14.

7.8K 357 140
                                    

Mercredi 7 juin 2023 – Tampa - Floride

— Qu'est-ce qui se passe Alec ?

— Tu vas vraiment jouer à ça, Swan ? Ignorer le fait que tu es sortie avec ce type ?

Je déglutis, percevant la tension qui s'épaissit malgré la façade de calme qu'il tente de maintenir. June jette un regard intrigué depuis la fenêtre, mais je lui fais signe de rester là-haut, de ne pas s'immiscer dans cette confrontation imminente.

— Alec, on a juste été manger une glace, rien de plus. Et puis, en quoi est-ce que ça te regarde ? Je pensais qu'on avait déjà eu cette discussion, je souffle lasse.

Il soupire à nouveau, cette fois-ci avec exaspération.

— Parce que ça me dérange ! Tu es comme ma sœur, bordel ! il s'exclame avec véhémence.

Encore et toujours cette même phrase. Mes nerfs sont à vif, et je ne peux plus supporter cette rengaine qui tente de me lier à lui d'une manière que je ne peux accepter.

— JE NE SUIS PAS TA SŒUR ALEC ! Tu répètes ça sans arrêt, mais la vérité c'est que non, je ne suis pas ta sœur, ni ta nièce, ni ta cousine, je ne suis pas de ta famille ! je m'insurge en me relevant de ses genoux brusquement pour me tourner vers lui.

Le silence qui suit mes mots semble s'étirer à l'infini. Alec, figé, me fixe intensément. La tension entre nous atteint son paroxysme, prête à exploser à tout moment. Dans l'obscurité, je peux presque percevoir le battement de nos cœurs s'affronter en un rythme discordant.

— Swan, tu ne comprends pas...

— Si, Alec, je comprends très bien. Tu as vécu avec nous, m'as vu grandir, tu m'as vue traverser des étapes importantes de ma vie, mais cela ne te donne pas le droit de décider qui je suis ou avec qui je passe du temps. Ça ne te donne pas le droit de me contrôler.

Les mots sortent de ma bouche avec une force que je ne me connaissais pas. La frustration accumulée au fil des années éclate en une cascade de paroles, une déclaration de mon besoin de liberté et d'autonomie.

— Je ne cherche pas à contrôler ta vie, Swan, je...

— C'est exactement ce que tu fais, Alec. Tu as cette idée obsessionnelle que je suis comme ta sœur, mais je ne le suis pas. Et même si nous partageons des liens familiaux, cela ne te donne pas le pouvoir de dicter ma vie sentimentale.

— Je...

— Je ne comprends pas Alec, je ne comprends pas pourquoi tu réagis de la sorte. Même Eden est moins envahissant que toi. Depuis mon retour, tu me fais une scène dès que je parle à un mec, on dirait... on dirait presque que t'es jaloux.

Les secondes qui suivent semblent figées dans l'obscurité, le seul bruit étant le souffle retenu entre nous. Alec, habituellement maître de ses émotions, semble déstabilisé par mes paroles. Je feins l'assurance, mais à l'intérieur de moi mes émotions tourbillonnent et s'entremêlent, suspendue à ses lèvres après mon affirmation audacieuse.

— Jaloux ? Swan, non, mais sérieusement ? Tu déformes tout. Ce n'est pas de la jalousie, c'est de l'inquiétude.

Je fronce les sourcils, perplexe devant son déni évident.

— Bien. Tu es inquiet pour moi ? Elle était où ton inquiétude pendant ces 5 années ? Tu prétends que je suis comme ta sœur, que tu es juste inquiet pour moi, mais si c'était le cas, tu ne penses pas qu'un grand frère si inquiet aurait dû venir voir sa sœur au moins une fois en 5 ans ? Qu'il aurait dû renoncer à ses festivals pour venir la voir quand elle l'appelait en pleur, car ses parents l'avaient encore déçu ?

Les accusations dans mes paroles résonnent dans le silence, et Alec semble chercher ses mots. Les émotions se lisent sur son visage, mêlant la surprise à une pointe de culpabilité.

— Swan, encore une fois, tu ne comprends pas...

— Oh, j'ai bien compris, Alec. Tu veux me protéger, mais seulement quand ça t'arrange. Et maintenant, tu prétends que ton inquiétude est la raison de tes agissements récents ? C'est difficile à avaler.

Il détourne le regard, évitant le contact visuel direct. La nuit devient le témoin silencieux de nos vérités exposées.

— C'était compliqué. Les festivals, mes engagements, je ne pouvais pas...

— Ne me parle pas de tes engagements, Alec, je le coupe encore une soir. Il était question de priorités, et je ne semblais pas en faire partie. Alors, ne prétends pas que ton attitude actuelle découle uniquement de l'inquiétude fraternelle. Tu ne supportes juste pas le fait de me voir avec un homme.

Le silence qui suit mes mots est lourd de reproches non exprimés. La vérité, enfin exposée, plane au-dessus de nous comme un nuage sombre. La nuit, autrefois complice de nos moments partagés, devient le témoin de la fracture de notre lien, de la complexité de nos émotions enchevêtrées dans le noir.

Ne souhaitant pas en entendre davantage, je tourne directement les talons pour retrouver le réconfort de ma chambre en compagnie de June. La frustration, la tristesse et la confusion m'envahissent.

----

Samedi 17 juin 2024 – Tampa - Floride

De manière surprenante, Alec et moi n'avons pas eu le moindre accrochage de la semaine. Cela pourrait s'expliquer par le fait que je ne l'ai pas croisé du tout. Lui qui, habituellement, passe une grande partie de son temps chez nous, n'a pas pris la peine de venir une seule fois. Bien que j'apprécie de ne pas avoir à supporter ses regards insistants et son attitude protectrice, je ne peux m'empêcher de me demander si cette soudaine « disparition » a un lien avec moi. Surtout que les jumeaux semblent également perplexes. Je les ai surpris en train de discuter mercredi matin, se questionnant sur le comportement étrange du brun. Malgré l'envie qui me démangeait, je n'ai pas cédé à la tentation et ne lui ai pas envoyé de message.

C'est samedi et je me dirige actuellement vers la salle de sport, sur la demande de Marco. Même si j'avais quelques doutes sur le bien-fondé de cette décision, sachant qu'Alec serait probablement là, j'ai finalement trouvé la motivation nécessaire. Pas question de laisser son « inquiétude » à mon égard entraver ma vie.

Je pénètre dans la salle et dépose mes affaires sur un banc. Déjà en tenue, je balaie la pièce du regard à la recherche de Marco, mais il est introuvable. En revanche, mes yeux croisent ceux d'un brun ténébreux à la mâchoire carrée, qui hante mes pensées. Je déglutis difficilement, mais me reprends rapidement. Malgré notre récente dispute et bien que je sois encore agacée de son attitude passée, je lui adresse un bref hochement de tête. Je ne suis plus une enfant, je ne peux pas simplement l'ignorer, même si ce n'est pas l'envie qui m'en manque. Cela semble le surprendre. Je commence à m'échauffer. Avant même que j'aie eu le temps de m'étirer correctement, il s'approche de moi.

---

Holà ! Alec n'assume pas mais on avance, non ?

Liens interdits : entre cœurs et amitiéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant