Chapitre 17 : De drôles de manières

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La stupeur décomposa le visage d'Annabelle quand elle retomba sur la terre ferme et découvrit que les invités tant attendus étaient arrivés plus tôt que prévu. Nicolas, vide de toute expression, se tenait droit comme un piquet dans son ensemble vert immaculé. Les mains derrière le dos, ses yeux parcoururent la silhouette de la jeune fille de haut en bas. La dame blonde - aux cheveux qui n'avaient pas l'air naturel - qui l'accompagnait devait être Clothilde. Bertille, qu'Annabelle avait redoutée durant des mois, se tenait à leur côté sans dire un mot, bien que l'on pouvait quand même discerner une once de supériorité dans sa posture. Elle était le portrait craché de sa mère.


– Qui sont ces paysans Nicole ?, demanda Clothilde avec mépris. Travaillent-ils pour vous ?

Madame de Coutais ne savait plus où se mettre et se força à répondre aimablement.

– Isaac est le petit fils des Balvay qui habite à la ferme du Château. Ce sont eux qui nous fournissent en lait, fruits et légumes. Et à ses côtés, voici Annabelle. Ne fais pas cette tête mon enfant, présente toi donc.

Nicolas ne lui laissa même pas le temps d'ouvrir la bouche et la coupa dans son élan.

– La fameuse fille de ma soeur Hélène et... quel était son nom déjà ?, se trouvait-il drôle.

Ce commentaire n'était pas le bienvenu et déplut à Annabelle qui rétorqua, avec culot :

– Vincent Brisson. Je suis une Brisson et fière de l'être.

Nicolas aurait voulu réprimander la petite pour son attitude inappropriée et Clothilde, aussi polie qu'elle pouvait le paraître, ajouta à son tour :

– C'est une qualité d'être fier de ses origines. Mais tout le monde ne naît pas dans les mêmes conditions que nous, n'est-ce pas Nicole ?

La vieille dame fût certes prise de court, mais n'eut aucun mal à rebondir.

– Heureusement, notre sang noble coule dans ses veines.

Elle se tourna ensuite en direction du garçon et le remercia d'avoir ramené sa petite fille, sous-entendu qu'il n'était plus le bienvenu ici pour le moment et qu'il valait mieux qu'il retourne chez lui. Il se courba par respect et s'enfuit sans dire un mot.

Madame de Coutais invita tout le monde à entrer et demanda à Dorothée de mettre la bouilloire sur le feu, il était presque l'heure du thé.

– Clovis vous conduira au salon pendant que j'accompagnerai Annabelle se changer. Il est vrai que nous ne vous attendions pas avant un jour, au moins !

La petite famille s'excusa de ne pas avoir précisé dans la lettre qu'il prendrait le train jusqu'à Nantes et arriveraient donc plus tôt.

– Clothilde était réticente mais reconnaît que c'est une invention des plus pratiques. Un gain de temps considérable, n'êtes vous pas d'accord ma chère ?

Avant toute réponse, pressée d'emmener Annabelle loin d'ici, accoutrée comme une " fermière ", Madame de Coutais proposa qu'ils racontent tout leur périple en détails dès que la demoiselle serait prête. Elle accompagna Annabelle, une main derrière son dos, la poussant vers l'escalier. Une fois que plus personne ne pouvait l'apercevoir, elle agrippa fermement le bras de l'enfant. Annabelle aurait voulu crier qu'elle lui faisait mal mais elle contint sa plainte, traînée jusqu'à ses quartiers.

– Tu as encore pris la poudre d'escampette ma grande, je ne savais pas que tu aimais te lever aux aurores ! Encore une fois, tout le monde se démène dans cette maison pour te rendre présentable et regarde comment tu nous remercies ? Petite ingrate.

Annabelle de CoutaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant