Chapitre 2

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     — Merde... argh... purée, c'était lourd ! soupira Lorenzo en déposant l'un des cartons dans la pièce à vivre, encombrée de nombreuses boîtes encore closes.

     Il se redressa en épongeant les perles de sueur qui s'étaient formées sur son front, une main calée au creux de ses reins pour soulager la douleur que les allers-retours étaient en train de provoquer. Un homme plus grand et aux épaules plus larges pénétra à son tour dans la pièce, les bras chargés.

     — Tu fais une pause ? demanda-t-il en lâchant ses affaires sur une pile de cartons.

     — J'étire mon dos. Tes cartons pèsent une tonne ! T'as mis quoi dedans, sérieux ?

     — Bah... mes affaires, Einstein, se moqua le brun, ébouriffant sa touffe pour ne plus qu'elle lui tombe sur le front.

     — T'as conscience que t'aurais pu accepter un logement à la caserne et qu'on se serait pas tapé tout ce bordel ? râla Lorenzo qui lui emboîtait pourtant le pas, déterminé à terminer ce déménagement rapidement.

     — Effectivement, sourit le jeune sapeur-pompier, un brin moqueur. Mais généralement, c'est déjà meublé et je préfère disposer de mon intimité comme bon me semble.

     — Dis juste que tu veux ramener tes plans à "court terme" sans qu'on te l'interdise.

     Si l'appellation perturba le jeune homme, il s'esclaffa tout de même, secouant la tête. Inutile de rajouter quoi que ce soit. Lorenzo connaissait son penchant pour les relations sans lendemain et c'était sûrement ce qui l'accommodait le mieux. Pas de prise de tête, de sentiments à la limite de l'oppression. L'amour ? Une belle histoire dont il avait clos le chapitre.

     — J'mets ça où Cassien ? s'époumona le jeune espagnol qui retrouvait son accent lorsque la colère venait toquer à sa porte, fait toutefois très rare.

     Occupé à récupérer deux gros cartons plutôt légers, Cassien leva les yeux au ciel de fatigue. Parfois, la logique ne brillait pas à tous les étages dans l'esprit de son meilleur ami. Comment pouvait-il répondre à sa question alors qu'il se trouvait littéralement à l'extérieur de la petite maison qu'il louait désormais au bord de la route ?

     — Cassien ? insista Lorenzo qui tournait en rond, les bras tendus par l'effort.

     — Mais attends ! s'impatienta-t-il, pestant tout bas.

     Légèrement agacé, il repoussa la porte d'entrée du bout de son pied et rejoignit Lorenzo qui s'était appuyé contre un mur, grimaçant.

     — T'es vraiment une chochotte, se moqua Cassien déposant ses propres charges sur le sol.

     De l'index, il désigna l'un des murs parallèles et lui assura que seuls les meubles à monter se devaient d'être dans des pièces bien précises. Non pas que la maison qu'il louait était grande. Pour un jeune homme célibataire, elle était amplement suffisante. Avec la pièce à vivre qui réunissait la cuisine et le salon, une chambre plutôt spacieuse, un cabinet séparé de la salle de bain et un petit cagibi, Cassien se sentait chanceux d'être tombé sur cette pépite. L'offre en valait la peine, d'autant que les prix du marché avaient flambé depuis que la crise économique s'était installée dans le pays.

     — J'suis pas une chochotte, seulement t'as mis au moins dix haltères dans tous tes cartons.

     — Mais n'importe quoi ! Faut vraiment que t'en fasse des caisses tout le temps, toi.

     D'un sourire mauvais, Lorenzo lui dressa son majeur et disparut avant de se faire rouspéter. Ils mirent une bonne heure à tout décharger et encore plus quand il fut temps de visser des meubles dont les plans s'étaient évanouis dans la nature depuis bien longtemps. Ils s'escrimèrent à trouver le bon sens quand il fallut monter une étagère et éclatèrent de rire lorsque le lit-coffre décida de n'en faire que des siennes, enfermant le locataire à l'intérieur. Moqueur, Lorenzo lui fit chanter tout un tas de comptines en échange d'une libération.

Tome 2 - True LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant