Chapitre 13 - Pandore

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La journée était étrange ce jour-ci, les surveillants couraient partout, à la recherche d'une certaine Lucille, et d'Orion, les deux absents toute la journée. Etant tous à l'internat, les absences sont rares, et si l'on est malade, l'infirmerie doit être la première prévenue, ce qui n'était pas le cas pour ces deux-là. De plus, Xan, au fond de la classe, dernièrement toujours en compagnie d'Orion, semblait très anxieux.se. Pandore n'arrivait pas à se concentrer avec les cliquètements de ses stylos, la table qu'iel faisait bouger avec ses jambes, et ses soupirs incessants. Elle ne chercha cependant pas à comprendre, et lorsqu'elle quitta la salle du dernier cours, Hëna arriva avec vitesse devant elle, Pandore la devança :

- Quoi, encore ?

- Nous devons découvrir la liste des invités à la soirée du meurtre, ça devient urgent.

- Ça y est, tu décides d'un coup que c'est une cause qui en vaut la peine ?

- J'ai toujours pensé que ça en valait le coup.

- Et pourtant tu ne voulais pas « jouer à l'enquêtrice ».

- Je n'avais pas mesuré à quel point nous étions en danger.

- Ouais... Mais pas ce soir, je suis occupée.

Hëna la tira par le bras avec empressement, l'éloignant des autres camarades qui les observaient d'un air bizarre.

- Deux disparitions aujourd'hui, tu trouves ça normal ? Tu ne penses pas qu'il faille essayer d'agir là ?

- Et toi tu ne penses pas que cette liste a déjà été analysée ? Tu ne penses pas qu'il y a de réels enquêteurs sur cette histoire ? On a joué deux minutes avant de se rendre compte qu'on pouvait pas faire grand-chose.

- Peut-être, mais qu'est-ce qui te dit qu'ils ont trouvé quelque chose eux aussi ? Qu'ils sont plus avancés ? Nous pouvons le faire, et ça ferait de nous les génies de cette école.

- Nous ne sommes pas plus intelligentes que des professionnels.

- Je le ferai, avec ou sans toi, mais ta télékinésie pourrait peut-être m'aider, c'est tout, ajouta Hëna en croisant les bras sur son t-shirt bordeaux.

- J'ai prévu de réviser ce soir, ce sera sans moi.

- Tant pis, j'aurai la gloire à moi toute seule... marmonna la jeune fille avec un air faussement désintéressé.

Face à l'expression supérieure plaquée au visage d'Hëna, Pandore soupira, et capitula :

- D'accord, mais pas longtemps, tu récupères la liste et on s'en va.

Hëna sautilla de joie avant de se calmer sous le regard sévère de sa camarade, elles rejoignirent donc discrètement le couloir de l'administration, qui était étonnamment vide.

- Si on se fait prendre, on dira qu'on cherchait s'il y avait les intitulés des cours pour le prochain semestre, dit Hëna dans un murmure.

- Ok...

Le chemin était libre, personne dans les parages, face à une pièce, elles se dirent qu'il s'agissait du bureau du directeur, mais la porte était fermée. Hëna sortit alors une barrette de la poche de son jean et la tendit à Pandore. Celle-ci utilisa son pouvoir pour placer l'objet dans la serrure, et elle put ainsi la crocheter simplement par la pensée, d'un clic, la porte s'ouvrit, la jeune fille sourit victorieusement, Hëna la taquina :

- J'aurais pu le faire avec mes propres mains.

- Oui oui, c'est ça, c'est pour ça que t'avais désespérément besoin de moi.

Les deux filles pénétrèrent dans la pièce et se mirent directement à fouiller dans les papiers et tiroirs pour trouver toute information sur le bal d'intégration.

- Elle y est sûrement, c'est la feuille qui leur permettait de laisser ou non entrer les élèves, elle doit bien être ici !

Il y avait tant de paperasse sur le bureau qu'elles n'eurent même pas le temps de tout regarder lorsqu'elles entendirent des voix dans le couloir. Prises par surprise, elles se cachèrent en vitesse dans un placard encombré.

