas d'assister Annabelle dans son apparente détresse et vint s'asseoir à ses côtés.
Pour se réchauffer, Marius, accompagné par Alphonse et Victor, avait rassemblé un énorme tas de bois et quand il commença à faire un peu sombre, y jeta une allumette. Le feu crépita un long moment, les garçons faisant de leur mieux pour l'alimenter à tour de rôle. Puis l'heure du spectacle arriva enfin. Avec une vue somptueuse sur le lac et la lune qui avait accepté de s'y refléter, le décor était idyllique.
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Annabelle de Coutais
Ficción históricaAnnabelle, jeune villageoise française de 12 ans est élevée par ses parents dans un village de campagne. A l'été 1879, quand ses parents décèdent brutalement, Annabelle se retrouve à vivre une vie bourgeoise pleine de nouvelles règles dans le Châtea...