Je ne meurs pas, je tue !

10. Cauchemar

Je passai les quarante-huit premières heures enfermées dans l'avion avec les autres niveaux en chefs. Nous discutions de l'intervention. Nous eûmes du mal à mettre en place une stratégie. Je possédais la localisation des planques et la connaissance des lieux, mais entrer dans le complexe restait une tâche compliquée. Sadiq filtrait les accès du complexe par scan oculaire et la planque ne possédait qu'un unique accès. Enfin, le deuxième accès ne s'ouvrait que de l'intérieur et je ne me pensais pas en mesure de le retrouver.

Ils discutèrent tous les quatre. Assis, les coudes sur la table et les mains regroupées devant ma bouche, je me contentais de réfléchir aux possibilités envisageables. J'acquiesçais d'un coup de tête quand on me parlait. J'étudiais les pistes réalisables en écoutant les chefs d'équipe discuter. Je conclus que l'opération devait se dérouler de nuit. Nous devions les prendre de vitesse et empêcher toutes réactions de leur part. Nous prîmes le temps de réfléchir à d'autres solutions d'interventions. Alex voulait étudier toutes les perspectives envisageables. Comme je l'expliquais à mes adjoints, Sadiq ne sécurisait pas le lieu par des moyens humains. La nuit, tout le monde dormait dans le complexe. J'espérais que les habitudes du GIT n'avaient pas changé avec ma trahison. Nous pariâmes la réussite de la mission sur un oubli de Sadiq. Je choisis de parier que mon empreinte oculaire restait active dans leur système. Vu sa fréquence de changement de mot de passe, je me sentais en mesure de tenir ce pari sans trop de risques. J'espérais ne pas me tromper. Je ne voyais aucune autre possibilité d'entrer dans la planque X-Ray. Les deux jours s'écoulèrent sans que je m'en rende compte, dans une grande tristesse et un grand malheur. Pendant ma première année, je passais la majorité de mon temps avec Irina. Mon esprit restait dans le déni. Je pensais à Laura que le soir lorsque je me retrouvais seul. Depuis l'année dernière, comme je travaillais en permanence sur le GIT, mon esprit repensait à elle. Je la revoyais sans cesse devant moi à me reprocher sa mort. Plus le temps avançait, plus je souffrais de cette vision. Les douleurs et les migraines devenaient de plus en plus grandes. Je n'arrivais plus à les canaliser. Je me répétais que si cette mission échouait, j'abandonnerais tout.

— Tom, tout le monde nous attend, annonça John en regardant la caméra extérieure.

Je levai la tête vers l'écran.

— Nous ne nous étions pas réunis depuis un moment.

Je passai ma main dans mes cheveux en les recoiffant. Nous sortîmes tous les cinq rejoindre les autres. Je restai en hauteur dans le hangar de l'avion avec Alex. Je cherchais mes mots. Je souhaitais être dans le concret, mais succinct. Pendant ce temps, je jouais nerveusement avec le karambit de Laura. Irina remarqua mon mal-être, superposé avec la réflexion sur mon discours. J'avais beau savoir dissimuler mes émotions, Irina et Alex me connaissaient. Ils étaient en mesure de s'en rendre compte. Ma meilleure amie, à l'arrière du groupe, sortit son arme de poing et la mit le long de sa cuisse. Je le remarquai et repris mes esprits. C'était un signe que l'on mettait en place dans ce genre de situation. Je me devais d'éviter de faiblir devant mes hommes.

— Je vous ai tous fait venir, car nous détenons une information capitale qui impacte la suite de notre mission. Je remercie Frantz de nous avoir apporté la localisation exacte de la planque principale du GIT. Les niveaux en chef et moi venons de concevoir une stratégie offensive. Nous mettrons un point final à leurs agissements, commençais-je par dire.

Je me souviens de l'impatience dont regorgeait mon discours. Je me sentais atteindre mon objectif.

Si seulement je savais à quel point je me trompais.

— Je me permets d'intervenir et de rappeler que la mission ne pourra atteindre son objectif que si tout le monde se porte une confiance mutuelle, précisa Alex d'un ton ferme.