Nous étions dans le cabinet du médecin. Elle ne cessait de se ronger les ongles, elle regardait autour d'elle, se tenait la tête, me prenait la main, tandis que le médecin essayait tant bien que mal de la rassurer et de lui expliquer qu'il ne lui voulait rien de mal. Il voulait juste l'examiner pour savoir ce qu'elle avait, comme tout médecin qui se respecte. J'étais profondément agacé cependant je ne voulais pas le montrer, je jouais au petit fiancé parfait qui s'inquiétait pour sa future femme. Il lui fit une auscultation qu'on avait l'habitude de voir partout, puis il lui fit une prise de sang. Elle ressemblait à une pauvre petite fille perdue dans la ville. Ou bien d'une folle. J'en avais honte. Je ne savais plus où me mettre. Ce n'était pas à elle dont je m'étais habituée. Ce n'était pas elle l'amie que je m'étais faite il y a bien longtemps. Je ne voulais pas être affiché avec elle. Elle me faisait pitié.
Nous rentrâmes à l'appartement. Elle me disait être contente d'avoir enfin osé consulter, après un mois à agoniser dans notre lit. Je lui disais qu'elle faisait bien, que c'était courageux de sa part, qu'elle pouvait être fière d'elle. Je tissais une corde de mensonges qui ne cessait de grandir, en aucun cas je me sentais content pour elle. Je ne sortais que des phrases bateau afin qu'elle me laisse tranquille. À la limite, ce qui me rendait heureux était le fait que j'allais peut-être retrouver la paix grâce à son rétablissement. Il m'était impossible de retourner en arrière depuis longtemps déjà, mais je ne pouvais m'arrêter. Je baignais dans le mensonge constamment, excepté un certain moment de ma vie, qui ne survenait que très peu de fois. Néanmoins, lorsque cela arrivait, je sortais enfin la tête de l'eau. Mes poumons qui ne cessaient de se faire écraser se sentaient revivre. J'étais rarement heureux, mais ce bonheur était sincère lorsque je le vivais.
Beata était dans notre lit, elle lisait, je lisais, tous deux dans notre chambre. Je sentais une aura paisible. Paisible mais irréelle. Je luttais grandement pour garder cette amitié que j'avais tant chérie depuis ces dernières années, mais cette bouffée de haine qui me prenait s'avérait toujours plus puissante que tout le reste. Elle grandissait plus les jours passaient.
Quand est-ce que j'allais le revoir ? Je savais où il résidait, mais cela serait très étrange et mal venu de ma part de venir sonner chez lui. Mais je ne pouvais pas espérer le voir à chaque fois que je me rendais dans le quartier de l'Opéra Garnier. Je ne savais que faire et je me désespérais. À présent, je me maudis d'être né ainsi. Être né ainsi m'énerve. Si j'avais été différents, mes parents ne m'auraient jamais laissé. Je n'aurais jamais eu à subir toute cette vie que je subis. La souffrance que j'endure est réelle. Et cela, seul lui était au courant. Seul lui savait. Et encore, je mens une nouvelle fois. Il ne savait pas tout. Quand est-ce que j'arrêterais de mentir ? Enfin, si cela est possible, ce que je ne crois pas. J'ai envie de croire que cela ne se fera jamais. Je l'ai sûrement cherché. Les normes sont les normes, il n'y a pas la place aux différences.— Je te parle chéri.
— Oui ? Excuse-moi, j'étais perdu dans mes pensées.
— J'ai vu ça, oui. Dis-moi, quand est-ce que le médecin va nous donner les réponses ?
— Dans la semaine. Je ne la regardais même plus dans les yeux, je n'y arrivais pas.
Un silence s'était installé, me laissant penser naïvement qu'elle me laisserait tranquille.
— C'est difficile le travail ces temps-ci ? J'ai l'impression que nous ne discutons plus beaucoup tous les deux.
— Je suis très fatigué ces derniers temps, effectivement.
— C'est tout ?
— Comment ça ? l'irritation devait s'ete
— La seule raison pour laquelle tu ne me parles presque plus c'est parce que tu es fatigué ?
VOUS LISEZ
Du bout de tes doigts
RomanceOleg, homme d'affaires haut placé à Paris s'éprend d'Haïcé, alors que Beata, sa fiancée, est fortement malade. S'il s'avoue son trouble, donne libre cours à son désir et que leurs cœurs se rencontrent, Oleg ne peut réprimer sa honte et faire de cet...