IV

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Faith

Vous savez, ces jours où la seule envie qui vous traverse l'esprit durant une journée de cours est de sombrer dans le sommeil ? Eh bien, je ne sais pas pour vous, mais pour moi, ces journées sont les plus pénibles et interminables. Privée de sommeil, victime des rumeurs incessantes qui circulent à mon sujet, je me tiens devant la porte de la classe 133, dédiée à l'histoire. L'absence prolongée du professeur ne m'étonne pas. Depuis le début de l'année, il n'y a pas un seul jour où il ne fait pas une entrée remarquée, toujours en retard.

Les chuchotements des élèves derrière moi se fondent en un murmure de fond, une symphonie se mélangeant avec la musique classique qui berce mes oreilles. Parfois, je m'interroge sur ma place dans cet univers adolescent. Comment une jeune fille de 17 ans peut-elle préférer la mélodie apaisante du classique aux chahuts des boîtes de nuit, à l'alcool et à la fumée ? Vivre dans un coin de paix, certes, mais pourquoi suis-je si réservée, si... différente ?

- Entrez, déclare monsieur Johnson, visiblement agité.

Je pénètre dans la salle, suivie de la bande d'élèves. La pièce, baignée de la lumière dorée du soleil, offre une atmosphère apaisante. Des livres aux pages jaunies par le temps reposent sur les étagères, des partitions de piano trônent sur le bureau du professeur.

- Je vais vous donner vos notes pour l'oral. Ce n'est pas fameux, sauf pour certains.

Monsieur Johnson se lève et s'installe sur son bureau, révélant son mécontentement. Les noms des élèves résonnent, accompagnés de leurs notes.

- Adelson, 39/100, il manquait plus de la moitié des choses.

- Anderson, 57/100.

J'attends patiemment mon tour.

- Davis, 97/100, meilleure note de la classe.

Son regard se lève brièvement vers moi, puis retourne à son carnet. Son impassibilité a pour don de me déstabiliser. Surtout quand un quart de la classe tire la gueule à ce point.

- Vous m'étonnez, bien sûr qu'en prenant la fuite et jouant la victime, elle se permet d'obtenir une si bonne note. Elle vous a manipulé, réplique Sharon, me fixant ouvertement.

Le professeur réagit d'un ton sec, brisant le silence :

- Oh, Sharon Dean, c'est ça ?

Elle hoche la tête en arquant un sourcil.

- 17/100, félicitations. En prenant la fuite, tu aurais eu 14.

Elle croise les bras, mais le culot du rire reste étouffé. Face à Sharon, personne n'oserait rire. Elle n'est pas Faith.

La meilleure note après la mienne est attribuée à un garçon aussi discret que je n'avais jamais remarqué, un 83/100. J'ai réussi.

Le problème en histoire c'est que tout est trop facile quand tu as déjà acquis plusieurs sujets. Les cours d'histoire sont intéressants que quand il y a un cours à écouter en s'épanouissant. Mais maintenant, la seconde guerre mondiale, j'en ai par dessus la tête... C'est donc pour cette raison que les minutes s'étirent en une lenteur lourde, chaque seconde pesant sur moi. Le vent léger, glissant par la fenêtre entrouverte provoque un frisson qui éveille en moi le désir démesuré de somnoler sur le bureau, bercée par la voix monotone de monsieur Johnson récitant son cours tel un disque rayé. Mais toute tentative de repos est brusquement interrompue par la sonnerie de mon maudit téléphone. Les regards se posent tous sur moi.

- A qui appartient ce téléphone ? souffle le professeur.

Je scrute timidement la salle avant de lever la main.

Forgotten MemoryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant