Chapitre 2 - 20 septembre 2023

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Alex.

Présent.

8 h.

J'ai passé la nuit à jouer sur mon piano. C'est ainsi depuis plusieurs semaines, peut-être même plusieurs mois. Je n'arrive plus à m'arrêter.

Ma muse créatrice apparaît principalement après 22 heures.

Ce qui peut être assez problématique, surtout quand je dois me rendre en cours le lendemain. Mais c'est plus fort que moi, plus fort que la fatigue que je ressens et que l'angoisse de l'avenir incertain qui me hante.

Fermer les yeux. Visualiser des couleurs. Entendre des notes et des gammes.

Bleu azur, Sol mineur.

Je ne peux me concentrer sur autre chose lorsqu'une telle frénésie s'empare de moi. Mon obsession dès lors est de retranscrire toutes ces sensations dans des partitions et à jouer les notes jusqu'à ce que je sente mes doigts brûler sur les touches.

Dans ma chambre de 50 m2, allongé sur un lit faisant trois fois ma taille, je contemple le plafond moulé au-dessus de moi.

Encore un autre jour à devoir faire semblant d'être le fils parfait.

Depuis petit, je veux faire de la musique. Je ne vis que pour les sons. Mon piano est ma raison d'être, mon échappatoire et ma bouffée d'oxygène. Je sais néanmoins que l'on attend de moi bien plus que cela. Mes parents me promettent un grand avenir, et je ne peux me permettre de les décevoir. Toute cette pression pèse tellement sur mes épaules au quotidien, elle est devenue si lourde, que j'ai la sensation d'être prisonnier dans une cage dorée.

Je me décide enfin à me lever et me dirige vers la salle de bain située à l'autre bout du couloir avant de découvrir que celle-ci est fermée.

— Charlotte, sors de là, je dois me préparer, je suis déjà assez en retard comme ça ! braillé-je en frappant le bois massif.

Personne ne répond. Ma sœur est trop occupée à chanter sous la douche, j'entends qu'elle s'égosille encore sur un son de Lana del Rey. Je cogne la porte un peu plus fort avec mon poing.

— Bon, tu sors oui ?! lancé-je sur un ton encore plus agacé cette fois-ci.

Planté en caleçon, je commence sérieusement à m'impatienter face à la nonchalance de ma frangine, mais surtout, devant l'heure qui tourne. Je suis déjà arrivé bien trop de fois en retard depuis ce début d'année, et je ne peux plus m'autoriser une seule remarque de plus. Je risque l'expulsion du prestigieux établissement dans lequel mes parents m'ont inscrit.

Ce n'était pas mon choix d'ailleurs, je n'avais aucune envie de me retrouver dans une de ces grandes écoles dans lesquelles tous les fils et filles de vont. Mais comme tout jeune homme de ma condition, je me dois d'être l'héritier modèle, le garçon parfait, le trophée que l'on expose lors des soirées mondaines.

Je crois avoir réalisé que je suis loin d'être ce gars-là. Avoir ouvert les yeux ne m'a pas pour autant donné le courage de me sortir de cette situation, bien au contraire. Cela ne fait que renforcer ce sentiment d'étouffement qui me compresse la poitrine au quotidien.

Ma sœur ouvre subitement la porte de la salle de bain et me regarde d'un air condescendant.

Elle est encore en serviette, le corps dégoulinant.

— Ah tiens, tu es déjà debout toi ? me répond-elle d'un air que j'interprète comme condescendant. Je n'avais plus l'habitude de te voir levé de sitôt, Monsieur « j'enquiquine tout le monde à jouer du piano jusqu'à 4 heures du matin » !

Hope Dies Last [ÉDITÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant