Chapitre 15

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   C'est dans la boîte. Je lève la tête vers Thomas qui a déjà fini depuis une bonne demi-heure et gribouille des lignes sur une feuille blanche. Il n'a jamais été si concentré. Une petite mèche bouclée voyage sur son front avec la brise de la fenêtre qu'il a ouverte en début d'heure. Je lutte contre l'envie de la lui dégager.

   Le triomphe se lit sur mes traits étirés par mon sourire qui n'a rien de forcé. Je suis fière de moi et je peux lire sur son visage, désormais dirigé vers moi, que lui aussi. Mes lèvres s'élargissent davantage. Certes, je n'ai pas dû répondre juste partout, mais je suis venue à bout de ce foutu contrôle. Thomas n'a pas fait tout ça en vain.

   En vrai, Fallen n'a pas été si pointilleux que ça sur ses questions. Rien qui ne vaille la peine de se vanter. Mais pour quelqu'un comme moi, c'est quand même énorme. Ça fait un moment que je suis perdue dans cette matière, pour ne pas dire depuis toujours. Je ne pensais pas en voir le bout cette année.

   Ma sœur va en être ravie. J'espère que ça sera suffisant pour me faire un peu pardonner. Avec des bonnes notes, je pourrai la suivre n'importe où. C'est le meilleur cadeau que je puisse lui faire.

   Il reste à peine cinq petites minutes si la vieille horloge qui doit dater d'avant ma naissance est bien à l'heure. Je me lève pour déposer ma copie sur le bureau du prof qui me lance un sourire bienveillant et retourne m'asseoir vers Thomas qui, de son côté, ne m'a pas quittée des yeux.

–   On dirait un psychopathe, je lui chuchote en me repositionnant sur ma chaise, le regard fuyant. Arrête de me reluquer.

   Très convaincante, Ava

   Thomas ignore ma requête et me détaille maintenant des pieds à la tête.

   Faites que le sol s'ouvre sous moi.

–    J'aime ton jean, il te met en valeur, me sort-il sans gêne aucune, ses yeux plongés dans les miens qui se sont figés.

   Si j'essayais de lui répondre, je bégaierais certainement. Disons que j'en suis incapable tant il m'a prise au dépourvu, tant et si bien que je ne me suis pas rendue compte que ça a sonné avant de voir tout le monde se lever.

   J'essaie de profiter de l'agitation pour masquer ma désorientation. J'attrape mon sac et range mes affaires une à une, me concentrant sur chaque chose. L'ignorer, c'est la meilleure des contre-attaques. Mais il faut quand même que je le remercie, je ne peux pas me permettre de détaler comme ça, pas après toute l'aide qu'il m'a apportée.

   On fait partie des derniers encore dans la salle. Je me redresse sur ma chaise pour paraître plus grande mais surtout plus confiante, en contrôle, et le remercie de la manière la plus neutre qui m'est permise. Indubitablement, il ne trouve rien de mieux à répondre que son sourire charmeur.

–   Tu sais, tu vas finir tout ridé si tu continues, je balance, les yeux rivés sur ses lèvres. Change de disque ! je frappe presque instantanément en commençant ma sortie fulgurante.

   C'est que je m'améliore. On peut mourir de fierté ?

   En direction de la porte, je prends bien soin d'appliquer ma démarche. Je peux sentir d'ici ses yeux me dévorer. Ainsi fonctionne la torture. Ce n'est plus un secret qu'il m'apprécie un peu trop. Alors, à défaut de m'en débarrasser, autant en profiter. Le lui faire regretter.

   Je compte bien le faire exploser. On verra bien qui gardera son sourire lorsque j'aurai triomphé.

   Si on m'avait un jour parlé de la tournure que prendrait cette année, j'aurais pris ma propre sœur pour une folle. En vue de la situation plus que délicate, je me découvre des qualités insoupçonnées. Je pourrais finir par y prendre goût. Ça me plaît.

Dans l'ombre des étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant