J'ai froid. J'ai froid, mais je ne frisonne pas. J'ai vécu l'enfer, mais je ne ressens rien. Où est la douleur ? Je devrais la sentir. Elle devrait être là, à me cisailler le corps de parts en parts. A me faire gémir jusqu'à ne plus avoir de voix. A me crisper, me contracter au point que je finisse par ne plus contrôler le moindre de mes muscles. Elle devrait se faire entendre, détruire autant de mes souvenirs que l'on m'a brisé d'os. Hurler dans ma tête, hurler dans mon être.
Je suis censé mourir.
Pourtant, je vis.
Je vois les étoiles dans ce ciel noir. On dirait de l'encre, ou du velours – je ne sais pas. Peut-être suis-je en train de devenir aveugle, de laisser garder au ciel sa beauté secrète. Moi seul semble la voir.
Eux tous, je les vois aussi. Ils se sont affairés tout autour de moi, avant de me déplacer, de me positionner sur cette chose qui leur permet de me porter. Je n'ai rien senti. Je ne sens toujours rien. Mon corps est mort, ma tête pas encore. Elle ne va pas tarder à suivre, n'est-ce pas ? Les étoiles brillent beaucoup, ce soir. Est-ce un signe qui montre qu'elles sont prêtes à m'accueillir ? Et toi, Maman, est-ce que tu es avec elles ? Tu m'attends, toi aussi ? J'espère que tu es là, tu me manques. J'ai besoin que tu me rassures, que tu me dises que je ne souffrirai plus. Que lorsque je m'envolerai vers toi, je ne ressentirai rien non plus. La douleur est le signe de la réalité, et plus précisément son ancrage. Si j'en suis dépourvu, si tout mon corps me donne l'impression qu'on l'a bourré d'anesthésiant... C'est peut-être que j'ai commencé mon ascension, non ? Mon âme ne va pas tarder à se détacher de son enveloppe charnelle, j'imagine. Maman, est-ce que c'est vraiment comme ça que ça se passe ?
Finalement, je te vois. Le ciel ne montre pas ton visage, mais je vois une étoile briller un peu plus que les autres et en la regardant... J'ai l'impression de ressentir une sorte de chaleur qui me fait du bien. Mais mes paupières sont lourdes, si lourdes... Et je résiste, je combats la mort encore un peu. Je m'accroche à ce corps qui n'en peut plus, qui a vécu des choses dont il ne saurait mesurer la teneur... Juste pour avoir le droit de regarder encore un peu la beauté des astres. Du tien, Maman. J'ai toujours su que tu étais une étoile. Tu me disais toujours que non, avec un sourire qui avait le don de chasser tous les nuages dans mon cœur. Tu avais toujours cette étincelle dans les yeux, tu sais, ceux que tu m'as donnés. Cette couleur miel, je la tiens de toi. Au départ, je la trouvais banale... Avant de me rendre compte que c'était peut-être la seule chose que j'aimais chez moi, parce qu'elle venait de toi.
Je n'arrive pas à bouger, mais je parviens tout de même à maintenir mes paupières ouvertes. Je veux continuer de regarder le ciel. Je veux te voir, Maman. On m'a pris ma vie, ma dignité, mais on ne me volera pas mes derniers instants. La dernière image qui doit imprégner ma mémoire, c'est celle-ci. Un instant figé qui, à lui seul, doit effacer toutes les souffrances de ces derniers jours. Ils m'ont tué, Maman. Ils auraient pu faire pire, mais ils m'ont tué.
Alors, que l'on ait tenté de me sauver... Au final, ça n'a pas d'importance. Je savais que c'était inutile. J'aurais voulu le dire à Derek. Lui montrer que tout ça, c'était vain. J'ai voulu les fuir, il m'a arraché à eux. Je ne sais plus vraiment ce qu'il s'est passé. Je ne sais pas où il est... Mais je sais que grâce à lui, je peux te voir. Et tu es belle, Maman. Tu es magnifique. Tu rayonnes parmi les étoiles, tu es l'une d'elles. Tu l'as toujours été. Je ne sais pas pourquoi ni comment, mais je sais que dans ta vie même, tu étais une étoile.
Le soleil, la lune.
Tu étais tout ça à la fois. Et... Je ne sais pas, même si je le pense au fond de moi, j'ai l'impression que ces idées-là ne viennent pas vraiment de moi. On dirait que quelqu'un me les souffle. J'entends une voix... Je crois. Est-ce que c'est la tienne, ou celle des anges qui t'accompagnent ? Tu en es un, toi aussi. Pourquoi tu ne me l'as jamais dit ? J'aurais compris. J'aurais compris que tu n'étais pas spéciale juste parce que tu étais ma Maman même si pour moi, tu vaux toutes les étoiles du ciel. Et je veux te retrouver. On a été séparés suffisamment longtemps, tu ne crois pas ? On a plein de choses à se dire, du temps à rattraper. Il est infini, maintenant, non ?