- Je viens de faire tomber une bague... soupira Hëna avec énervement.

Pandore observa l'objet à quelques mètres du placard, et le récupéra à l'aide de son pouvoir à l'instant où la porte du bureau s'ouvrit, sur les deux voix. Elle en profita pour rendre le bijou à sa camarade, en tendant l'oreille :

- Bizarre, j'étais pourtant certain d'avoir fermé la porte !

- Un moment d'égarement ça arrive, c'est compréhensible avec tout ce qu'il se passe en ce moment...

Pandore leva les yeux au ciel. Elle reconnut la voix du directeur, et celle d'une surveillante, elle espéra que leur présence ne soit que brève. Elle l'entendit chercher quelque chose dans ses tiroirs, puis elle se reconcentra sur Hëna en priant que le directeur n'ouvre pas le placard dans lequel elles s'étaient cachées. Si Pandore savait garder son calme dans une telle situation, ce n'était pas le cas d'Hëna, qui avait la respiration assez forte, et celle-ci grandissait à chaque instant.

- Tais-toi, mima Pandore avec ses lèvres et exagérant ses mimiques.

L'étudiante répondit en inspirant plus calmement et levant la tête vers le ciel, mais cela n'arrangea rien. Pandore fut forcée de placer sa main sur sa bouche pour les éviter de se faire repérer. Celle-ci baissa sur elle un regard surpris, puis Pandore décrypta un sourire dans ses yeux.

- Arrête ça ! murmura-t-elle silencieusement.

Le sourire d'Hëna s'intensifia, tandis qu'elle essayait en vain de retrouver son sérieux. Pandore sentait son cœur s'emballer sans comprendre, les deux filles n'étaient qu'à quelques millimètres, leurs corps se touchaient, et pourtant elles devaient tout faire pour rester silencieuses. Hëna tenta de retirer la main de Pandore de sa bouche, mais celle-ci ne bougea pas. Heureusement que les deux autres discutaient car Pandore était certaine qu'ils auraient tout découvert dans le silence. Pandore se sentait soudainement trop consciente de son propre corps, de sa proximité avec Hëna, de son regard puissant et ses doigts posés délicatement sur son poignet.

Elles entendirent finalement la porte claquer et les pas s'éloigner, et Pandore put enfin lâcher les lèvres d'Hëna, qui s'exclama :

- Qu'est-ce qui te prend de faire ça !

- Fallait que t'arrêtes de respirer si fort ! Qu'est-ce que j'aurais pu faire ?

Hëna ne répondit pas, ses yeux s'attardèrent sur les lèvres de Pandore, qui le remarqua et fut prise d'un doux vertige, une tentation mystérieuse. Elle aussi perdait le contrôle de son souffle, dans cette proximité, et elle ne put réfréner l'attirance qui s'empreignait d'elle. Elle se perdit alors dans la contemplation d'Hëna, ses longs cils maquillés, la courbe douce de ses lèvres tentantes, son cou élégant, ses clavicules fines habillées d'un collier de perles...

Elle finit cependant par sortir du placard, replaça sa longue chevelure brune et lissa ses vêtements, se reprenant :

- C'est fini les bêtises, on trouve le document et on s'en va, sinon moi je m'en vais, je n'ai pas que ça à faire.

- Tant mieux, Pandore, tu peux partir je n'ai pas besoin de toi.

Entendant cette phrase, Pandore se vexa, et se rendit compte que c'était bien cela, Hëna, elle n'était pas du genre à hésiter avant de jeter quelque chose lorsqu'elle ne lui était plus utile. Son sang bouillonnait et elle était furieuse d'avoir ressenti un instant d'attraction pour cette fille. Même si cela était possiblement réciproque.

- Très bien, je n'ai pas besoin de toi non plus, alors je peux partir, lâcha Pandore avant de s'éloigner.

- Attends !

Mais celle-ci ne laissa rien entendre et l'abandonna ainsi.

Sous le murmure des ombresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant