C'était un après-midi ensoleillé pour notre homme de Londres. Russel Wilson, un avocat renommé dans la capitale des finances. Il est le père d'une jeune lycéenne qui vit auprès de sa mère en France, dans la jolie ville de Strasbourg. Lui et la mère de sa fille sont séparés avant qu'elle soit née, mais cela n'a pas empêché à la jeune fille de rester auprès de son père et d'entretenir une bonne relation avec ce dernier.
Il est deux heures de l'après-midi, trois heures en France. Il boit aux côtés des ses amis dans le bar nommé "69 Colebrooke Row". C'est son petit moment, son péché mignon, boire du cidre. Cette saveur qui lui rappelle son enfance, les étés qu'il passait avec ses parents sur les côtes de la Bretagne. Même si Russel est londonien, il est amoureux de la France. Il déclare toujours à ses proches "Si je venais à mourir, je ne veux pas être enterré à Londres ou encore dans ma petite ville natale qui est Castle Combe, mais en Normandie... ou peut-être la Bretagne. Je ne sais pas quoi choisir, vous pourrez choisir, tout sauf l'Angleterre". Chaque fois qu'il boit un cidre il se rappelle des crêpes bretonnes et des beaux paysages de la Bretagne. Russel est un grand rêveur, demandez à n'importe qui, pas une seule personne ne vous dire le contraire. Il est devenu un fervent rêveur à l'âge de 19 ans, il venait tout juste de rencontrer Maria. Cette femme du même âge qu'il surnommait "la belle brune" ou "l'insaisissable française". Il essayait toujours de s'approcher d'elle mais elle partait aussi vite. Il a eu le courage de lui parler, lui proposer un rendez-vous, puis un deuxième, ensuite un troisième et d'autres encore jusqu'au moment où ils sortent ensemble. C'était beau, mais au bout de six mois, ils ne ressentaient plus rien, puis un événement, le meilleur selon Russel, seulement un mois après leur rupture, Maria découvre qu'elle est enceinte. Il fut perplexe, des tonnes de questions arrivaient à la minute dans sa tête. Est-ce que ce bébé est vraiment le mien ? Serais-je bon ? Même si les deux jeunes personnes n'étaient plus ensemble, ils ont gardé une bonne relation pour leur enfant et pour se respecter mutuellement. Il peut voir sa fille durant toutes les vacances scolaires. Et cela lui convient, il ne peut pas demander plus. Il repassait encore, sans avoir prêté attention aux dix-huit appels manqués de Maria.
Dix-huit ? Cela ne lui ressemblait pas. Maria n'insiste pas autant. Elle n'a jamais fait ça. Il remarque même qu'elle le supplie de répondre via certains messages. Il soupire, légèrement inquiet. Il déverrouille son téléphone et l'appelle.
«Maria ?. " Il n'a pas de réponse, il entend juste son ex petite-amie pleurée. Aucun mot. Il devient anxieux à présent
-Russel... écoute.." Encore des pleurs
-Maria, calme toi, qu'est-ce qu'il se passe ? Tu t'es blessée ? On t'a fait du mal ? Est-ce que Lily va bien ?" Demande-t-il anxieux et paniqué. Il sent son coeur loupé des battements, les pleurs, la voix tremblante, il sait très bien que quelque chose de dramatique s'est produit.
-Il.. Il y a eu.. une fusillade dans le lycée de Lily" Elle essaya tant bien que mal de se calmer et d'expliquer ce qu'il s'est passé. Le londonien est figé, il essaye de comprendre et de bien recevoir cette information qui est extrêmement pesante. Une fusillade dans l'école de sa fille ? C'est un cauchemar.
-Tu rigoles pas vrai ? Ella va bien. Y'a pas eu de morts, hein ? Pas vrai ?» Mais le silence de Maria en dit long. Il lui a fallu que quelques secondes pour réaliser, pour vraiment comprendre que ce qu'elle venait de dire n'était pas une blague de mauvais goût. Il n'a fallu que quelques secondes pour que le monde lui prenne sa fille de manière injuste. Sa fille est décédée. Il sait que tout cela est vrai, c'est la triste nouvelle, la dure vérité, le désespoir qui lui pèsera jusqu'à sa mort. Sa fille est morte. Il regarde le sol d'un regard vide; le teint pâle, plus pâle que la dame blanche; il avait oublié qu'il était toujours en appel, mais aucun des deux ne daignent de parler. Trop douloureux. Maria décide de mettre un terme à l'appel, elle ne peut pas supporter ce silence, ce manque de mots. Elle a besoin de mots, mais elle s'est très bien qu'elle ne pourra pas les avoir auprès de l'avocat.
Il est resté, figé là, regardant le sol qui était propre et lumineux. Il leva la tête pour regarder autour de lui avec cette seule et unique pensée "Ma fille est morte". Il laisse une goutte salée échapper son oeil, 'un homme qui ne pleure pas n'est pas un homme. Il veut rester fort, pour l'instant, en public. Il sait très bien que chez lui, il pleurera et fera une crise de nerfs. Il le sait. Il s'avance tristement du bar et marche en direction de chez lui. Cette pensée, horrible, étouffante, improbable ne cesse de le tourmenter. Le temps s'est figé, le monde est noir ou gris, ce qui est sûr c'est qu'il n'y a plus de joie selon son point de vue. Il lui a fallu une vingtaine de minutes pour arriver à son appartement. Il ouvre la porte d'un geste monotone et lent. Il regarde l'intérieur, il imagine ne vie sans elle. Ce n'est pas un rêve ou une pensée qu'il a choisi, cela c'est fait instinctivement. Et là, il fond en larmes. La chose qui pour lui était improbable est arrivée. Il se blâme en se disant qu'il aurait dû la protéger, qu'il aurait dû être là. Pourquoi le monde est cruel d'un coup ? Pourquoi le monde a toujours été cruel ? Pourquoi la sécurité n'est pas assez bonne ? Combien de familles ont été détruites ? Combien de vie d'enfants et de personnels ont été prises ? Que des questions sans réponses. Il a l'impression que tout son monde s'effondre. Sa fille était son tout. Le monde l'a pris, l'a éloigné de lui. Il ne la reverra jamais, ne l'aura plus jamais dans ses bras, il ne pourra plus jamais entendre sa douce voie ou encore voir son jolie sourire. Elle n'avait que seize ans. Elle avait déjà un avenir tout tracé dans le coin de sa tête, ses projets de vie, ses études. Elle avait tout, elle était déterminée et avait hâte de passer ces étapes. Et juste une personne, une arme affreuse qui ôte la vie de centaines, de milliers, de millions et même de milliards de personne par jour. Juste que quelques secondes et peu de sécurité, et deux classes entières ont péri. Une trentaine d'élève par classe... soixante élèves avec leurs professeurs sont décédés à cause d'un homme ou d'une femme, mais quelqu'un ou plutôt quelque chose car ôter la vie des gens est un acte inhumain. Ces personnes folles et sans coeur ne peuvent plus être vu comme des êtres humains. Il a la rage, le désespoir, le chagrin. Cette déchirure qui mettre du temps ou ne se refermera jamais.
Il s'assoit et regarde ses bouteilles d'alcool. Il décide de prendre sa bouteille de whisky et d'y boire la bouteille entière, il ne laisse aucun goutte, pas une seule. C'était pas assez, il ne se sentait pas satisfait, pas assez fort. Il a besoin de noyer son chagrin dans quelque chose de fort. Il en prend une autre et y boit tout le contenu. Mais il a mal à la tête, le mélange de tristesse et de l'alcool semble ne pas faire bon ménage. Il se lève et prend des boites de médicaments, il n'y voit pas clair, sa vision est floue. Il est bourré mais agi tel une personne sobre. Il prend une boite jaune qui lui semble être du Doliprane.. mais il en voit une autre, donc il la prend aussi. Il ne sait pas la quelle choisir. Après quelques secondes, il prend deux pilules provenant de la boite dont il était certain que c'était du Doliprane. Mais il voit des écritures rouges sur une autre, il hausse les épaules et décide de ne prendre qu'un pilule venant de celle-ci. Il se dit que ce n'est surement rien de grave.
Il va dans sa chambre, désespéré. Il vient de perdre la personne qu'il chérirait. Il l'aimait tellement. Il repleure, il va à son bureau et écrit une lettre pour sa fille. Il y écrit tous les moments joyeux, les moments de colère, les moments où il était fier. Tout, absolument tout. Il ne lui a fallu qu'un feuille recto-verso pour exprimer tout ce qu'il avait sur le coeur. Et avec son profond chagrin, il s'allonge sur son lit. Il s'installe confortablement, et tout doucement, alors que le maux de tête ne s'est pas calmé, il ferme les yeux. Ses yeux semblent lourds mais il n'y prête pas attention, il ferme ses yeux pour la dernière fois.