Je vois ton étoile, je la reconnais maintenant. Elle brille moins... Tu n'es pas d'accord avec moi. Pourquoi ? Je suis en train de partir, Maman... Je n'ai même plus mal. Où veux-tu que j'aille, si ce n'est avec toi ? Quitte à mourir, je préfère te rejoindre directement plutôt que me retrouver seul. Là-haut, je ne connais rien. Sans toi, je serai sans repère. J'ai besoin que tu me guides, Maman. Tu ne peux pas me laisser entrer dans ce monde seul... J'ai peur. Physiquement, je ne ressens plus rien, mais dans ma tête... Les émotions reviennent. J'ai peur. Pourquoi ton étoile semble moins briller, encore une fois ? J'ai peur. Ne me laisse pas Maman, j'ai peur... Tu le sais, que j'ai peur ? Je suis terrifié, plus encore que lorsque cet alpha me faisait du mal. Il me disait des choses... Me promettait mille et un cauchemars. Mais ta disparition me fait bien plus peur que n'importe laquelle des horreurs qu'il aurait pu continuer de me faire si Derek ne m'avait pas récupéré. J'ai besoin de toi, tu le sais... Ne m'abandonne pas, s'il te plaît... !
Mais ton étoile finit par s'éteindre, se fondre au milieu des autres... Se cacher derrière une masse elle aussi mourante. Pourquoi tu t'en vas ? Pourquoi... Tu ne me laisses pas, pas vrai ? Tu es en train de préparer quelque chose... Tu vas sans doute revenir plus brillante que jamais, pour me guider... Pour me montrer la voie vers ce monde que je ne connais pas. Je le sais, je sais que... Tu es là, tu seras toujours là. Mais pourquoi tu ne reviens pas ? Pourquoi je ne te vois plus ?
Je me sens balloté, mais mes yeux secs refusent de se détourner de ce ciel qui m'hypnotise et dans lequel je continue de te chercher activement. J'ai besoin de te revoir, Maman. De te parler. De te dire tout ce que j'aurais voulu te confier ces dernières années, ces derniers jours. Tu ne peux pas... Être partie. Tu étais dans le ciel... Tu y es toujours, forcément. Promets-moi que je vais t'y retrouver ! Je ne veux plus de ce corps brisé, qui cumule des souffrances qu'il ne peut pas supporter. Je ne veux pas être... Ce qui a scellé mon destin. Je veux juste être ton fils, Maman.
Mes yeux me brûlent, je refuse de les fermer. Je continue de te chercher, désespéré. Je me fiche d'avoir l'air d'un fou, d'un idiot. J'essaie de bouger, j'essaie... J'essaie ! Mais mon corps ne semble pas m'écouter. Il est brisé, lui aussi, trop lourd pour me porter jusqu'à toi. A la différence de mon esprit, mon corps est déjà mort. Je ne le sens plus. Maman, reviens ! Aide-moi, montre-moi juste le chemin... S'il te plaît...
Mais j'agonise. Mes yeux veulent se fermer. Je panique. Je ne sais pas si mon angoisse se voit de l'extérieur et je m'en fiche. Si je cède à la dernière volonté de mon corps maintenant, je ne pourrai plus la revoir. Je ne reverrai plus son étoile et... Je ne peux pas. J'ai besoin de ma mère. Je sais qu'elle est là, je l'ai vue ! Alors je me bats, je résiste, je tente au mieux de repousser la mort de quelques instants. Je ne peux pas m'en aller sans être sûr que je pourrai arriver auprès d'elle une fois là-haut ! Je ne peux pas...
Au-dessus de moi, des ombres, des formes sombres. Ça bouge, ça s'agite. On me cache la vue du ciel. Je veux bouger, crier, hurler qu'on me laisse le regarder. Je fais tout ce que je peux pour réveiller mon corps mort... Mais il se refuse à bouger, mes paupières sont les seules petites choses que je peux encore contrôler.
Plus pour très longtemps. Le temps s'écoule et ne m'attend pas. Et je le sens. Rapidement, je le sens.
Ce même contrôle qui m'échappe.
L'obscurité gagne ma vue au fur et à mesure que mes paupières tombent, s'effondrent telles des ruines à bout de souffle – je le suis.
La légèreté me gagne.
Je m'envole.
Où suis-je ?
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L'Emissaire Primordial
FanfictionLa meute s'accorde des vacances bien méritées qui vont virer au cauchemar. L'état de santé de Stiles se dégrade rapidement et Deaton commence à comprendre que l'hyperactif est plus important pour la meute qu'il n'y paraît. Car Stiles est un émissair...